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L'Association ACP Legal

  • L'Ohadac et ACP Legal

    La notoriété mondiale et le succès du programme OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires) ont amené de très nombreux juristes, des entreprises et certains Gouvernements des Etats de la Caraïbe à réfléchir à la mise en place d'un programme d'unification du droit des affaires dans la Caraïbe reprenant la philosophie du précédent de l'OHADA.

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  • L'OHADAC en bref

    Plaquette réalisée par l'Association ACP Legal.

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Guadeloupe (FWI)

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AVANT-PROJET DE LOI MODÈLE OHADAC RELATIVE AU DROIT INTERNATIONAL PRIVÉ

ABRÉVIATIONS

ADC : Anuario de Derecho Civil

AEC : Association des États de la Caraïbe

AEDIPr : Anuario Español de Derecho internacional privado

AIB : Association internationale du barreau

ALADI : Association latino-américaine d'intégration

ALALE : Association latino-américaine de libre-échange

ALBA : Alliance Bolivarienne pour les Peuples de notre Amérique

ALÉNA / NAFTA : Accord de libre-échange nord-américain

Am. J. Comp. L.. : American Journal of Comparative Law

Am. J. Int'l L. : American Journal of International Law

Ann. fr. dr int. : Annuaire français de droit international

Ann. suisse dr. int. : Annuaire suisse de droit international

Anuario IHLADI : Anuario del Instituto Hispano Luso Americano de Derecho Internacional

APPI : Accord sur l'encouragement et la protection réciproques des investissements

Ariz. J. Int'l & Comp. L. : Arizona Journal of International & Comparative Law

BID : Banque interaméricaine de développement

British. Yearb. Int'l L. : British Yearbook of International Law

CARICOM : Communauté des Caraïbes

CARIFORUM : Forum Caribéen des États ACP

Cass. : Cour de cassation

Cc : Code civil

CCI / ICC : Chambre de commerce internationale (Paris)

CELAC : Communauté des États latino-américains et des Caraïbes

Ccom : Code de commerce

CEDH : Cour européenne des droits de l'homme

CEPAL : Commission économique pour l'Amérique latine et les Caraïbes

CG : Convention européenne sur l'arbitrage commercial international, conclue à Genève le 21 avril 1961

Chi. J. Int'l L. : Chicago Journal of International Law

CIAC : Commission interaméricaine d'arbitrage commercial

CIDIP : Conférences spécialisées interaméricaine de droit international privé

CIRDI : Centre international pour le règlement des différends relatifs aux investissements

CJCE : Cour de justice des Communautés européennes

CJI : Comité juridique interaméricain

CNY : Convention pour la reconnaissance et l’exécution des sentences arbitrales étrangères, conclue à New York le 10 juin 1958

Columbia J. Transn'l L. : Columbia Journal of Transnational Law

CONC. : Concordances

CVIM : Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises, conclue à Vienne le 11 avril 1980

DIPr : Droit international privé

Dir. comm. int. : Diritto del commercio internacionale

Dir. int. : Diritto internazionale

Disp. Res. J. : Dispute Resolution Journal.

DPCI : Droit et pratique du commerce international

DRB : Dispute Review Board

Fla. J. Int'l L. : Florida Journal of International Law

FMI : Fonds monétaire international

German Yearb. Int'l. L. : German Yearbook of International Law

Harv. Int'l L.J. : Harvard International Law Journal

Harv. L. Rev. : Harvard Law Review

Hous. J. Int'l L. : Houston Journal of International Law

IBC : Initiative du bassin des Caraïbes

ICSID Rev. : ICSID Review—Foreign Investment Law Journal

ILM : International Legal Materials

Int'l Arb. L. Rev. : International Arbitration Law Review

Int'l Bus. Law. : International Business Lawyer

Int'l Comp. L.Q. : International & Comparative Law Quarterly

Int'l. Law. : The International Lawyer

J. Int'l Arb. : Journal of International Arbitration

JO : Journal officiel

Journ. dr. int. : Journal du droit international

La Ley : Revista Jurídica Española, La Ley

MARC : Méthodes alternatives de règlement des conflits

Mercosur : Marché commun du Sud

Mich. J. Int'l L. : Michigan Journal of International Law

Minn. L. Rev. : Minnesota Law Review

NCPC : Nouveau Code de Procédure Civile

NU : Nations Unies

OEA : Organisation des États américains

OECO / OECS : Organisation des États de la Caraïbe orientale

OHADAC : Organisation pour l’Harmonisation du droit des affaires dans la Caraïbe

OMC : Organisation mondiale du commerce

RabelsZ : Rabels Zeitschrift für ausländisches und internationales Privatrecht

RDEA : Revista de Derecho Español y Americano

RDM : Revista de Derecho Mercantil

Recueil des Cours : Recueil des Cours de l’Académie de droit international de La Haye

REDI : Revista Española de Derecho Internacional

Rev. arb. : Revue de l’arbitrage

Rev. belge dr. int. : Revue belge de droit international

Rev. crit. dr. int. pr. : Revue critique de droit international privé

Rev. dr. aff. int. : Revue de droit des affaires internationales

Rev. dr. int. dr. comp. : Revue de droit international et de droit comparé

Rev. dr. unif./Unif. L. Rev. : Revue de droit uniforme/Uniform Law Review

Rev. int. dr. comp. : Revue internationale de droit comparé

Rev. urug. DIPr : Revista uruguaya de Derecho internacional privado

Revista mex. DIPr : Revista mexicana de Derecho internacional privado

RIE : Revista de Instituciones Europeas

Riv. dir. civ. : Rivista di diritto civile

Riv. dir. int. pr. proc. : Rivista di diritto internazionale privato e processuale

Riv. dir. proc. : Rivista di diritto processuale

Riv. trim. dr. proc. civ. : Rivista trimestrale di diritto e procedura civile

S : Sentencia

St. Mary L.J. : Saint Mary’s Law Journal

Stan. L. Rev. : Stanford Law Review

Tex.Int'l.L.J. : Texas International Law Journal

Travaux Com. fr. dr. int. pr. : Travaux du Comité français de droit international privé

Tul. J. Int'l & Comp. L. : Tulane Journal of International and Comparative Law

Tul. L. Rev. : Tulane Law Review

UE : Union européenne

UIBA : Unión Iberoamericana de Colegios y Agrupaciones de Abogados

Uncitral / CNUDCI : Commission des Nations Unies pour le droit commercial international

UNIDROIT : Institut International pour l'unification du droit privé

Va. J. Int'l L. : Virginia Journal of International Law

Vand. J. Transnat'l L. : Vanderbilt Journal of Transnational Law

Yearbook Comm. Arb'n : Yearbook of Commercial Arbitration

PRÉSENTATION DE LA LOI TYPE

I. Intégration économique et coopération juridique dans la zone OHADAC

1. L'unification juridique comme instrument d'intégration économique

A) Cadre général

1. L'élimination des frontières économiques entre au moins deux économies est un phénomène de notre temps qui conduit à divers modes d'intégration. L'intégration est entendue comme un processus économique et social destiné à faciliter les relations entre les entreprises, les institutions et les États d'un ou plusieurs pays. La décision d'intégrer un bloc économique régional est, sans doute, révélatrice du degré de compétitivité d'une nation ou d'un territoire présentant un certain niveau d'autonomie et par la même de sa capacité à converger, en termes de connaissances, avec des pays présentant un niveau de développement supérieur au sien. Tout processus d'intégration économique est fondé sur le développement des échanges commerciaux à l'échelle internationale et vise à obtenir une série d'avantages. Il s'agit, quelle que soit l'étape du processus, de fournir aux entités qui l'intègrent des bénéfices mutuels et des avantages supérieurs à ceux auxquels elles pourraient prétendre si elles agissaient seules face à des pays tiers ou des groupes de pays. Ces bénéfices et ces avantages sont applicables non seulement aux processus d'intégration économique, mais également aux processus d'intégration politique, social ou juridique voire à toute initiative dont l'objectif vise un niveau plus élevé de cohésion.

L'interdépendance économique et la globalisation de l'économie ont conduit la majorité des gouvernements à mettre en place des programmes de libéralisation progressive de l'économie et à accélérer les processus de création de zones de libre-échange. Ce phénomène est concomitant à l'abandon progressif d'une position traditionnellement réticente et méfiante vis-à-vis du commerce international et dans lequel les multinationales jouent un rôle important. À côté de ce phénomène, des débats ont été ouverts ces derniers temps afin d'établir une carte géographique représentant les processus d'intégration dans la région. Ces débats sont menés, non sans difficulté, en vue de dépasser les réticences quant à une approche plus pragmatique du rôle des États dans le commerce international – des réticences nées de l'incompréhensible notion de souveraineté –. Pour renforcer l'efficacité des accords régionaux, il convient non seulement de s'acheminer vers des politiques macroéconomiques communes, mais également d'envisager un processus d'harmonisation juridique substantiel.

2. L'objectif d'implantation de la libéralisation impose la distinction de deux situations qui ne sont pas obligatoirement complémentaires : d'une part l'intégration économique et d'autre part l'intégration commerciale.

  1. L'intégration économique, d'une façon générale, est conçue pour faire disparaitre les droits de douane entre les pays qui composent une région ou une sous-région, en vue de favoriser les échanges de biens. En outre, dans le meilleur des cas et sans toutefois tomber dans le protectionnisme sous-régional (« régionalisme ouvert »1), un tarif douanier peut être fixé afin de permettre au groupement d'États d'agir comme un bloc commercial spécifique, sans toutefois exister et être reconnu internationalement comme une nouvelle entité dotée d'une personnalité juridique propre. Une telle intégration entre États, en tant que processus d'élimination réciproque des barrières économiques, n'est pas un phénomène unique. La décision prise par un État d'intégrer un tel processus est fondée sur des considérations qui ne sont pas seulement économiques mais également sociales, politiques ou stratégiques. Dans ce contexte, les accords tarifaires préférentiels au niveau régional ou hémisphérique prennent tout leur sens face à l'avancée des projets de libre-échange à grande échelle en vue de stimuler les exportations et d'attirer les investissements et les technologies2.
  2. L'intégration commerciale3 se fonde sur le renforcement du commerce entre les États intégrés, du fait de l'augmentation de la taille du marché. Elle correspond à une interpénétration économique, émanant d'une négociation ou d'accords entre des entreprises ou des États-nations, par le biais de quelques modifications structurelles. Mais cela n'a toutefois pas d'incidence globale puisque l'objectif principal visé par ces États est de conserver un degré élevé de protection de leur souveraineté nationale. À noter que des secteurs d'activité sensibles comme l'automobile, l'équipement, la pétrochimie, le papier, la sidérurgie et le textile se voient reconnaitre un traitement particulier en matière commerciale. Les effets positifs de l'intégration commerciale, l'accroissement de la concurrence et la stimulation provoquée par les investissements ainsi que le progrès technique sont en lien avec une plus grande spécialisation productive et avec l'augmentation de la compétitivité. Cela présente à la fois un avantage pour la production et pour la consommation : la libéralisation permet de mettre à disposition du consommateur une plus grande quantité et diversité de biens à des prix très compétitifs4.

3. Mais l'intégration n'est pas un phénomène exclusivement économique, commercial ou social, elle comporte d'autres facettes du devenir des opérateurs impliqués. En premier lieu, elle implique une volonté de préserver la paix à travers la coopération et la sécurité collective au-delà des frontières nationales, d'instaurer un État de droit et d'ouvrir le développement vers l'extérieur. En second lieu, elle oblige à prendre certaines initiatives dans la conception des institutions de droit privé que cela induit.

Traditionnellement, le développement de politiques de coopération des États en matière civile et commerciale constitue une réponse à une fragilité et se fonde sur la bonne entente, la bonne volonté des États et toujours sur le principe de réciprocité. Cependant, la suite logique du processus d'intégration a conduit à ne plus considérer la coopération comme une fin en soi mais, dans la majorité des cas, comme une condition vu que les litiges transfrontaliers ou ayant un élément d'extranéité sont de plus en plus fréquents et nombreux. Le processus qui conduit, entre autres, à l'harmonisation des normes et des législations, n'implique pas prima facie la création de règles communes pour un bloc régional, car cela risquerait d'entraîner inutilement une opposition entre les règles et de conduire, en dehors de ce contexte, à une rivalité entre les règles nationales en vigueur. Au contraire, l'harmonisation des règles juridiques relatives au commerce et à l'échange des biens et services (v.gr., règles relatives à la protection de la libre concurrence5 et de sanction de la concurrence déloyale, de la protection du consommateur ou de la propriété intellectuelle) ont ou doivent avoir comme objectif principal la suppression des distorsions entre les droits internes des États, surtout lorsque ces distorsions bénéficient de façon asymétrique aux opérateurs d'un État membre au détriment des autres6.

Dans ce contexte et bien que sa place ait été considérée comme secondaire7, le DIPr joue un rôle important de régulation juridique et s'avère indispensable à l'harmonisation des législations des États faisant partie d'un processus d'intégration. Le bon fonctionnement de tout marché intégré, dont le point de départ est la diversité des législations, repose sur les apports d'un DIPr uniforme et bien délimité matériellement. Uniforme, car les règles du jeu doivent être communes à tous les participants, et matériellement bien délimité afin d'assurer le bon fonctionnement de ce « marché de produits normatifs »8.

D'où l'affirmation que le développement de ces politiques est devenu le moyen d'atteindre le droit à la justice des citoyens au sein de l'espace supranational intégré9. D'où l'idée également que la sphère régionale permet une meilleure intégration fondée sur la démocratisation économique globale par la compatibilité des devises, par le libre-échange, par l'établissement de règles communes et, surtout, par la volonté commune de fixer les règles du jeu dans le respect des intérêts de l'ensemble de la région. Elle permet, également, une convergence d'intérêts et, souvent, de valeurs plus générales dans d'autres domaines comme l'investissement, la concurrence, le droit du travail ou les règles environnementales.

4. En Amérique Latine les concepts d' « intégration », de « coopération » et de « concertation » sont habituellement employés de façon interchangeable, alors qu'ils ne signifient pas la même chose. L'intégration, que nous venons d'évoquer, est un processus intense et profond qui nait et se consolide sur le plan économique, mais qui se diffuse largement entre les États dans d'autres domaines (v.gr., MERCOSUR). La coopération suppose que les parties adaptent leurs comportements et les privilégient par rapport à d'autres. Elle résulte d'une interaction fondée sur des principes et est encouragée par des objectifs. Enfin, la concertation est un mécanisme au travers duquel les gouvernements agissent ensemble dans le cadre de leur souveraineté, généralement au niveau diplomatique et à des fins surtout politiques, face à d'autres opérateurs individuels ou collectifs (v.gr., UNASUR).

Les relations commerciales dans la région de la Caraïbe dépendent fortement des possibilités offertes par les processus décrits ci-dessus, et plus particulièrement par le premier. Il suffit d'observer les résultats qu'ont produit à ce jour les principaux processus d'intégration de la région ou ceux auxquels des États de la zone de la Caraïbe participent, comme le Marché Commun Centraméricain (MCCA), l'Association des États de la Caraïbe (AEC), la Communauté des Caraïbes (CARICOM) et l'Alliance Bolivarienne pour les Peuples de notre Amérique (ALBA), pour constater un accroissement important des relations commerciales dans la zone et le renforcement d'importants secteurs économiques. Ces expériences ont conduit, en tant que dénominateur commun et à titre principal, à une libéralisation du commerce des biens et services, à une protection plus grande des flux d'investissement étranger et à une transparence accrue des règles nationales, par exemple, en matière de marché public. Toutefois des domaines, comme la liberté de circulation et de déplacement des personnes, sont restés hors du champ de l'intégration alors qu'ils sont essentiels à tout processus d'intégration évolué.

5. Bien que le terme « intégration », tel qu'il est employé, renferme un contenu principalement économique, il n'en demeure pas moins que tout mouvement visant une unité entre différents pays constitue un processus économique et commercial mais induit également des conséquences considérables10 sur le plan politique11, juridique et social. En d'autres termes, toute action d'intégration mais également de constitution d'un marché commun plus ou moins complet sous-tend une multitude de considérations extra-économiques. L'une d'elles consiste à exiger que les États membres et leurs gouvernements s'engagent dans un régime politique respectueux des libertés – politiques, économiques et sociales – doté d'institutions publiques solides et, absolument, indépendantes. Une autre des considérations consiste à procéder à une unification ou, au moins, à une harmonisation du droit privé voire du DIPr, comme cela s'est passé dans l'Union européenne12. La mise en place difficile de l'établissement d'une intégration régionale progressive, avec toute la précision juridique requise, reflète une réalité complexe. Celle-ci doit être étudiée au cas par cas et dans une perspective multidisciplinaire13. Nous observons que ces processus ne se produisent pas toujours dans un cadre intégrationniste de caractère communautaire mais qu'ils consistent davantage à mettre en place une coopération de type intergouvernemental. La théorie générale des Organisations internationales indique que nous sommes dans la majorité des cas face à des institutions de simple coopération et non d'intégration.

Évidemment, chaque moment et chaque étape de l'intégration requièrent des processus de transfert de compétences très divers de la part des États membres de l'Organisation. Alors que dans les zones de libre-échange la libéralisation des échanges commerciaux peut se faire sans nécessiter un réel transfert de compétences de la souveraineté des États à des institutions communes, les unions douanières consistent à céder des compétences des États membres au profit de la nouvelle organisation et, dans ce cas, une stratégie commune vis-à-vis des tiers et une structure institutionnelle spécifique sont mises en place. Dès lors que le modèle adopte la forme d'un marché commun ce transfert de compétences, tout comme la création d'une structure institutionnelle, prend substantiellement de l'ampleur et se voit complété par l'adoption d'une politique commerciale commune.

D'un point de vue juridique, l'intégration met en action une série de mécanismes de droit public (accords, traités, codes et règlements…) ayant pour finalité de faciliter le bon fonctionnement des institutions en charge de veiller sur le processus. Mais à partir de ces mécanismes de base se développe un corpus normatif qui vise directement les États concernés et, en premier, leurs opérateurs économiques puis sociaux selon l'état d'avancement de l'intégration. En dernier lieu, les destinataires finaux du processus d'intégration sont les personnes physiques et morales, qui sont visées sur le plan économique ou patrimonial ainsi que sur le plan personnel et familial. L'intégration consiste en une intercommunication multiple et présente une complexité positive. Elle requiert de changer le cadre juridique interne et de prendre conscience de la disparité qui existe entre les lois nationales. Si ces lois nationales continuent d'être nécessaires sur le plan domestique et identitaire, elles peuvent toutefois être défaillantes face à l'accroissement des situations internationales que toute intégration implique.

6. Cette analyse fait généralement partie de la rubrique connue sous l'intitulé « Droit de l'intégration » et requiert la mise en place d'une trame institutionnelle complexe qui varie selon les objectifs poursuivis et le stade de leur exécution. Cela donne lieu à des notions comme la « supranationalité », l'« acquis communautaire », l'« institutionnalisme régional » dont le maniement est inévitable dès lors que l'on approche cette matière.

Mais une telle trame juridique ne s'avère pas toujours nécessaire pour approfondir certaines formes d'intégration très basiques. L'harmonisation et l'unification législative peuvent remplir, dans ce sens, un rôle important. Si elles assurent aux opérateurs juridiques un haut niveau de sécurité juridique et permettent une prévisibilité en droit, l'harmonisation et l'unification s'avèrent constituer la meilleure garantie pour préserver les relations juridiques dans des espaces supranationaux. L'uniformité des relations de droit privé de caractère transfrontalier consiste à offrir aux parties contractantes une plus grande sécurité juridique et pour y parvenir, il faut que les règles applicables aient été élaborées selon des critères objectifs et équitables. L'unification et la création du droit sur le plan transnational n'est rien d'autre que l'expression d'une réalité à un moment donné dans le cadre des échanges internationaux de caractère privé14.

En effet, l'ouverture et l'intégration des marchés mondiaux et/ou régionaux sont formatées pour apporter les réponses évidentes à l'actualité économique et pour fournir des mécanismes ou des instruments structurellement ou conjoncturellement adaptés en vue d'ajuster la demande à une offre croissante et diversifiée de biens et de services. Dans une économie ouverte aux lois et aux règles d'un marché fondé sur la libre concurrence entre les produits et les services, qu'ils soient nationaux ou étrangers, la demande, tout comme l'offre, s'ajuste au marché élargi. En outre, elle offre de meilleures conditions de compétitivité à la production, industrielle et commerciale, et aux services. Une telle ouverture suppose d'éliminer ou de réduire les obstacles, qu'ils soient ou non douaniers, à la libre circulation des biens et des services sur le marché élargi. De même, elle suppose l'ouverture à la libre circulation des personnes et des capitaux dans un même espace géopolitique et socio-économique. La liberté de circulation, dont la variabilité dépend de l'amplitude et de la profondeur de l'ouverture et de l'intégration, touche des sujets, personnes physiques ou morales, qui offrent (entreprises) et qui demandent (consommateurs) ces biens et ces services, potentiellement situés dans des pays différents. C'est une liberté sans laquelle l'intégration est inconcevable, mais qui entraine de multiples avantages tout en générant d'éventuels conflits. Des conflits identiques à ceux auxquels se confrontent les personnes dans un contexte strictement national, mais qui présentent une complexité supplémentaire du fait qu'ils surgissent dans un cadre international. Par exemple, il s'agit du contrat conclu entre des parties domiciliées dans différents pays, d'une société constituée dans un État et qui souhaite transférer son siège social dans un autre pays, d'un travailleur qui bénéficie de meilleures opportunités de travail hors de son pays et qui migre avec toute sa famille pour s'installer dans un pays étranger, etc. Toutes ces situations conduisent éventuellement à des problèmes juridiques et leur résolution passe par les règles de DIPr afin de déterminer à qui appartient la compétence juridictionnelle ou quelle est la loi applicable ou encore afin de déterminer dans quelle situation une décision rendue dans un État peut produire des effets dans un autre. Les réponses à ces questions se trouvent encore aujourd'hui dans chaque ordonnancement juridique des États et, par conséquent, elles dépendent des particularités et des différences de chacun, ce qui ajoute une entrave supplémentaire à l'intégration. Actuellement le DIPr, plutôt que de rechercher les règles nécessaires pour faire respecter la loi étrangère par les tribunaux nationaux, recherche davantage à unifier les critères juridiques et les législations applicables dans certaines régions du monde, comme dans la zone de la Caraïbe. Au cours des dernières décennies, à défaut de disposer d'un système susceptible de recueillir l'assentiment général, un mouvement important s'est créé pour aller vers l'harmonisation des normes de DIPr entre les États. Derrière cette unification, il s'agit de faciliter les transactions internationales, d'assurer le respect des droits acquis des personnes et d'éliminer la pratique du forum shopping.

7. Pour que les entreprises relevant d'États dotés de systèmes politiques semblables qui, à leur tour reconnaissent des systèmes d'organisation économique semblables, puissent échanger entre elles, il faut qu'elles puissent compter sur des règles homogènes dans un bon nombre de cas. Les relations juridiques qui émergent de ce type d'échanges nécessitent un ordonnancement juridique qui dépasse le cadre national. Face à des relations juridiques particulières établies dans un contexte international, dont les intérêts et les exigences diffèrent, il faut un dispositif normatif compatible qui soit, si possible, le plus homogène possible entre tous les États membres de l'intégration. Il est certain qu'un processus d'unification substantielle ou matérielle pourrait régler ces problèmes. Toutefois, d'un côté, l'histoire démontre que les thèmes concernés par une telle unification sont peu nombreux (l'exemple de la vente internationale de marchandise est sans pareil), ce qui conduirait à laisser en marge de cette unification de grandes zones juridiques. D'un autre côté, l'unification substantielle réalisée au travers de conventions internationales ad hoc ajoute une partialité sectorielle car tous les États n'adhèrent pas à de tels instrument de codification internationale, ni ne l'accueillent en même temps, ni même ne l'appliquent de la même manière.

Un système juridique, et encore moins un système sensible à la réglementation sur les transactions internationales privées, ne peut pas se voir limité par des dispositions normatives émanant exclusivement du législateur interne. En effet, celles-ci sont inadéquates et déconnectées de la réalité juridique et ce même dans le contexte d'une intégration économique très basique. Il est nécessaire, au contraire, de s'adapter à la réalité de la communauté internationale car pour assurer les échanges internationaux, il n'est pas suffisant d'éliminer les barrières juridiques d'origine publique. Si le législateur veut garantir des échanges internationaux fluides, il doit éliminer tant les obstacles juridiques d'origine publique que ceux d'origine privée, à savoir ceux qui découlent du fractionnement juridique des législations des États15.

En d'autres termes, le développement normatif national ou la codification interne doit se développer de manière parallèle et coordonnée avec la codification internationale. Et de la même manière, la codification internationale doit admettre qu'elle ne peut pas non plus évoluer en marge de l'unification juridique. Tout cela offre sans aucun doute une note de rigidité dont la codification interne est dépourvue16. Précisément afin d'éviter cette rigidité, la présente loi type OHADAC de DIPr a été élaborée en prenant tout particulièrement en compte les caractéristiques spécifiques de l'intégration économique caribéenne.

8. Une telle initiative d'unification de DIPr est en harmonie parfaite avec une intégration régionale dans cette zone géographique. Elle peut constituer un instrument utile pour pallier les inconvénients dus à un cadre légal interne inadéquat qui freine les transactions commerciales internationales. Mais elle va également dans le sens de ceux qui refusent une codification imposée « d'en haut » conduisant à la perte d'identité culturelle des peuples, à l'élimination de la concurrence entre les ordonnancements juridiques, et en outre, à la génération de coûts plus élevés que d'éventuels bénéfices17. Les États n'ont pas à adhérer en bloc à la loi type, mais peuvent adapter de façon partielle et progressive leurs dispositions spécifiques afin d'éviter tout changement traumatisant. À l'heure actuelle, un tel comportement serait irréfléchi. Aussi, avec plus de réalisme et de prudence, la loi type n'exclut pas qu'une certaine diversité normative soit maintenue afin de préserver, pendant le temps nécessaire, l'identité des ordres juridiques nationaux concernés.

En outre, en tant que « loi type », la présente initiative ne constitue rien de plus qu'une « proposition » législative qui pourra à son tour être accueillie dans un État de façon parcellaire ou, si besoin, au même titre que d'autres instruments juridiques en vigueur dans cet État. Toutefois, sans écarter cette option, une telle parcellisation n'est guère recommandée car elle ferait courir le risque de placer le DIPr sous la tutelle du droit interne (droit privé matériel) et de donner lieu à des interprétations divergentes qui compromettraient la cohérence même de l'ensemble normatif en question18. La technique de soft law pourrait également conduire à une réception partielle du modèle, mais cela ne consisterait qu'à s'arrêter au milieu du processus, qui s'avère pourtant nécessaire et décisif. La présente initiative unificatrice vise donc à offrir un système intégral de règles de DIPr qui s'adapteront de façon spécifique aux besoins de la pratique générée par les transactions privées internationales et un tel système aspire à être réceptionné dans son intégralité par les États membres de l'OHADAC. Cette loi type, considérée en tant que telle, peut servir de référence aux juges et aux arbitres, être interprétée ou complétée par d'autres instruments régissant les relations de droit privé international, ou elle peut aussi être un modèle pour les législateurs nationaux, ce qui est toutefois son objectif principal.

B) Intégration en Amérique latine

9. L'intégration des économies d'Amérique latine et de la Caraïbe constitue une aspiration qui a commencé à se manifester dans les années cinquante du siècle dernier et qui a été mise en pratique dans les années soixante. Le postulat de base est le suivant : l'intégration est un mode de résolution des problèmes économiques servant à renforcer un pouvoir unique de négociation dans le cadre du commerce international caractérisé par l'existence de pays plus développés que d'autres19. Cependant, les mécanismes d'intégration créés à cette époque (le Système Économique pour l'Amérique Latine, la première Association Latino-Américaine de Libre-Échange, le Marché Commun Centraméricain, le Groupe andin et le Marché commun des Caraïbes…) n'ont pas apporté, en pratique, des avancées et des actions significatives dans le secteur concerné. Cela s'explique par le fait que, dès le départ, l'intégration n'a jamais été conçue comme un projet politique c'est-à-dire comme une réalité pleinement insérée dans les politiques nationales de développement de chaque pays.

Le processus d'intégration dans le sud de l'hémisphère américain a apporté au régionalisme trois résultats différents. En premier lieu, la diversité des formes d'institutionnalisation structurée en organes différents, en second lieu, la collaboration des pays à des expériences de type bilatéral ou partiellement multilatéral, ce qui se manifeste par un considérable nombre de traités multilatéraux et bilatéraux sur le libre-échange, et enfin, la compatibilité des expériences de multilatéralisme menées sous la forme de « régionalisme ouvert »20. Cette description contraste avec un fait également indéniable : en Amérique latine les confusions et les ambiguïtés quant à la question de l'intégration régionale et au commerce transfrontalier sont fréquentes. Il existe encore une grande distance entre ce qui se dit et ce qui se fait réellement. Les gouvernements expriment leur fort intérêt pour renforcer les relations entre pays mais leurs pratiques commerciales vont dans le sens contraire21.

Jusqu'au milieu des années quatre-vingt du siècle dernier, il existait une différence très nette entre l'espace économique formé, d'une part, par les pays d'Amérique latine et de la Caraïbe et, d'autre part, par les pays développés du continent (USA et Canada). Le postulat de départ était ici que l'intégration était un processus destiné à accompagner les économies en développement de la région afin de renforcer leur avancée et leur présence sur les marchés internationaux. De cette façon, les pays développés de cette région sont intervenus sur ces marchés à travers des mécanismes multilatéraux et non pas par le biais d'accords préférentiels. La création de l'Accord de libre-échange nord-américain (ALÉNA), qui date de la même époque que l'OMC, a modifié ce panorama en répondant aux défis que posaient la globalisation croissante et aux difficultés que les économies nationales en développement avaient pour s'insérer sur la scène internationale économique. Puis, l'essor de l'intégration régionale en Amérique latine et dans la Caraïbe s'est produit dans le cadre d'un mouvement né à l'échelle mondiale.

Ces processus s'insèrent dans la rubrique « nouveau régionalisme », et se présentent sous diverses formes alternant des projets dans le domaine des macro-régions de type classique, avec des expériences inédites au niveau sous-régional, y compris entre des zones spécifiques de deux ou plusieurs pays. Ces projets sont, dans la majorité des cas, des projets intergouvernementaux ayant des objectifs essentiellement économiques. Ils ont donné lieu à d'intenses débats quant aux différents modèles d'intégration en présence et, en ce sens, ils ont contribué à mieux appréhender la versatilité du phénomène d'intégration22.

10. Face aux attentes des années quatre-vingt, les développements actuels illustrent bien clairement que les essais d'intégration ont conduit à des crises persistantes et ont été marqués par des impasses. Il s'est alors agi de trouver de nouvelles issues qui, sans mettre de côté la totalité des processus traditionnels, pouvaient apporter des solutions plus immédiates et réalistes visant une intégration plus intense dans un monde globalisé. Un diagnostic synthétique met en évidence, d'un côté, une volonté politique réelle plutôt contenue de la part de nombre de gouvernements, qui n'hésitent pas à faire des déclarations positives grandiloquentes dans des forums internationaux sur des programmes qu'ils ne mettront pas en œuvre. D'un autre côté, il apparait une absence évidente de continuité dans les propositions intégrationnistes. Cela est dû dans la majorité des cas à l'instabilité politique et à la succession de gouvernements qui avancent des programmes présentant des choix différents de ceux de leurs prédécesseurs.

De ce fait, nombre de processus engagés n'ont pas pu atteindre les objectifs minimums fixés dans les textes originaires. Cela a conduit à essayer de nouveaux modèles ce qui, dans la majorité des cas, a réduit tous ces efforts à la seule création d'une « zone de commerce ». Le seul établissement de zones de libre-échange ou de structures très basiques d'unions douanières n'est pas l'instrument approprié à une véritable intégration. Il doit être accompagné d'actions de politique extérieure commune coordonnées et de la mise en œuvre de processus productifs au sein de la région concernée. Il s'agit davantage, dans ces cas, de simples processus de forme que de véritables instruments orientés vers une réelle intégration. Il ne suffit pas de partager des objectifs communs en matière d'intégration pour que le projet parvienne à ses fins. Il est nécessaire de mettre en place un minimum de coordination politique pour obtenir des répercussions sur les secteurs industriels, sur la politique extérieure, sur la politique migratoire, sur le traitement de la dette externe ou, même, en cas d'intégration avancée, sur le cadre d'une défense commune. Il en résulte que les modèles d'intégration, essentiellement basés sur une politique de protection douanière inadaptée, n'ont pas du tout permis de résoudre les questions ponctuelles comme, par exemple, les problèmes posés par la baisse du prix des matières premières, la pauvreté et le chômage. La création et la mise en pratique de mécanismes transparents de participation citoyenne dans les processus d'intégration, associés à des initiatives d'unification législative tant de nature matérielle que de DIPr, sont le seul moyen d'obtenir de véritables résultats à l'intégration caribéenne et d'en faire bénéficier les populations locales. Voyons cette question plus attentivement.

C) Spécificités de l'intégration caribéenne

11. En marge de l'alternative fondamentale entre intégration régionale ou intégration continentale, avec des tendances clairement favorables pour la première23, la zone de la Caraïbe est confrontée à de grands défis pour son développement économique et social face au phénomène de la globalisation. Dans ce nouvel ordre économique global, une partie significative du potentiel de concurrence de chaque État caribéen dépend de son intégration aux autres pays de la zone. Cette zone se trouve actuellement dans plusieurs processus de négociation de libre-échange, revêtant diverses formes mais qui sont simultanés. Peut-être le problème majeur auquel est confrontée la région face à ces initiatives porte sur le manque de ressources humaines et financières l'empêchant de mener des négociations efficaces, dans la défense de ses intérêts économiques et commerciaux. Le principal intérêt de la Caraïbe est de parvenir à la reconnaissance d'un traitement différencié dans ses politiques commerciales, prenant en compte sa fragilité en matière de production et sa dépendance aux traitements commerciaux préférentiels sur les marchés de l'Union européenne, des États-Unis et du Canada.

L'intégration caribéenne apparait, donc, comme une alternative de développement indépendante qui transcende le strict cadre économique et commercial. Son objectif ultime est la mise en œuvre de politiques visant à améliorer le développement économique et le bien-être social. Dans le projet d'harmonisation engagé, l'OHADAC constitue une excellente opportunité pour développer les économies caribéennes dans le contexte de la globalisation de l'économie. Il suffit de prendre en compte ses objectifs prioritaires : faire face à l'insécurité juridique et judiciaire dans les États de la zone afin de garantir une sécurité aux investisseurs et de faciliter les échanges entre les États membres.

Le projet apporte des instruments utiles aux pays de cette zone géographique pour qu'ils intensifient le commerce intra-caribéen, qui oscille entre 12 et 20 % du commerce total. Ce projet est conçu comme une courroie de transmission entre le développement de grandes économies d'échelle et les processus de réforme juridique dans la zone d'intégration de la Caraïbe. Pour établir des relations commerciales avec les autres pays, il est nécessaire de financer des actions et des stratégies qui stimulent le développement économique des pays de la région en partant des chances et des forces qu'offrent ces économies. Ils constituent des mécanismes devant servir à dépasser de façon péremptoire les approches défavorables, caractéristiques de cette zone géographique, face à la coopération internationale. Dans ce contexte, la prise en compte des règles de DIPr pour les pays et les territoires qui intègrent cette institution offre un intérêt particulier. Il a été conseillé de développer une action spéciale, ce qui a amené à présenter la présente loi type.

En effet, les phénomènes complémentaires de globalisation et d'intégration ont bouleversé sérieusement l'image du DIPr traditionnel basée sur des idées de partage, de position, de territoire et de souveraineté des États. Dans l'économie de marché globalisée, que veulent intégrer les États de la zone de la Caraïbe, les relations avec le reste du monde sont beaucoup plus qu'un simple fait diplomatique. Elle est caractérisée par la suppression des barrières nationales pour la libre circulation des marchandises, des services et des capitaux. Ce sont des actions qui s'avèrent de plus en plus urgentes à tous les niveaux économiques et sociaux pour la circulation de la richesse entre les États. C'est la raison pour laquelle les pays de la Caraïbe doivent rechercher la manière de régir toutes ou, tout du moins, la majorité des situations impliquant plusieurs États. Cette tâche doit être menée à travers un système complet et efficace de règles qui permette de trouver la norme substantielle pour régir une situation de droit privée déterminée ainsi que l'organe juridictionnel chargé de trancher les litiges susceptibles d'en découler.

12. Les instruments de l'intégration ne sont pas exclusivement économiques (v.gr., tarif douanier commun, normes d'origine, mesures de protection commerciale…). Les organismes qui participent à un processus de ce type sont prédestinés à s'internationaliser sur la base de paramètres spécifiques, en même temps qu'ils conservent leur souveraineté ou leur rattachement national et leur nationalité24. Concrètement, dans le contexte de la coopération juridique et judiciaire, cette tendance se matérialise par la négociation, l'élaboration d'instruments juridiques et par une augmentation progressive du nombre de ces instruments et des agents qui interviennent dans les stratégies de coopération. L'objectif final de la coopération judiciaire civile et commerciale vise la mise en place d'une collaboration très étroite entre les autorités des États afin d'éliminer tout obstacle dû à l'incompatibilité des différents systèmes judiciaires et administratifs (reconnaissance mutuelle et exécution des décisions, accès à la justice et harmonisation des législations nationales). Afin de relever les différents défis posés en matière juridique et judiciaire, l'un des instruments, susceptible d'être développé avec succès dans la zone OHADAC, concerne l'assistance que les gouvernements peuvent mutuellement se prêter. Elle pourrait prendre la forme de nouveaux mécanismes légaux adaptés à l'objectif de coopération poursuivi. Il s'agit de construire un véritable espace caribéen de justice dans lequel tant les particuliers que les entreprises pourront librement et pleinement exercer leurs droits. Comme cela a déjà été indiqué précédemment, le point de départ de la diversité des États et le respect possible et nécessaire de certaines particularités nationales font que la stratégie du DIPr est l'une des plus efficaces, car elle rend compatible la diversité avec des solutions prévisibles et uniformes. D'une certaine manière, à côté des règles qui résolvent les questions de droit applicable, les règles de coopération judiciaire internationale (compétence judiciaire internationale, assistance judicaire internationale, reconnaissance et exécution des décisions de justice) sont appelées à faire partie de ce droit procédural spécial dans un champ large de situations internationales.

Toute initiative en vue d'une intégration requiert de conjuguer les efforts normatifs et institutionnels afin de simplifier et de préciser clairement les procédures de coopération. D'où l'intérêt d'unifier les législations et de réduire le nombre d'opérateurs qui agissent dans le cadre de la coopération, pour ainsi mettre en place des procédures plus simples et efficaces. Conformément aux expériences et aux besoins manifestés par les pays, ces actions peuvent être renforcées et élargies à d'autres domaines juridiques et judiciaires. L'une des activités liées à la coopération juridique et judiciaire qu'il serait bénéfique de développer porte sur les moyens à engager pour un dialogue plus fluide entre les autorités juridiques et judicaires, pour un partage d'expériences et pour des activités de coopération horizontale permettant de parfaire le régime et le fonctionnement des institutions démocratiques. Les pays de la zone OHADAC peuvent mettre en place des mécanismes de coopération pour le développement législatif d'instruments juridiques internes.

Au fur et à mesure de l'avancement des négociations pour consolider le libre-échange dans cette zone, il apparaitra de plus en plus nécessaire que les pays harmonisent et intègrent leur droit interne dans les domaines où le dialogue et les négociations laissent se profiler un consensus. La révision et l'harmonisation des législations nationales avec les accords internationaux conclus ou leur seule prise d'effet constitue une tâche difficile en elle-même. Elle s'avère particulièrement complexe dans les pays qui ont un degré de développement économique et démocratique moindre. Cela rend l'assistance particulièrement nécessaire. Elle peut prendre la forme d'outils de droit comparé et d'études sur les lois, les règlements et les pratiques administratives ayant le plus de succès. Ces travaux pourront être programmés selon un agenda fixé pour les pays de la zone concernée et porter sur les divers thèmes liés à l'administration de la justice. Dans ce domaine, le DIPr joue un rôle essentiel.

D) Manifestations de l'intégration caribéenne

13. L'ouverture commerciale de la Caraïbe a considérablement renforcé les nombreux liens existant à tous les niveaux qu'ils soient multilatéraux, régionaux et bilatéraux et a été confortée par la signature d'accords commerciaux entre les pays de la zone25. De même, des organisations d'intégration ont pu émerger. Le renforcement des relations a mis en évidence les obstacles sérieux au processus d'intégration (v.gr., conditions dans le pays d'origine et facilités pour la circulation des marchandises et du transports en autres) et leur dépassement apporterait des opportunités supplémentaires de croissance aux entreprises régionales.

Dans tous les cas, la multiplication des organisations internationales autour de la Caraïbe peut constituer soit un avantage soit un inconvénient. Certains pays font partie de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) ou du Forum Caribéen des États ACP (CARIFORUM)26, de l'Association des États de la Caraïbe (AEC), de l'Organisation des États de la Caraïbe orientale (OECO/OCDS)27, du Groupe de Río ou de la Communauté d'États latino-américains et caribéens (CALC)28, et ces organismes ont pour objectif l'intégration économique, même de façon partielle. Plusieurs pays appartiennent à des organisations régionales qui dépassent les frontières de la Caraïbe, mais pouvant tendre vers des objectifs similaires sur le plan de l'harmonisation juridique ou de l'intégration économique comme : ALADI, ALBA, OEA, Commonwealth... Cette pluralité d'organisations internationales est similaire à celle qui touche les États de l'OHADA sur le continent africain29, et cela n'a pas empêché cette organisation spécifique de mettre en œuvre avec un succès indéniable un droit commercial harmonisé30. Il est certain que l'OHADAC ne pourra pas jouer un rôle aussi important que l'OHADA en Afrique31, au moins dans un premier temps. Quoi qu'il en soit, il est nécessaire de compter sur cette pluralité d'organisations internationales et de s'appuyer sur celles-ci afin de donner à l'OHADAC une responsabilité particulière, tournée vers l'harmonisation juridique en matière commerciale, avec peut être un profil plus technique que politique, donnant le rôle le plus important aux institutions privées (Chambres de commerce et d'arbitrage) qu'aux États, au moins dans un premier temps. Cela conditionne également la stratégie pour l'harmonisation, ce qui n'appartient pas exclusivement à l'Afrique subsaharienne32.

14. Abstraction faite de la longue tradition d'intégration en Amérique centrale, justifiée par des raisons historiques, il convient de retenir que pendant le XIXe siècle et la première moitié du XXe siècle, la production et le commerce centraméricain ont été dominés par des activités agricoles traditionnelles, dont certaines ont conduit à une grande intégration au marché extérieur comme c'est le cas du café, de la banane et du cacao. Ce processus a été beaucoup plus intense pour le Guatemala, El Salvador et le Costa Rica, et à un moindre degré il a existé au Nicaragua et au Honduras. Parmi les autres aspects, il s'agissait de favoriser la croissance des activités industrielles qui permettaient le remplacement des importations et qui dans le même temps, diversifiaient la production offerte par l'Amérique centrale. Quant au Panama, il a fait dès le départ le choix de l'économie de services (liés au canal et au secteur financier), dans une dynamique différente du processus d'industrialisation par substitution.

Fondé au début des années soixante du siècle dernier, le Marché commun centraméricain est le plus ancien des groupes d'intégration de la région. Il comprend le Costa Rica, El Salvador, le Guatemala, le Honduras et le Nicaragua. À la fin des années soixante-dix et pendant la décennie des années quatre-vingt, ce Marché a été touché par une instabilité politique de plusieurs États membres ce qui a influé sur son développement postérieur et sur sa propre crise. Toutefois, les entreprises de l'isthme ont joué un rôle important dans l'essor des exportations, et leurs initiatives sont significatives en matière de produits et de services compétitifs capables de relever les défis de la concurrence internationale. En 1993 les pays de la sous-région se sont engagés à parvenir à fixer un tarif douanier extérieur commun qui devait être adopté selon un rythme différent et devait fluctuer entre un et quinze pour cent. En 1995, l'accord sur le tarif douanier extérieur a inclus pour la première fois le secteur des produits agricoles.

Parallèlement à ces expériences d'intégration économique régionale, six États centraméricains (Costa Rica, El Salvador, Guatemala, Honduras, Nicaragua et Panama) ont mis en place conformément au Protocole de Tegucigalpa, du 13 décembre 1991, le Système d'intégration centraméricain (SICA), dont le fonctionnement a débuté en 1993. Ce système est composé, quant à lui, de quatre sous-systèmes d'intégration dans les domaines économique, social, culturel et politique. Inévitablement, le premier est le plus important et pose comme principe de base le Protocole au Traité général d'intégration économique centraméricaine, signé au Guatemala le 29 octobre 1993. Les objectifs en matière économique et commerciale sont exprimés dans des termes relativement génériques. Concrètement, le SICA vise à parvenir au bien-être et à la justice économique et sociale de tous les peuples centraméricains, à permettre une union économique et à vivifier le système financier centraméricain. Il vise également à renforcer la région pour en faire un bloc économique capable de s'insérer avec succès dans l'économie internationale.

Suite à une période léthargique, l'intégration dans la zone d'Amérique centrale a permis des avancées notables au cours des six sommets présidentiels de la région. Le succès le plus significatif est l'Accord-cadre pour l'établissement de l'union douanière centraméricaine signé le 12 décembre 2007 par les Ministres de l'Économie, du Commerce Extérieur ou de l'Industrie. L'Accord-cadre établit et confirme la volonté de créer une union douanière sur son territoire, conformément à l'Accord général sur le tarif douanier et le commerce (GATT) et à l'organisation qui lui succèdera, l'Organisation mondiale du commerce. L'accord comprend VII titres et trente articles. Son application interviendra de façon graduelle et progressive. N'ayant pas de durée de validité, il est donc à durée indéterminée et est ouvert à la signature de tout pays membre du SICA, celui qui adhère doit déposer l'instrument d'adhésion auprès du Secrétariat Général du SICA.

15. La Communauté des Caraïbes (CARICOM) rassemble les États suivants : Antigua-et-Barbuda, Bahamas, Barbade, Bélize, Dominique, Grenade, Guyana, Jamaïque, Montserrat, Saint-Christophe-et-Niévès, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, Trinité-et-Tobago et Suriname. Le Marché commun des Caraïbes a été créé par le « Traité de Chaguaramas » signé par la Barbade, la Jamaïque, le Guyana et la Trinité-et-Tobago. Il est entré en vigueur le 1er août 197333. Ensuite, les huit autres territoires caribéens sont entrés dans la CARICOM. Les Bahamas sont devenues, le 4 juillet 1983, le 13ème État membre de la Communauté. En juillet 1991, les Îles Vierges britanniques et Turques et Caïques sont entrées comme membres associés de la CARICOM. Douze autres États d'Amérique latine et des Caraïbes sont membres observateurs dans diverses institutions de la Communauté et conseils ministériels de la CARICOM. Le 4 juillet 1995, le Suriname est devenu le 14ème État membre de la communauté. L'ensemble de ces pays compte un total de 6 millions d'habitants. La Communauté met actuellement en place la seconde phase de son Tarif Extérieur Commun dont l'objectif visait à fixer des tarifs entre cinq et vingt pour cent pour 1998. La CARICOM a signé des accords de commerce avec la Colombie, le Mexique, la République Dominicaine et le Venezuela et ses pays reçoivent un traitement préférentiel dans les échanges avec les États-Unis d'Amérique et l'Union européenne.

En 1995, l'Association des États de la Caraïbe a été créée (AEC), et elle lie étroitement les pays de la Caraïbe avec ceux d'autre régions comme ceux du nord de la l'Amérique du sud et de l'Amérique centrale ainsi que le Mexique. Elle réunit vingt-cinq pays et douze territoires du bassin Caraïbe. Les zones prioritaires d'action de l'AEC portent sur le tourisme et le transport tant intra qu'interrégional. L'AEC constitue d'une certaine manière une réaction face aux processus d'intégration et aux processus de globalisation. Sa création émane de l'initiative des pays de la CARICOM, soutenus principalement par les pays du Groupe des Trois34.

La création du Marché commun de la Communauté des Caraïbes a été le résultat d'un effort de 15 ans pour remplir l'espoir d'une intégration régionale qui est née avec la création de la Fédération des Antilles Britanniques en 1958. Dans le domaine économique, la Région a maintenu le même statut pendant des années et, durant cette période, le libre-échange n'avait pas encore été institué entre les États membres. La Fédération des Petites Antilles s'est achevée en 1962, ce qui sur de nombreux aspect, doit être considéré comme le véritable commencement de ce qui est aujourd'hui la Communauté des Caraïbes. Les leaders politiques de la Caraïbe, forts de l'existence et du renforcement de la coopération mise en place durant la Fédération et qui a subsistée après le démantèlement de celle-ci, ont engagé des efforts très sérieux pour renforcer les liens entre les îles et le continent.

16. Il faut se référer à l'Initiative pour le bassin de la Caraïbe (ICC en espagnol), adoptée en 1984, qui instaure un avantage unilatéral concédé par les États-Unis portant sur un accès préférentiel des exportations (soit libres de tout droit de douane, soit moins taxées que les exportations des autres pays) en provenance des pays d'Amérique centrale et de la Caraïbe vers les États-Unis. À l'origine, les textiles étaient exclus de l'accès préférentiel de l'ICC. Aussi, quand l'ALENA est entré en vigueur, les exportations de textiles de toute l'Amérique centrale ont souffert un désavantage par rapport aux exportations mexicaines. En 2000, les pays centraméricains et de la Caraïbe ont obtenu des États-Unis d'inclure les exportations des textiles et du thon dans les préférences de l'ICC par le biais de la Loi sur le partenariat commercial avec le bassin des Caraïbes (CBTPA). L'objectif de l'Amérique centrale était de parvenir à signer un traité de libre-échange avec les États-Unis, du fait de la précarité de l'ICC et des désavantages qu'elle supportait par rapport à d'autres pays comme le Mexique et le Canada35.

En septembre 2001 les gouvernements des pays centraméricains et des États-Unis ont convenu d'engager une phase exploratoire en vue du lancement officiel de négociations afin de parvenir à un accord de libre-échange. À partir de 2002 se sont tenus dans différentes villes d'Amérique centrale et de États-Unis, une série d'ateliers techniques et qui ont donné lieu à des échange d'information sur divers thèmes commerciaux ce qui a facilité la définition postérieure du cadre des négociations futures. Sur la base de ce processus, les pays ont convenu de commencer des négociations sur un traité de libre-échange qui, officiellement, a été lancé le 8 janvier 2003. La négociation a été complexe et s'est déroulée au travers de plusieurs tables rondes successives. Du fait du système d'intégration qui existait à l'époque en Amérique centrale, les États centraméricains ont dû mener des réunions de coordination afin d'adopter une position commune autour de la table des négociations. Les pays centraméricains ont abouti dans leur négociation en décembre 2003. Au cours du processus de négociation, la République Dominicaine a fait part de son intérêt pour se joindre au Traité de Libre-Échange entre l'Amérique centrale et les États-Unis, ce qui fut reçu positivement par les six autres pays. Ainsi, suite aux négociations entre l'Amérique centrale et les États-Unis, la République Dominicaine a accepté les champs préalablement négociés par ces six pays et a signé les accords avec les États-Unis et l'Amérique centrale sur l'accès de leurs produits sur ces marchés et vice-versa36.

17. Le Traité de Libre-Échange entre la République Dominicaine, l'Amérique centrale et les États-Unis a été signé par les sept États parties, le 5 août 2004. L'accord de libre-échange entre les États-Unis, l'Amérique Centrale et la République Dominicaine (DR-CAFTA), à l'instar d'autres accords, présente des règles qui sont réitérées par l'Organisation mondiale du commerce (OMC). Elle créé une libéralisation commerciale à partir des postulats et insère des dispositions prévues dans l'intégration centraméricaine, et dont la majorité s'appliquent de façon multilatérale. De ce fait, le DR-CAFTA améliore la règlementation centraméricaine, ce qui est en même temps bénéfique pour les relations commerciales dans la région. Dans cet instrument, les changements législatifs que les pays centraméricains doivent effectuer pour l'entrée en vigueur du traité sont identifiés. Ces changements portent principalement sur les services, les télécommunications et la propriété intellectuelle. Il reste à espérer que l'ouverture plus grande de la région et l'amélioration de la règlementation induite par la signature du DR-CAFTA apportent davantage d'opportunités d'investissement, d'échange et d'emploi entre les pays signataires.

L'entrée en vigueur du Traité a posé comme condition aux pays parties d'instaurer un processus complexe de réforme législative afin d'ajuster leurs règlementations respectives aux standards internationaux les plus récents en matière commerciale. Les dispositions du traité sont la conséquence de l'évolution de la législation commerciale internationale. Aussi au départ les travaux de réforme se sont déroulés de façon conjointe, et dans un second temps le travail a été mené de façon bilatérale entre chaque pays et les États-Unis.

E) Contribution du droit international privé

18. L'apparition de projets régionaux d'intégration économique et politique a été l'une des réalités qui a rapidement mis en évidence le besoin de dépasser la référence nationale pour formuler l'objet du DIPr37. En ce sens, les phénomènes d'intégration imposent de faire un pas de plus vers le syllogisme suivant : vu que le DIPr pallie des distorsions juridiques dans l'espace provoquées par une diversité de causes, il convient de prendre en compte que son objet ne porte pas sur une situation privée hétérogène uniforme mais plutôt sur diverses « situations privées hétérogènes » auxquelles le DIPr doit donner une réponse particulière. Et cette nécessité apparait avec davantage de clarté, mais pas de manière exclusive, dans le cas de l'intégration européenne qui ne poursuit pas seulement un objectif juridique propre : elle se fonde sur l'objectif juridique d'intégration mais également sur un ordre juridique autonome et complet avec ses propres sources et dont la vocation est d'être appliqué dans l'espace délimité fonctionnellement par le fait qu'il couvre des situations privées « d'intégration » ou « intracommunautaires »38. Prenant en compte la classification proposée par S. Alvarez González, une fois reconnue la « fonction de délimitation » de l'objet du DIPr, la diversité de l'hétérogénéité qui le caractérise permet de profiler la « fonction normative » de ce dernier39.

La mise en marche d'un processus d'intégration fait que le rôle du droit et, en particulier, du DIPr, recouvre une importance essentielle40 : l'intégration, en tant qu'objectif fonctionnel, recourt à cet ordre pour être efficace afin de favoriser l'identité culturelle des individus à travers le respect de la diversité juridique, en même temps qu'il harmonise les solutions en les rendant plus prévisibles. Autrement dit, le DIPr constitue une « unité fonctionnelle » qui est étroitement liée aux principes et aux libertés générées par l'établissement et le fonctionnement d'un organisme supranational41 ou d'une zone de libre-échange.

Parallèlement tout phénomène d'intégration régionale a des répercussions substantielles sur la règlementation des situations juridiques concernant plus d'un ordre juridique national et des situations dites de relations privées internationales, l'intensité de la répercussion étant en relation directe avec le niveau des objectifs atteints. Partant d'une classification fonctionnelle très basique, mais valable dans le cadre de notre démonstration, nous pouvons opérer une distinction entre la zone de libre-échange, l'union douanière, le marché commun, l'union économique et l'intégration globale. Bien entendu, chacune de ces catégories résulte de la somme qualitative des éléments suivants : suppression des taxes douanières, tarif douanier extérieur commun, politiques commerciales communes, politiques économiques communes et politiques globales communes (en matière de défense, de relations étrangères, d'industrie, de monnaie). Inutile de dire que le rôle du DIPr est très différent à chacun de ces niveaux et qu'il apparait particulièrement important à partir de l'étape du marché commun – en marge d'une sorte d'harmonisation des législations produite par le processus – et qu'il devient un élément indispensable lors de la dernière phase du processus42. Ainsi, dans certains modèles basiques d'intégration, l'affectation aura des répercussions directes dans les règles de droit administratif économique des États membres, mais au fur et à mesure que le phénomène d'intégration s'accroitra, ces règles auront des répercussions décisives sur le droit privé, et plus particulièrement sur le droit de propriété. Enfin la transition entre l'intégration économique et l'intégration politique conduit à des effets dans tous les secteurs de l'ordre juridique, y compris en droit des personnes.

Si le DIPr est un ordre juridique régulateur des situations privées internationales, en lien avec un système national déterminé et concret, il s'avère indéniable que tout processus d'intégration puisse supposer une transformation substantielle de son objectif traditionnel. L'intégration tend à produire dans ce contexte trois altérations de base43 : dans un premier temps, elle conduit à une véritable mutation de quelques principes de base du DIPr qui n'est rien d'autre que le phénomène de « frontière ». Dans un second temps, le pluralisme des systèmes est également altéré du fait que le processus d'intégration marque une tendance à l'unification des législations dans le secteur de la production. Enfin, compte tenu que tout projet de « droit communautaire » conduit en général à faire apparaitre de nombreuses lacunes, la nouvelle organisation a tendance à codifier directement certains domaines du DIPr.

19. L'exemple paradigmatique qui illustre que le besoin d'intégration s'accompagne des préceptes indispensables du DIPr nous est fourni par le contrat international qui par excellence constitue le moyen par lequel les transactions économiques transfrontalières sont élaborées. Les solutions internes en matière contractuelles ne permettent pas de se confronter solidement aux contrats internationaux. Il s'avère indispensable de pouvoir compter sur une règlementation appropriée selon la dimension internationale couverte. Concernant spécifiquement l'OHADAC, il existe un vide juridique qui jusqu'à ce jour se caractérise par un droit positif qui n'est pas compensé par des solutions jurisprudentielles susceptibles d'apporter une sécurité suffisante aux opérateurs commerciaux. Il est certain qu'il existe une adhésion majoritaire à la Convention de Vienne de 1980 relative au contrat de vente de marchandises et à certains autres instruments internationaux. Toutefois, cette législation s'avère insuffisante pour se confronter à la complexité des contrats internationaux qui requiert des normes de DIPr qui sont inexistantes dans ces pays, sauf le Venezuela qui constitue une exception notable.

Des solutions sont nécessaires pour établir un climat de confiance favorable à la passation de contrats par des étrangers conformément aux principes de la lex mercatoria, tout en respectant les intérêts des contractants caribéens ainsi que les normes de l'ordre public économique. Ces solutions doivent aussi respecter un traitement équitable des nationaux par les tribunaux de la Caraïbe. Ce climat pourrait avoir été favorisé par l'entrée des pays de la zone de la Convention de Mexico de 1984 relative à la loi applicable aux obligations contractuelles, qui a été élaborée au sein de la CIDIP (dont seuls le Mexique et le Venezuela font partie). Toutefois, étant donné que ce n'est pas le cas, il ne faut pas rechigner sur les solutions mises en place par le présent instrument juridique, modèle de droit comparé, et il faut étudier la possibilité d'introduire ces solutions dans le DIPr des pays de l'OHADAC, peut-être par le biais d'une loi type44.

2. Essor régional des relations de droit privé international

A) Facteurs contraignants

20. Tout processus d'intégration finit par requérir inexorablement une coopération judiciaire entre les États en matière civile et commerciale qui va en s'accroissant au fur et à mesure que les besoins du processus l'imposent. En dehors des questions strictement commerciales, ces dernières années la Caraïbe connait un accroissement sans précédent de problèmes dus aux relations internationales et auxquels les législateurs nationaux doivent prêter une attention particulière. Pour ce faire, il convient d'établir des règles précises de DIPr qui apportent une réponse aux problèmes ponctuels dans les domaines suivants : mouvements migratoires avec toute la charge personnelle et familiale qu'ils posent, développement du tourisme et augmentation du commerce extérieur et de l'activité d'investissement.

21. Face aux mouvements migratoires et aux intégrations économiques régionales, le besoin de créer des frontières juridiques voire même physiques, continue de faire débat dans les relations transfrontalières. Le phénomène de l'immigration implique un grand défi quant à l'impact économique et social que ce mouvement humain produit. En effet, il faut que le pays d'accueil, tout en protégeant les éléments de sa propre identité et de sa cohésion nationale, puisse concilier son propre progrès dans le plein respect des droits humains et qu'il puisse réponde aux attentes des immigrants et de leur famille quant au respect de leur droit à une vie digne. À côté des règles qui régissent l'accès et l'installation des étrangers dans les divers États, et qui constituent une question à encadrer juridiquement en droit public, il faut des règles de droit privé destinées aux étrangers déjà établis et qui, tout en suivant le schéma posé par le droit comparé, opèrent un choix fondamental. Un choix entre l'application de la loi nationale des étrangers ou l'application de la loi du pays d'accueil ou de celle d'un pays tiers pour toutes les questions juridiques qui touchent au cercle personnel et familial des personnes, y compris les situations déterminantes aussi pour son patrimoine, comme c'est le cas de la capacité juridique pour passer des actes ayant des effets juridiques. Sans entrer dans d'autres considérations sur le plan technique qui seront abordées ultérieurement, il convient de voir une fois pour toutes si les solutions traditionnelles fondamentales proposées par la loi nationale des personnes répondent correctement au modèle normatif élaboré au XXIe siècle.

Répondre à cette question dans un contexte d'immigration croissante pourrait revenir à reprendre la dichotomie classique qui requiert de façon simpliste l'application de la loi du lieu du domicile dans un but d'intégration face à l'application de la loi de la nationalité ancrée dans l'État d'origine. Si le diagnostic est précis, l'immigration croissante opterait pour l'application de la loi du domicile des personnes (les immigrants et les propres nationaux résidant dans l'espace de la Caraïbe). Toutefois, cela n'est pas aussi simple. Après des décennies de controverses théoriques et de choix législatifs, la recherche d'un juste équilibre a conduit les systèmes actuels à opter pour des solutions « prédominantes » basées sur le domicile ou « prédominantes » basées sur la nationalité, mais pas pour des systèmes en soi. Cela serait sans compter sur l'introduction ces dernières années d'un principe de marque primordial : l'autonomie de la volonté qui sous certaines conditions permet à l'intéressé de choisir soit d'être intégré à la loi de son domicile, soit de rester lié à son droit d'origine. Nous verrons ci-après comment cette idée prend forme dans la loi type.

22. Le territoire de l'OHADAC, grâce à sa situation géographique privilégiée dans la Caraïbe, jouit de nombreux endroits particulièrement attractifs et intéressants pour l'industrie du tourisme pour ses belles plages et ses paysages magnifiques. La mise en œuvre de règles sur les étrangers en vue de faciliter le tourisme reflète l'intérêt national pour le développement d'une activité commerciale, majoritairement privée, qui constitue parfois une source importante de revenus moteur des économies nationales. Cela conduit à instaurer un statut particulier du touriste comme principe fondamental du développement de l'industrie de caractère entrepreneuriale privée45.

De nos jours, le tourisme des étrangers est un phénomène qui fait partie de la vie quotidienne des Caribéens, car il influe en grande partie sur leurs revenus économiques et sur leur mode de vie aussi. Les touristes étrangers consomment généralement en euros ou en dollars ou changent leur monnaie ce qui conduit à l'introduction de devises dans l'économie nationale et permet aux pays de la région d'accéder à des services et des produits qu'ils ne produisent pas. Toutefois, le séjour de millions de touriste, même s'il est de durée limitée, pose de gros problèmes qui doivent être résolus sur le plan macroéconomique, comme l'augmentation de vols aériens étrangers ou l'introduction de devises. Sur le plan écologique, ce n'est pas un hasard si la majorité des hôtels de la région est entre les mains d'étrangers, le tourisme accentuant la destruction de la faune et de la flore des zones touristiques et générant des problèmes de pollution et de flux de circulation. Enfin, il y a des conséquences sur le plan juridique strictement au niveau du droit privé46.

La situation telle qu'elle est requiert l'établissement d'un cadre juridique afin d'offrir une sécurité juridique aux étrangers qui pratiquent des transactions de type contractuel. Une attention toute particulière doit être apportée au contrat du tourisme international qui revêt une forte complexité car il implique des franchises hôtelières, la vente de marchandises, le transfert de technologie et des relations de travail, sachant que l'immense majorité des travailleurs qui prêtent leurs services aux entreprises touristiques étrangères sont des Caribéens. Vu l'ampleur des contrats liés au tourisme, il convient d'ajouter que l'on peut de moins en moins ignorer que le touriste est un consommateur et qu'en tant que tel il bénéficie de droit spécifique et d'un certain privilège juridique face au professionnel avec qui il traite.

Toutefois, le tourisme n'appelle pas seulement des solutions de type contractuel soit entre professionnels du secteur soit entre professionnels et touristes consommateurs. La destruction potentielle de l'environnement par l'industrie hôtelière, l'augmentation des accidents de circulation causés par des touristes étrangers et l'inexécution des conditions de séjour des touristes, plus particulièrement des voyages dits combinés, imposent une réglementation précise dans laquelle la dimension extracontractuelle joue un rôle important.

23. Avec l'ouverture au commerce international, l'économie de nombreux pays de la Caraïbe s'est acheminée, à partir du phénomène de privatisation des entreprises, vers une politique manifestement libérale sauf pour les secteurs revenant exclusivement à l'État. Parallèlement, ces dernières années, des réformes législatives et une déréglementation administrative ont été opérées afin d'attirer les capitaux étrangers productifs pour ainsi augmenter l'offre et la qualité des emplois, accroitre les exportations et améliorer les conditions d'un transfert de technologie effectif. Sur le plan juridique, l'adaptation à la globalisation et au commerce international des transactions privées ont conduit à modifier et à simplifier des centaines de lois, tout en essayant d'éliminer les barrières au développement du commerce. Fondamentalement, celles-ci se réfèrent au transfert de technologies, de marques et de brevets, ainsi que d'investissement étranger.

L'accroissement du commerce extérieur mérite une réflexion spécifique car il s'agit d'un indice de la croissance économique dans la zone OHADAC et du niveau d'intégration dans l'économie internationale. En outre, il conduit à entrer dans l'économie de marché et à libéraliser l'économie, des processus graduels introduits dans les années quatre-vingt-dix et 2000 et qui ont été accentués et renforcés lors de la dernière décennie, quand les États de la zone ont signé des accords importants de libre-échange avec les États-Unis et l'Union européenne. L'ouverture en question au commerce international et la politique d'attraction des capitaux étrangers menée par les États de la région n'impose pas seulement de procéder à des réformes législatives et à une dérèglementation administrative sur le plan du droit public, mais également d'adapter les règles de conflit régissant les transactions privées qui sont contenues dans les grands corpus comme le code civil ou le code de commerce. Il s'agit, surtout, de répondre aux nouveaux besoins en matière de propriété intellectuelle ou de protection de la concurrence sur des marchés qui se sont progressivement internationalisés. Il s'agit aussi de déterminer la loi qui reconnaitra et protègera un droit ou la loi qui fixera les règles du jeu applicables aux nouveaux opérateurs économiques et sur lesquelles ils pourront prendre leurs décisions sans entraver le libre jeu de la concurrence, ni porter atteinte de façon déloyale à leurs concurrents réels ou potentiels.

24. Les investissements risquent de dépasser le seul cadre juridique national des États du fait de la délocalisation des investissements dans un autre pays. Prendre la dimension de cette activité révèle une caractéristique de la production internationale, car c'est par elle que l'on cherche à augmenter les bénéfices des investisseurs. Les investisseurs s'orientent vers des endroits où la réglementation sur les émissions de déchets, le droit du travail, les impôts et les salaires sont les plus favorables, afin d'obtenir une marge bénéficiaire accrue. Tout cela implique de remettre entre les mains des États, qui reçoivent l'investissement, une analyse présentant des difficultés où se mêlent à la fois des critères politiques et économiques et des critères strictement juridiques comme, entre autres, l'impact de l'investissement sur l'environnement, le domaine d'application de la protection de la propriété intellectuelle et les effets de la législation du travail. L'existence d'un environnement favorable à l'investissement impose, aussi, de préciser la portée de l'ordre public économique, les principes irréfutables pour les États de la zone, la prévention et la lutte contre la corruption, la réforme du régime fiscal et, en tout cas, la réduction des obstacles bureaucratiques et commerciaux47. Les législateurs caribéens doivent être très conscients de la nécessité de créer les conditions adéquates afin que le secteur privé assume le rôle moteur de l'investissement et la captation du capital étranger est un élément clé de cette stratégie. Pour ce faire un cadre légal, offrant des incitations et des garanties aux investisseurs étrangers et soutenant l'éventuel rapatriement de l'investissement et de ses produits, s'avère nécessaire. En outre, une sécurité juridique est requise non seulement pour les cas concrets des investisseurs mais également pour les indices déjà mentionnés et qui sont directement liés à la production, à la destination des investissements et, surtout, à la résolution des conflits entre les mains de toutes les parties concernées (décision devant les tribunaux, mais aussi devant les arbitres hautement spécialisés sur ces questions).

Une telle orientation n'est pas incompatible avec le fait que l'État se réserve une série d'actions ayant pour objet d'éviter les éventuels effets déstabilisateurs provoqués par le retrait massif et simultané de capitaux spéculatifs. Cela nécessitera que les investissements en portefeuille sur le marché des capitaux restent déposés sur une durée minimum. Dans ce contexte des pas importants ont été franchis tant dans le domaine de la réglementation de l'investissement étranger et de la politique parallèle de signature d'accords de protection et de promotion réciproque d'investissement, que dans le domaine des réformes du cadre juridique régulateur pour les secteurs de l'infrastructure48.

En tout cas, il convient de signaler une certaine modernisation de la législation relative au commerce international surtout en ce qui concerne l'arbitrage commercial49. Précisément l'existence de nombreuses règles dans ce domaine basées, fondamentalement, sur la ligne tracée par la loi type de la CNUDCI de 1985, modifiée en 2006, justifie pleinement l'exclusion de l'arbitrage commercial international du champ de la présente loi type, même si sur le plan purement matériel elle entrerait parfaitement dans le cadre de cette initiative normative. Généralement, la législation de DIPr ne s'intéresse pas à l'arbitrage mis à part le cas de la Suisse, dont la complexité structurale fédérale l'a contrainte à prendre en compte expressément cette question par la Loi de DIPr de 1987, et ce bien avant que l'arbitrage interne soit régi par le code de procédure civile. Même la législation vénézuélienne de DIPr, ayant une tendance à l'expansion, exclut l'arbitrage de son champ d'application et suit le modèle pratiquement non remis en cause, surtout en Amérique latine, d'une loi spéciale d'arbitrage. Le code de DIPr panaméen de 2014 auquel nous nous référons ci-après, est un autre exemple des inconvénients que constitue l'insertion de cette matière.

Il n'en est pas ainsi avec les règles qui régissent les situations dans lesquelles les tribunaux des États membres de l'OHADAC vont avoir compétence judiciaire internationale pour exercer légitimement leur juridiction. La présente loi type, dans ce cas, traite en détail de ces règles.

B) Contribution du droit international privé

25. Tel que cela a été avancé dans l'analyse de chaque facteur étudié, une réponse globale requiert de mettre à disposition de chaque État, de ses opérateurs juridiques et de tout individu ou personne morale spécifiquement visée, un bloc normatif intégré avec des règles modernes et simples adaptées aux exigences de notre temps et aux modèles créés par la globalisation en général et les mouvements régionaux d'intégration en particulier. Dans ce bloc normatif, accompagné de mesures principalement publiques ou de relation verticale entre l'État et l'opérateur juridique privé, il faut des règles concrètes qui apportent des réponses claires et prévisibles aux spécificités de l'internationalité des relations entre particuliers. Il faut également des règles de DIPr qui traitent des aspects relatifs à la compétence judiciaire internationale des tribunaux caribéens en matière de litiges avec des entreprises étrangères, entre entreprises étrangères, ou simplement entre particuliers, indépendamment de leur nationalité, tout en appliquant la dose suffisante d'internationalité. Il faut également des règles de DIPr spécifiques pour déterminer le droit applicable aux transactions transnationales, mais aussi aux questions que le simple caractère d'extranéité de la situation soulève et qui ne sont pas nécessairement soumises à la loi locale, comme c'est le cas dans les relations de famille. Et enfin, il faut des règles qui traitent de l'efficacité des décisions de justice étrangères dans les pays et les territoires. C'est de cette manière que chaque pays de la zone pourra avancer dans le poste attribué par la Corporation Financière Internationale dans le rapport Doing Business 2014.

Pour réaliser cette tâche et comme principe général, les législateurs nationaux disposent d'une grande marge d'appréciation. Dans ces domaines, les limites imposées par les normes de droit international général sont très réduites, face à la règlementation en droit de la nationalité et en droit du statut des étrangers. Ces limites émanent, logiquement, de la norme internationale sur les droits et les libertés de la personne humaine qui se matérialisent, d'une part, dans le respect des principes de légalité, de sécurité juridique et, plus particulièrement, d'égalité, prohibant toute discrimination juridique pour des raisons de naissance, de race, de sexe, de religion entre autres50 : et, d'autre part, dans le respect du droit de toute personne à se voir reconnaitre la personnalité juridique, ce qui lui assure la protection de ses droit par les tribunaux et se matérialise dans l'égalité procédurale de l'étranger (accès à la justice) quand il comparait devant une juridiction nationale. De son côté, le droit international public pose également quelques limites au législateur national quant à l'établissement de règles de compétence de ses juridictions nationales relatives à leur saisine en présence d'éléments d'extranéité. Ces limites sont la manifestation la plus criante du principe d'immunité de juridiction et d'exécution de l'État étranger, de ses institutions et de ses agents.

Hors de ces limites, le pouvoir d'appréciation est la règle et cette règle ne peut être tempérée que pour des raisons humanitaires, de réciprocité et, surtout, pour des raisons de courtoisie internationale découlant du devoir de coopération effective des États quant à l'exercice international de la justice.

26. Le DIPr est depuis longtemps un instrument essentiel pour régir les relations entre les personnes et les patrimoines internationaux. Il facilite la mobilité des personnes et l'échange des biens et des services. Il promeut l'intégration et combat aussi les activités transfrontalières illicites. Pris au sens large, il définit l'ensemble des règles juridiques qui régissent les relations entre les personnes de droit privé. Toutefois, il convient de préciser en vue de la compréhension du contenu de la loi type présentée, que l'expression « Droit international privé » ne revêt pas le même sens dans tous les États. Dans certains États, elle comprend les règles de conflit des lois (désignation de la loi applicable aux situations de droit international privé). Dans d'autres État, il comprend en plus les règles relatives à la compétence des juridictions, à la reconnaissance et à l'exécution des décisions de justice étrangères. Ces règles relatives à la loi applicable, à la compétence juridictionnelle internationale, à la reconnaissance et à l'exécution des décisions de justice étrangères apportent des solutions aux difficultés posées par une même situation pouvant être rattachée à divers systèmes juridiques et judiciaires. Ces règles révèlent des corrélations précises qui plaident en faveur d'un DIPr à la croisée de toutes.

Les règles de DIPr trouvent leur origine dans la loi, la jurisprudence et la doctrine de chaque État. Malgré son nom, le DIPr est, en principe, un droit purement national. Certaines de ces règles nationales peuvent être uniformisées par des conventions internationales ou des instruments élaborés au sein d'organisations internationales, à l'échelle mondiale, v.gr., la Conférence de La Haye de DIPr ou, dans le contexte panaméricain, la Conférence Spécialisée de DIPr.

L'existence du DIPr se justifie par la pluralité de systèmes juridiques et d'organisations juridictionnelles qui coexistent dans un contexte de relations internationales et, précisément, l'une des fonctions principales réside dans l'établissement d'un ensemble de réponses juridiques à ce pluralisme51. Si un tel pluralisme n'existait pas, du fait de l'unification du droit des différents États, il ne servirait à rien que le législateur s'occupe de résoudre ces questions en élaborant un système normatif de DIPr. Et ce système normatif ne servirait à rien, non plus, si les relations juridiques demeuraient circonscrites à un système juridique déterminé, sans aucune connexion avec l'étranger. Un pays qui ne connait pas de commerce extérieur, qui n'accueille pas d'immigrants ou d'autres étrangers pour des séjours de courte durée, qui n'a pas de ressortissants émigrants vivant à l'étranger, qui ne reçoit pas un flux significatif d'investissement étranger, n'a pas de problèmes spécifiques liés aux relations de droit international privé et, par conséquent, n'a pas besoin d'un ensemble de normes qui offrent une réponse à ces problèmes. Cette situation s'est produite dans beaucoup d'États, non seulement en Amérique latine et dans la Caraïbe mais aussi à d'autres latitudes. Cependant, l'isolement et l'autarcie ont été dépassés de façon indéfectible par l'actuelle internationalisation généralisée des relations juridiques de droit privé. Aujourd'hui, il est pratiquement impossible de trouver un État au sein duquel l'internationalisation n'a pas pris pied dans les relations privées. Ce fait n'a toutefois pas conduit à une identité de réponse de la part des législateurs, bien au contraire. Le droit comparé nous met en garde contre la diversité des modes de règlementation : en partant du silence absolu de certains législateurs et en allant jusqu'à l'existence d'un droit national détaillé et complet qui assument la responsabilité, dans un contexte international, de fournir des réponses spécifiques aux demandes économiques et sociales.

27. De ce qui précède, il découle que sur la scène latino-américaine il existe une forte tendance à créer des espaces économiques intégrés, ce qui entraine d'importantes conséquences non seulement pour le développement économique et pour l'augmentation du niveau de ressources dans les zones concernées, mais aussi pour les relations de droit international privé52. Si nous prenons les deux expériences les plus notables, ce phénomène est perceptible dans l'ALENA, surtout dans le domaine des opérations de commerce « intra-communautaires » et dans celui du Mercosur, et particulièrement dans les secteurs de la coopération juridictionnelle internationale, des mesures de protection, de reconnaissance et d'exécution des décisions de justice étrangères (à travers le Protocole du bois de chauffage, de Ouro Preto et de Buenos Aires)53. Toutefois, avec toute l'importance que le phénomène connait déjà et qui a toutes chances d'augmenter dans le futur, les liens entre l'intégration économique et le DIPr sont nettement plus éloignés que ceux qu'ils présentent dans d'autres lieux d'intégration avancée comme c'est le cas dans l'Union européenne.

Les causes de cette situation ne sont pas compréhensibles et peuvent s'expliquer synthétiquement pour de trois raisons principales. En premier lieu, les mécanismes institutionnels qui existent en Amérique sont réduits face à l'appareil complexe et consolidé qui régit l'Union européenne, dans une longue tradition normative, avec des techniques propres qui, ces dernières années, se sont orientées vers une unification juridique ultra efficace par le biais des règlements. En second lieu cela s'explique par le fait qu'en Europe, contrairement à ce qui se passe dans les processus d'intégration en Amérique, depuis l'entrée en vigueur de l'Acte unique, un « marché intérieur » a été créé sur la base de postulats radicalement divers. En dépassant le principe du libre-échange, le « marché intérieur » a été conçu comme un marché intégré et s'est accompagné d'un rapprochement très développé des législations nationales54. Enfin, cette volonté politique a entraîné un développement vertigineux du DIPr de l'Union européenne par le biais du « Troisième pilier »55 et à une communautarisation qui a suivi les domaines constitutifs d'un véritable espace de liberté, de sécurité et de justice. Cette dichotomie des deux côtés de l'Atlantique ne porte pas seulement sur des aspects théoriques et descriptifs mais elle révèle clairement la confrontation des « blocs » (particulièrement de l'UE et d'ALENA) qui s'est produite au sein de la Conférence de La Haye de DIPr lors du projet d'élaboration d'une éventuelle Convention universelle sur la reconnaissance et l'exécution des décisions de justice étrangères.

À côté de ces différences, qui s'expliquent pour des raisons historiques et selon le niveau d'intégration dans lequel chaque bloc se trouve, il existe des problèmes communs. Par exemple, l'harmonisation des systèmes de DIPr requiert pour l'ALENA ou pour les organismes d'intégration caribéens une conciliation entre le système de droit écrit et celui de common law. C'est le cas dans l'Union européenne, qui a connu à une époque des problèmes techniques importants. Par conséquent certains États membres (comme le Royaume-Uni ou l'Irlande) ont aujourd'hui un statut spécial dans la création de l'espace de liberté, de sécurité et de justice dans lequel leur culture et leur tradition juridiques – outre d'autres facteurs – constituent un élément essentiel.

II. Diversité et hétérogénéité juridique au sein de l'OHADAC

1. États et territoires en présence56

28. Contrairement à la tradition la plus répandue entre les États membres de l'OHADA, le projet OHADAC est confronté depuis le début à la diversité et à l'hétérogénéité des pays de la zone Caraïbe. L'analyse des pays insulaires ou composés d'archipel démontre que plusieurs territoires sont encore soumis ou dépendants de la souveraineté d'États européens. C'est le cas des départements d'outre-mer français (Guadeloupe, Martinique, les collectivités de Saint-Martin et de Saint-Barthélemy). C'est aussi le cas des îles appartenant aux Antilles hollandaises – avec un nouveau statut politique depuis le 10 octobre 2010 – à savoir Bonaire, Saint-Eustache et Saba (qui font partie du Royaume des Pays-Bas), et également de Curaçao, Aruba et Sint Maarten, qui sont des territoires indépendants des Pays-Bas. Les territoires d'outre-mer, qui dépendent du Royaume-Uni, sont Anguilla, les îles Caïmans, les îles Turques et Caïques, les îles Vierges britanniques et Montserrat, auxquels il faudrait ajouter les Bermudes, malgré sa situation géographique. En outre, Porto Rico est un État libre associé, territoire n'appartenant pas aux États-Unis, tout comme les îles Vierges étatsuniennes. Parmi les pays ou territoires qui sont indépendants se trouvent des États importants de tradition espagnole comme Cuba, ou de tradition française comme Haïti, et d'autres comme la République Dominicaine, où malgré la prédominance de la langue espagnole, la tradition juridique est davantage française. Dans le giron du common law se trouvent les autres territoires insulaires indépendants, qui sont en bonne partie rattachés à l'Organisation of Eastern Caribbean States (OECS), ou dépendant de la tradition anglo-saxonne bien qu'ils ne fassent pas partie de ladite organisation, mais du Commonwealth (Bahamas, Barbade, Jamaïque et Trinité-Tobago). En plus, au sein de l'OHADAC se trouvent au moins 18 États insulaires souverains qui comprennent 31 territoires différents avec des langues et des traditions juridiques en lien avec quatre métropoles : l'Espagne, la France, le Royaume-Uni et les Pays-Bas. Leur population dépasse les quarante millions d'habitants, dont une moitié parle espagnol, un quart parle français, presque un autre quart parle anglais, et enfin une minorité (environ 1%) parle hollandais.

Le modèle se reproduit dans le cas des territoires continentaux riverains de la Caraïbe, c'est-à-dire que dans ce cas, nous parlons, en grande partie, d'États indépendants, du point de vue tant géographique que démographique, de langue et de tradition hispanique à savoir : la Colombie, le Costa Rica, le Guatemala, le Honduras, le Mexique, le Nicaragua, le Panama et le Venezuela. Certains d'entre eux comme le Panama ont été perméables, surtout dans le domaine commercial, à l'influence juridique anglo-américaine. La tradition française est représentée par un département d'outre-mer français : la Guyane française. Le Suriname, un État indépendant, témoigne de l'héritage hollandais. Finalement, l'influence anglaise est visible au Guyana et au Bélize, deux États indépendants qui font partie du Commonwealth. Au total, 11 nouveaux États indépendants (12 territoires) sont d'influence anglaise. Il s'avère difficile de déterminer précisément la population riveraine de la Caraïbe qui relève des États continentaux, dont la population globale atteint des chiffres très élevés, elle s'élèverait à plus de deux cents millions d'habitants et est, dans son immense majorité, de langue espagnole.

29. Ce bref et superficiel aperçu géographique met en évidence la pluralité politique et culturelle du territoire OHADAC, composé de 29 États indépendants qui recouvrent 43 territoires différents. En termes politiques, l'OHADAC englobe un sixième des États qui composent la Communauté internationale et environ 260 millions d'habitants. L'héritage culturel et linguistique de ces pays est divers, tout comme leur degré de proximité avec les anciennes métropoles. Alors que les États de langue hispanique ont une grande tradition d'indépendance qui remonte au XIXe siècle, nombre de territoires de tradition française, anglaise ou hollandaise font encore partie d'États métropolitains ou ont accédé à l'indépendance dans la deuxième moitié du XXe siècle. Une telle diversité de structures politiques conditionne la stratégie à adopter pour réaliser une harmonisation juridique. Il ne s'agit pas, comme, dans le cas de l'OHADA, de pays indépendants ayant une tradition plus ou moins autonome vis-à-vis de l'influence française. Il suffit de penser aux problèmes que susciterait la réécriture d'un traité international ayant la même portée que le Traité de l'OHADA. L'OHADA aurait pu être créée avec le simple soutien technique et financier de la France. Par contre, le projet OHADAC nécessitera la contribution active des autres pays comme les Pays-Bas, les États-Unis et surtout l'Espagne et le Royaume-Uni.

30. Le défi exige de partir, également, de la reconnaissance de la diversité culturelle de la région caribéenne, ce qui a souvent conduit à ce que ses territoires soient proches géographiquement tout en vivant dos à dos les uns des autres, au détriment de leurs intérêts stratégiques communs. Comme cela a été souligné, les États insulaires et formant des archipels connaissent une grande diversité linguistique : espagnol, français, anglais et hollandais, sans compter les langues indigènes, qui sont importantes notamment sur le continent, ou les langues métisses (le créole particulièrement). L'espagnol domine clairement sur le territoire continental, y compris dans des pays comme le Bélize, où même si l'anglais est la seule langue officielle, il n'en demeure pas moins que l'espagnol est d'usage commun. Toutefois, la langue hollandaise est présente au Suriname et la langue française en Guyane française. Une telle diversité linguistique, qui n'est pas obligatoirement culturelle, présage cependant des différences importantes dans le contexte juridique et qui ne sont pas toujours évidentes.

2. Panorama du droit international privé et son rayonnement dans la zone OHADAC

2. Panorama du droit international privé et son rayonnement dans la zone OHADAC

A) Bilan de l'unification et mise en œuvre des solutions nationales

31. Toute étude comparative sur les normes de DIPr et les systèmes d'intégration, compte tenu de leur application effective dans de nombreux territoires de la zone OHADAC, doit être précédée de l'analyse des résultats obtenus dans le processus d'unification institué dans le cadre de l'Union européenne. Le développement actuel du DIPr communautaire a été favorisé par l'introduction du titre IV de la version TCE émanant du Traité d'Amsterdam. La compétence communautaire dans le domaine de la coopération judiciaire en matière civile a impliqué l'intégration de l'ancien troisième pilier dans ce nouveau titre. Suite aux dispositions de l'article 65 TCE (actuellement article 81 TFUE), il a été procédé à la « communautarisation » de quelques conventions ou projets de conventions de DIPr et à la promulgation d'actes communautaires dans d'autres matières57 : le Règlement (CE) nº 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 concernant la compétence judiciaire, la reconnaissance et l'exécution des décisions de justice en matière civile et commerciale, qui à partir du 10 janvier 2015 a été remplacé par le Règlement (UE) nº 1215/2012 du Parlement européen et du Conseil du 12 décembre 2012 : le Règlement (CE) nº 1346/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif aux procédures d'insolvabilité : le Règlement (CE) nº 1348/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale, modifié par le Règlement (CE) nº 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil : le Règlement (CE) nº 1347/2000 du Conseil, du 29 mai 2000, relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale des enfants communs, modifié par le Règlement (CE) nº 2201/2003 du Conseil du 27 novembre 2003 relatif à la compétence, la reconnaissance et l'exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale : le Règlement (CE) nº 1206/2001 du Conseil du 28 mai 2001 relatif à la coopération entre les juridictions des États membres dans le domaine d'obtention des preuves en matière civile ou commerciale : la Directive 2002/8/CE du Conseil, du 27 janvier 2003, visant à améliorer l'accès à la justice dans les affaires transfrontalières par l'établissement de règles minimales communes relatives à l'aide judiciaire accordée dans le cadre de telles affaires : le Règlement (CE) nº 805/2004 du Parlement européen et du Conseil du 21 avril 2004 portant création d'un titre exécutoire européen pour les créances incontestées : le Règlement (CE) nº 1896/2006 du Parlement européen et du Conseil, du 12 décembre 2006, instituant une procédure européenne d'injonction de payer : Règlement (CE) nº 861/2007 du Parlement européen et du Conseil, du 11 juillet 2007, instituant une procédure européenne de règlement des petits litiges : le Règlement (CE) nº 864/2007 du Parlement européen et du Conseil du 11 juillet 2007 sur la loi applicable aux obligations non contractuelles : la Directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008, sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale : le Règlement (CE) nº 593/2008 du Parlement européen et du Conseil du 17 juin 2008 sur la loi applicable aux obligations contractuelles (Rome I) : Règlement (CE) nº 4/2009 du Conseil du 18 décembre 2008 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions et la coopération en matière d'obligations alimentaires : le Règlement (UE) nº 1259/2010 du Conseil du 20 décembre 2010 mettant en œuvre une coopération renforcée dans le domaine de la loi applicable au divorce et à la séparation de corps : et le Règlement (UE) nº 650/2012 du Parlement européen et du Conseil du 4 juillet 2012 relatif à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions, et l'acceptation et l'exécution des actes authentiques en matière de successions et à la création d'un certificat successoral européen. Cette compétence ne concerne pas seulement les domaines spécifiques du droit de la procédure civile internationale mais s'étend également au champ du droit applicable, comme cela ressort de l'article 81.2º.c) du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne. Il s'agit, dans une action d'ensemble, de garantir la plus grande sécurité juridique, ainsi que l'égalité d'accès à la justice ce qui implique d'identifier simplement la juridiction compétente et la législation applicable, ainsi que les jugements et les procédures les plus rapides.

32. À partir de ce bloc normatif et au regard de son intérêt pour l'élaboration d'un DIPr interne, il convient de remarquer ce qui suit :

  1. L'unification, bien qu'elle ait une origine à caractère patrimonial pour avoir été dès le début un instrument d'impulsion de la mise en place du marché commun, a débordé largement cette matière après la consolidation de l'Union européenne et l'instauration en son sein de l'espace de liberté, de sécurité et de justice. Elle s'étend à des domaines comme la protection des mineurs, le mariage, le divorce ou les successions et cette progression sensible se poursuit. Tous ces domaines sont régis au travers du prisme de la compétence judiciaire internationale, de la loi applicable ainsi que de la reconnaissance et de l'exécution des décisions de justice. Pour certains d'entre eux, la coopération et l'assistance entre les autorités s'avèrent cruciale pour l'exécution des objectifs visés.
  2. Le processus d'unification n'ayant pas été achevé, il coexiste au sein des États membres deux systèmes de DIPr : celui créé au sein de l'Union, qui occupe la majeure partie des normes, et celui créé directement dans chaque État, qui concerne les matières non unifiées. C'est dans ce domaine restreint que les États membres conservent leurs compétences et dans lequel un ordonnancement de DIPr purement national trouve au cours des dernières années sa pleine justification.

B) Modèles de codification nationale de DIPr

33. Au cours des dernières années, les législateurs nationaux n'ont pas cessé de poursuivre la mise en œuvre de leur propre DIPr, que ce soit pour des raisons de nécessité, de tradition ou encore parce que la pleine unification du DIPr n'a pas pu être atteinte. Durant les cinquante dernières années, le DIPr a connu un essor historique avec 61 codifications nationales et plus d'une centaine de conventions internationales, de règlements et autres instruments similaires, qui confèrent tous un rôle plus important aux juges que les instruments précédents58.

L'examen des modèles de codification nationale du DIPr renvoie en premier lieu aux systèmes fondés sur une loi spéciale. Ils se sont développés surtout en Europe bien que, comme cela sera démontré59, ils ont connu un accueil favorable au Venezuela et, plus récemment, au Panama. Cette alternative de codification montre que les règles relatives au « conflit de lois » disparaissent progressivement des codes civils pour s'insérer dans des lois spéciales. Cette tendance, initiée dans le cercle des anciens pays socialistes60, va s'étendre et se généraliser à d'autres réseaux juridiques et va figurer dans les projets de codification en cours. À côté des expériences en Louisiane61 et au Québec62, il faut souligner en Europe occidentale une forte tendance à la spécialisation des règles de droit international indépendamment du lieu où elle est menée, tel que l'ont démontré la loi autrichienne du 15 juin 197863, la loi turque sur le DIPr et la procédure internationale du 20 mai 198264 et, surtout, les paradigmes de la codification moderne provenant de Suisse, de Belgique, d'Italie et de Pologne.

  1. La loi fédérale suisse sur le DIPr du 18 décembre 1987 constitue un authentique code de DIPr qui comprend 200 articles. Après un laborieux et long processus de rédaction, cette loi est considérée sans aucun doute comme le texte qui est le plus adapté techniquement aux besoins du droit privé international d'un pays en particulier. Les innovations qu'elle apporte sont nombreuses, de par leur propre structure et leur vaste contenu tout en ne se limitant pas aux seules règles de droit applicable. Les solutions qu'elle introduit, y compris les institutions qu'elle crée, se situent à la confluence entre les doctrines nord-américaines et européennes65 et vont inspirer la codification qui sera établi postérieurement en DIPr dans nombre de systèmes nationaux.
  2. De son côté la loi belge du 16 juillet 2004 a introduit un code complet de DIPr, doté de 140 articles. Il constitue une réforme profonde des règles législative, jurisprudentielle et doctrinale applicables pour régler les cas de « situation internationale », de compétence juridictionnelle des tribunaux belges, le droit applicable et l'efficacité des actes judiciaires et des jugements étrangers en matière civile et commerciale66. Ce code fournit des réponses pratiques à ces questions à travers des règles pragmatiques et flexibles, tout en fuyant les problématiques académiques. Dans un élan de modernisation, ce code a conduit à un changement important des règles traditionnelles de DIPr en reconnaissant l'importance progressive prise par le principe de proximité67 et en considérant que pour les questions liées au statut personnel le point de rattachement principal doit être la résidence habituelle aux dépens de la nationalité68. Enfin, il prend en compte les situations qui découlent de l'évolution des mœurs de la société (le mariage entre des personnes de même sexe et les unions hors mariage) et démontre un esprit internationaliste en reconnaissant automatiquement les jugements étrangers69.
  3. Les relations de DIPr en Italie sont régies par la loi nº 218, du 31 mai 1995, qui a remplacé les articles 16 à 31 des dispositions relatives à la loi et qui sont prévues en général dans le code civil. La loi italienne DIPr (Loi N° 218 du 31 mai 1995) comprend cinq titres qui regroupent 74 articles. Le titre I (« Dispositions générales ») détermine, d'un côté, les matières qui sont régies par la loi en suivant le schéma tripartite actuellement admis (détermination du ressort de la juridiction, la désignation du droit applicable et les règles d'efficacité des décisions de justice étrangères et des actes publics étrangers), et, d'un autre côté, la préférence pour les traités internationaux. Le titre II (« Juridiction italienne »), après avoir déterminé le champ de compétence juridictionnelle et ses limites, se focalise sur des questions importantes comme la prorogation et la dérogation de la juridiction, les actions réelles relatives aux biens immeubles situés à l'étranger, la litispendance d'un procès étranger et la juridiction gracieuse, les mesures conservatoires, le déclinatoire de compétence avec confirmation de la règle lex fori regit processum. Le titre III (« Droit applicable ») commence par un chapitre consacré aux problèmes généraux d'application de la règle de conflit tout en visant expressément le renvoi, l'application de la loi étrangère, l'interprétation et l'application de la loi étrangère, l'ordre public, les règles d'application nécessaire, les ordres juridiques pluri-législatifs afin de répondre à la question de la loi applicable aux apatrides et aux réfugiés et à celle des conflits positifs de nationalité. Puis, des solutions sont proposées quant à la capacité et aux droits des personnes physiques, en cas de comourants, de disparition, d'absence et de mort présumée, de capacité d'exercice des personnes physiques, de droit de la personnalité, des sociétés et des autres personnes morales. Enfin, ce titre s'intéresse aux rapports de famille en suivant le schéma classique des principes concernés en combinant les solutions relatives à la loi applicable avec celle même de la compétence juridictionnelle, et en terminant par les règles sur le régime successoral. Le chapitre relatif au patrimoine débute en traitant les droits réels et de manière approfondie les biens en transit, les droits des biens incorporels ou la publicité des actes portant sur les droits réels. Après avoir étudié les donations, le chapitre sur les obligations contractuelles s'inspire directement de la Convention de Rome et procède à une « reproduction de son texte pour référence ». Puis, des réponses sont apportées sur les questions propres aux obligations extracontractuelles. Le titre IV (« Efficacité des décisions étrangères et des actes publics étrangers ») débute en remarquant que les jugements étrangers sont reconnus en Italies sans qu'il soit nécessaire de d'avoir recours à une procédure spécifique dès lors que sont réunies un certain nombre de conditions. Après avoir exposé les règles concernant la matière, ce titre se focalise sur les actes publics délivrés à l'étranger et sur l'admission des moyens de preuves demandés par le juge étranger. Enfin la loi s'achève par les dispositions transitoires et finales habituelles.
  4. Parmi les textes les plus contemporains se trouve la loi de DIPr polonaise du 4 février 201170 qui remplace la loi du 12 novembre 1965, qui elle-même remplaçait celle du 2 août 1926. La Pologne a été pionnière des systèmes de DIPr se tournant vers une loi spéciale. Ses traits les plus importants sont les suivants : le caractère civiliste qu'il présente de façon très marquée, bien qu'il existe un inévitable traitement des questions de droit commercial : le traitement limité des problèmes relatifs à la détermination de la loi applicable, et de là, la détermination de la loi nationale comme point de rattachement dominant (article 2), bien que l'article 4 admette largement l'autonomie de la volonté dans le choix du droit applicable à condition qu'il ne nuise pas aux intérêt des tiers (article 4) : enfin, la technique de l'« incorporation par référence » ressort des textes issus de l'Union européenne, plus particulièrement en matière d'obligations contractuelles et extracontractuelles. À noter la nouveauté de l'article 67 qui inclut l'application de la loi du pays ayant le lien le plus étroit avec la situation juridique, à défaut de renvois effectués par la loi en question ou par les dispositions de l'Union européenne auxquelles il est fait référence.

34. Partant de la loi spéciale, le DIPr ne gagne pas seulement une autonomie matérielle, mais s'octroie également une législation minutieuse de la matière qui, jusqu'à ce jour, était restée dans l'orbite de la jurisprudence. Toutefois, cette technique n'est pas exclusive mais se combine avec une autre qui peut être qualifiée de « codification partielle » et qui se manifeste de trois manières principales différentes. La première, qui fait l'objet de nombreuses critiques, consiste à profiter des réformes successives du droit matériel pour introduire des règles de DIPr71. La deuxième, dont la méthode systématique peut être remise en question, consiste à utiliser toute source de réforme, matérielle ou conflictuelle, pour introduire des règles de DIPr72. Enfin, la troisième manière peut résulter de la réforme de l'ensemble des règles de DIPr éparpillées dans plusieurs corpus législatifs qui, tout en étant maintenues dans le corpus d'origine, sont modifiées harmonieusement. C'est la solution qu'avait choisie la République fédérale d'Allemagne en 1986.

À côté du modèle de la « loi spéciale », il existe encore d'autres systèmes qui utilisent les codes civils comme texte fondamental pour insérer de nombreuses dispositions de DIPr, principalement relatives au droit applicable. Cela a été la voie de codification à l'origine des règles de DIPr, y inclus les trois modèles ci-dessus mentionnés : le code civil français de 1804, le code civil du Piémont de 1865 et celui du EGBGB de 1896 ayant influencé largement le système espagnol dans le titre préliminaire du code civil de 1974. Toutefois et sans aucun doute, le « modèle » de technique de ce type est, comme cela a été indiqué, le code civil portugais de 1966, qui consacre le chapitre III du titre I de son livre I (articles 14 à 65) à régir les « Dereitos dos estrangeiros e conflictos de leis », avec une systématisation correcte et un traitement détaillé des problèmes concrets pour l'époque à laquelle il a été rédigé73. Le contexte dans lequel s'est développé le « modèle du code civil » n'est, cependant, pas propre au continent européen. Si nous nous transportons sur le continent américain et, plus précisément, dans le cercle des pays ibéro-américains, on relève l'inertie du passé avec le code civil comme siège principal des règles de DIPr surtout pour ce qui concerne le champ du droit applicable. La méthode utilisée expérimente, toutefois, diverses inflexions et par conséquent, dans certains codes civils des réformes substantielles se produisent dans la ligne des tendances actuelles du DIPr. C'est le cas de la réforme du code civil péruvien de 1984 (articles 2046 et seq.), qui a remplacé le code dénommé « Código Benavides » de 1936 et qui a consacré son livre X, qui est le dernier, au droit international privé, et a supprimé ainsi la faible marge d'action que le titre préliminaire offrait74. Une tendance qui, comme nous l'avons vu, aurait été suivie par le Québec et qui a récemment été mise en œuvre en Argentine.

35. Il convient d'exclure de l'analyse des « modèles » la codification nationale de DIPr, car elle se fonde sur des principes divers, notamment l'adoption du common law, les techniques de solution suivies dans les pays anglo-saxons. Toutefois, malgré l'incidence du common law, il convient de mentionner le travail réalisé aux États-Unis par l'American Law Institute qui, à travers les deux Restatements de 1934 et de 1969, a procédé à une systématisation et à une classification des principales décisions de justice en matière de DIPr. Malgré leur nature extrêmement doctrinale les Restatements constituent, dans la pratique, de véritables codes de DIPr qui ont exercé une influence importante ces derniers temps non seulement sur la codification des États en Europe, mais également dans la codification internationale du DIPr. Ces textes offrent un contenu substantiel divers. Le premier est très classique (très influencé par l'œuvre de J.H. Beale), il se caractérise par l'emploi de solutions d'une grande rigidité et qui ont été remises en question par la jurisprudence nord-américaine (affaire Auten v Auten, Babcock v Jackson). Cela a imposé de procéder à l'élaboration du Restatement Second, dont les solutions, qui sont des exemples de flexibilité et de réalisme, constituent l'une des pièces maitresse de nos jours pour résoudre les problèmes des relations internationales de droit privé. Le fait que de telles solutions aient pu être admises dans des systèmes si différents comme sur le continent européen, démontre qu'elles correspondent à la réalité sociétale de notre époque75.

Ces remarques servent à évaluer la situation particulière de Porto Rico. Le DIPr de ce territoire se trouve principalement dans le code civil, et de façon complémentaire, dans d'autres dispositions. Les principes du code civil correspondent à la version originale du code civil espagnol de 1889 et sont, à la fois, une juxtaposition de la position statutaire du code civil français de 1804 et conflictuelle du code civil du Piémont de 1865. Concrètement les articles 9, 10 et 11 qui figurent dans les dispositions préliminaires76, donnent une réponse au « statut personnel », au « statut réel » et au « statut formel ». En outre, le code civil en vigueur contient des dispositions de DIPr éparses entre les dispositions de droit matériel comme c'est le cas dans la dernière version de l'article 68 (non reconnaissance du mariage homosexuel célébré à l'étranger), de l'article 127 (loi applicable au régime matrimonial des mariages célébrés à l'étranger), de l'article 97 (juridiction compétente en matière de divorce), de l'article 666 (loi applicable quant à la forme du testament consenti en dehors du territoire de Porto Rico), de l'article 667 (non reconnaissance du testament conjoint consenti en dehors du territoire de Porto Rico) et de l'article 638 (lieu d'établissement et langue de rédaction du testament olographe). Les qualités et les défauts des articles 9, 10 et 11 du code civil en vigueur ont joué un rôle notable dans le DIPr portoricain et ont marqué le développement de cette matière. Ces courts articles émanent du code civil espagnol de 1889, lui-même fondé sur le code civil français de 1804, et précédemment influencés par le code civil italien77. Toutefois, lors de la révision du code civil en 1902, les membres de la commission qui en avait la charge ayant été formés au droit anglo-saxon ont décidé d' « américaniser » ces articles. De cette façon, ils ont abrogé le vieux principe civiliste de l'unité de la masse successorale et l'ont remplacé par la règle américaine lex rei sitae. En outre, ils ont supprimé un article qui aurait pu constituer le fondement pour résoudre les conflits en matière de responsabilité civile extracontractuelle. Malgré cette incursion du droit anglo-saxon, ce qui est resté des trois articles du code civil de Porto Rico n'a pas été plus déficient que d'autres dispositions similaires contenues dans d'autres codes et relatives à la famille française ou latine. Ces articles ont rempli, pendant un certain temps, la fonction escomptée, surtout celle de corriger et de suppléer la jurisprudence portoricaine, dont il sera question ci-après.

Aujourd'hui, plus de cent ans après la révision de 1902, il est évident que les articles 9, 10 et 11 du code civil ont perdu leur utilité sociétale pour se convertir en un obstacle au progrès. Il s'avère nécessaire et urgent de surmonter cet obstacle. À noter qu'il n'est pas fortuit que dans les autres législations de type romano-germanique toutes les dispositions similaires aient été remplacées par des codifications modernes de DIPr, et que cette tâche importante aurait dû être réalisée à Porto Rico depuis bien longtemps. Les articles de DIPr du code civil en vigueur étant rares, courts, elliptiques et archaïques, la Cour suprême a été contrainte de les moderniser et de les étoffer en partie. La jurisprudence portoricaine de DIPr s'est trouvée confrontée à une double dichotomie majeure : entre « ce qui est espagnol » et « ce qui est étatsunien » et entre « ce qui est codifié » et « ce qui n'est pas codifié »78. D'un autre côté, dans les domaines non visés par les dispositions de DIPr du code civil, la jurisprudence est libre de se positionner, progressivement, entre un point de vue traditionnel et un point de vue moderne de la matière, sans être limitée par des règles législatives archaïques. De même aux États-Unis, le passage d'un point de vue à un autre a débuté dans les années soixante, il a été complété dans les années soixante-dix et s'est, principalement, limité au conflit de lois dans le domaine des contrats et de la responsabilité civil extracontractuelle. L'autre dichotomie dans la jurisprudence portoricaine de DIPr s'explique par le fait que les règles établies ne couvrent pas l'éventail de tous les problèmes susceptibles de se présenter. Par exemple, ces dispositions ne règlent pas les conflits de lois en matière de responsabilité civile extracontractuelle ni la plus grande partie des conflits liés aux contrats. Du fait de cette dichotomie, la jurisprudence portoricaine a dû s'orienter dans une double direction. La jurisprudence a suivi assez fidèlement les dispositions de DIPr contenues dans le code civil, comme cela est attendu d'un pays de tradition civiliste, tout en procédant volontairement à un assouplissement de leur rigidité.

36. Toujours dans cette partie de l'Atlantique, le bilan d'évaluation du processus d'unification internationale du DIPr en Amérique latine enregistre, à son tour, une série d'informations intéressantes. Celles-ci ne sont pas statiques mais au contraire constituent les éléments marquants de faits historiques très concrets et par conséquent, sont susceptible de varier en fonction des processus de globalisation et de régionalisation de la société internationale actuelle. D'une façon générale, il convient de souligner que l'unification est un phénomène en expansion : l'expérience d'unification dans cette zone79, surtout depuis le travail considérable fourni par des institutions comme la Conférence Ibéro-américaine spécialisée de DIPr, en constitue une excellente preuve80. Ce phénomène requiert une revitalisation de l'emploi de la méthode comparative qui est une étape beaucoup plus élaborée de la connaissance du droit étranger et avec laquelle il est d'usage de le confondre81. L'approfondissement de ce qui est appelé les « unités de comparaison » et la sélection des domaines à unifier sont des éléments indispensables pour faire fructifier l'œuvre d'unification sans sacrifier l'idée de justice au nom de l'uniformité82. Nombre de grands projets d'unification sont voués à l'échec malgré les objectifs ambitieux et les intérêts en présence parce qu'ils tentent d'implanter de façon hégémonique des choix fixés arbitrairement. Et il ne faut pas perdre de vue qu'il y a incompatibilité substantielle entre le particularisme juridique et l'idée de codification83. Il s'agit d'atteindre le point d'équilibre ou de compromis adapté.

37. Dans ce contexte de comparaison, il existe en Amérique latine plusieurs modèles de législation de DIPr. Un premier groupe se caractérise par l'éparpillement du système de DIPr dans plusieurs corpus législatifs.

  1. La Colombie ne dispose pas d'un système complet et intégré de DIPr. La règlementation des différents domaines (compétence judiciaire internationale, droit applicable, reconnaissance et exécution des décisions étrangères) se trouve éparpillée dans diverses normes peu adaptées à la résolution des problèmes liés aux relations de droit international privé. À cette fragmentation et cet anachronisme du DIPr de source nationale s'ajoutent les conventions bilatérales et multilatérales dont les critères d'application ne sont pas, dans l'immense majorité des cas, clairement établis par l'instrument même. Par conséquent, il s'avère pratiquement exceptionnel de rencontrer, dans ce type d'instruments, des dispositions d'ordre spatial ce qui fragilise leur applicabilité notamment pour ce qui concerne la compétence judiciaire internationale84 et le droit applicable85. Les règles nationales, quant à elles, sont éparpillées dans tout l'ordonnancement juridique colombien et en particulier dans le code civil (Loi 57 et 153 de 1887), le code général de procédure – CGP (Loi 1564 de 2012), le code du travail (Décret-loi 3743 de 1950) el code du commerce (Décret No 410 de 1971) et quelques lois de ratification des traités et conventions internationales en la matière.
  2. Dans le système cubain, l'action des traités en la matière est limitée car le DIPr repose essentiellement sur une série de dispositions éparpillées dans le code de procédure civile, administrative et du travail du 19 août 1977, auquel le terme « économique »86 (LPCALE) a été ajouté en 2006. Des dispositions éparses existent également dans le code civil de 1987 (Loi No 59), qui est structuré de la manière suivante : a) compétence judiciaire internationale : articles 2, 3, 4 et articles 372 et 739 LPCALE87 : b) droit applicable : articles 11 à 21 et dispositions spéciales du code civil et article 244 LPCALE) : c) reconnaissance et exécution des jugements : articles 483 à 485 LPCALE. À ces dispositions il convient d'ajouter une série de dispositions sur l'élément d'extranéité dans la procédure comprises dans la LPCALE : articles 174, 230, 250, 290, 339 et 53088. Il s'agit, donc, d'un modèle de réglementation éparpillé proche de celui qui a existé en Espagne jusqu'à la fin des années quatre-vingt.
  3. Le système en vigueur au Mexique repose sur l'interaction entre les règles contenues dans le code civil et celles d'origine conventionnelle suite à une insertion massive de traités internationaux à partir des années quatre-vingt-dix. Les réformes menées à partir de 1988 dans la législation civile89, constituent la base qui a supprimé le retard législatif qui prédominait en matière de DIPr au Mexique. À celles-ci s'est ajouté le mouvement de codification qui régnait chez les puissances économiques mondiales et qui est parvenu à élaborer des corpus légaux internationaux applicables à la matière90. Cependant, ce système est toujours identifié comme un « enchevêtrement » de règles qui peut difficilement être suivi et encore moins présenter une cohérence dès lors qu'il existe des contradictions entre ce qu'énonce la règle et les autres dispositions qu'elles soient de niveau autonome ou conventionnel91.
  4. La République Dominicaine ne dispose pas non plus d'une loi spéciale régissant, au moins, le champ substantiel des problèmes liés aux rapports privés à caractère international92. Il n'existe pas de règles régissant la question de la compétence judiciaire internationale, à part les dispositions des articles 14 et 15 du code civil93 (l'article 16, relatif à la cautio iudicatum solvi, a été modifié par la loi 845, de 197894). Face à l'absence de règles expressément énoncées dans le code de procédure civile les opérateurs juridiques doivent s'en remettre à l'analyse de l'ensemble de la jurisprudence des tribunaux dominicains, qui présente un panorama relativement confus et équivoque95. Cette construction s'oriente vers deux critères de caractère général. D'une part, l'indépendance de traitement des conflits de lois et des conflits de juridictions et d'autre part, le caractère prédominant de la compétence dominicaine qui est considérée d'office comme plénitude de juridiction. Pour les tribunaux dominicains, les solutions dans ce domaine relèvent d'une large conception de la notion de compétence qui est intimement liée à la souveraineté nationale. Cela se matérialise par : i) La transposition pure et simple sur le plan international de la vis atractiva à savoir de la juridiction ordinaire établie sur le plan interne (article 59 code de procédure civile) pour ainsi faire que la compétence des juridictions nationales soit exclusive et d'exclusion face aux juridictions étrangères pour trancher les affaires civiles en République Dominicaine96 : ii) L'attribution d'office de la compétence des tribunaux dominicains peut être dérogée si les parties désignent un tribunal étranger97. Au regard du droit applicable, le système repose sur l'article 3 du code civil, dont il n'a pas été pallié aux lacunes par des dispositions ultérieures. Le caractère obsolète des règles relatives au droit applicable est dû au fait que la solution introduite par l'article3 du code Napoléon de 1804, fidèle héritière de la théorie du statut, a perduré. Le caractère unilatéral de la disposition, même si elle n'est pas radicale, a été repris par la jurisprudence dominicaine qui a admis, pour des raisons évidentes de réciprocité, l'application du droit étranger quand la demande est déposée par des non nationaux. Il convient de signaler les dispositions ultérieures qui ont été adoptées, comme la loi dite du « divorce express » (« Ley de divorcio al vapor », Loi 1306-bis relative au divorce, du 21 mai 193798, modifiée par la Loi 142 du 4 juin 1971) régissant une procédure de divorce par consentement mutuel instituée spécialement pour les étrangers ou les Dominicains ne résidant pas dans le pays. Il s'agit d'une époque révolue dont il faut tourner la page, outre les problèmes de type religieux qu'elle a suscités comme le démontre la Résolution no 3874 du Parlement national qui a approuvé le Concordat et le Protocole final signé entre la République Dominicaine et le Saint-Siège le 16 juin 1954. Il convient également de signaler la loi no 136-03 qui a créé le code pour la protection des droits fondamentaux des enfants et des adolescents, du 7 août 2003, ainsi qu'une autre disposition isolée et l'entrée en vigueur ultérieure de la loi no 489-08 sur l'arbitrage commercial. Cette dernière loi, qui s'est directement inspirée de la loi type CNUDCI sur l'arbitrage commercial de 1985, est totalement adaptée aux dispositions en faveur de l'arbitrage qui existent dans les autres ordonnancements juridiques. Enfin, la reconnaissance et l'exécution des décisions étrangères souffrent d'une grande imprécision. Par tradition, les règles sur l'exequatur contenues dans le vieux code de procédure civile99 ont continué à être appliquées, jusqu'à leur modification par la loi no 834/1978, et précisément par l'article 122 qui dispose que « Les jugements rendus par les tribunaux étrangers et les actes établis par les officiers publics étrangers sont exécutoires sur le territoire de la République dans les cas et les conditions prévus par la loi ». L'on peut s'interroger sur le maintien des règles précédentes car la loi en question ne comprend pas d'abrogation expresse et son article 142 se limite à mentionner que « toutes les lois et dispositions du code de procédure civile relatives à la matière dont traite la présente loi sont abrogées et remplacées ». Aucune prévision ne peut être faite sur une solution immédiate étant donné que la réforme du code de procédure civile de 2010 qui prévoyait de légiférer expressément sur la matière100 est paralysée. À noter que l'article 122 se limite à établir un cadre référentiel sans préciser si la demande de l'intéressé doit être traitée par la voie contentieuse, par citation de l'autre partie, ou par la voie gracieuse, inauditan partem.

38. À côté du groupe d'États qui vient d'être décrit, il existe un autre groupe, pour le moment minoritaire et auquel appartiennent le Venezuela et le Panama, qui a préféré abandonner la réglementation contenue dans le code civil pour régir la matière par une loi spéciale, comme cela est le cas dans d'autres ordres juridiques. Plus particulièrement, la loi vénézuélienne fixe le domaine de compétence, elle traite des critères pour la détermination du droit applicable et régit l'efficacité des jugements étrangers.

  1. Dans les années quatre-vingt-dix et sur l'initiative de Gonzalo Parra Aranguren et Tatiana Maekeltfue la loi de DIPr a été adoptée le 6 août 1998 et est entrée en vigueur le 6 février 1999101. Cette loi a maintenu les dispositions fondamentales du projet de 1965 et s'est adaptée aux nouvelles lois en vigueur au Venezuela ainsi qu'à la mise à jour de ses règles effectuée dans le cadre des Conférences interaméricaines spécialisées sur le DIPr (CIDIP). En outre, l'ensemble des articles de cette loi s'ajuste à l'évolution de la doctrine et de la jurisprudence vénézuélienne. L'objectif visé principalement consiste à éliminer les problèmes posés par la méthode statutaire, la rareté et l'éparpillement des règles, le recours au facteur de rattachement à la nationalité pour régir le statut personnel et le caractère hybride et antagonique de l'article 8 du code civil vénézuélien. La loi, jusqu'à l'adoption du code panaméen de DIPr en 2014, était la seule loi spéciale dans ce domaine en Amérique, et faisant le lien entre la doctrine contemporaine et le droit comparé au regard des données historiques, sociales et humaines de la réalité vénézuélienne. Cet instrument est de nature générale et expose en seulement 64 articles les règles énonçant ses principes généraux (art 1 à 15) et portant sur le droit applicable aux personnes physiques (articles 16 à 19) et morales (art 20), sur les rapports de famille (articles 21 à 26), sur les biens et les droits réels (articles 27 et 28), sur les obligations contractuelles (articles 29 à 31) et extracontractuelles (articles 32 et 33), sur les successions (articles 34 à 36), sur la forme et la preuve des actes (articles 37 et 38), sur la compétence territoriale des juridictions (articles 39 à 52 et 56 à 58), sur la coopération judiciaire internationale (article 59), sur la reconnaissance et l'exécution des décisions étrangères (articles 53 à 55) et enfin, sur les règles relatives à la condition procédurale du droit étranger (articles 60 et 61). Le choix du rattachement au domicile pour régir la capacité des personnes physiques (article 16) constitue une réforme profonde et fondamentale du système vénézuélien de DIPr, car il conduit à abandonner le lien avec la nationalité, qui est propre aux pays d'émigration soit en majorité des pays européens, pour se rapprocher des ordonnancements juridiques américains qui sont des pays d'immigration102.
  2. Le 27 août 2009, le Professeur Hernán Delgado a présenté à la Commission du Gouvernement en charge de la justice et des affaires constitutionnelles de l'Assemblée nationale du Panama, un avant-projet de loi régissant les relations de DIPr. Ce projet comprenait 190 articles et était guidé par la protection des intérêts des nationaux panaméens, la tolérance et la coexistence entre droits étrangers et compétence nationale dès lors que celle-ci régit les relations juridiques internationales. Il s'agissait donc de tenter de combler le vide juridique qui existait jusque-là en matière de systématisation dans ce domaine juridique et dont les règles étaient éparpillées dans divers textes législatifs, empêchant leur accès tant aux opérateurs juridiques qu'aux juges panaméens. Le contenu de ce travail de codification résulte de la pensée du juriste panaméen Gilberto Boutin, raison pour laquelle il est dit au Panama qu'il ne s'agit pas d'un courant « bustamantin » (en référence au code Bustamante) mais d'un courant « boutinin » vu l'influence exercée par ce juriste dans la construction du DIPr panaméen, resté fidèle au juriste cubain. Cette initiative a suivi tout le processus législatif pour donner lieu en 2012 à un projet de loi qui a conduit à l'adoption du code de DIPr de la République du Panama. Dans ce code et parmi les 189 articles que compte la version finale issue d'un complexe processus législatif, les dispositions mentionnées ci-dessus ont été remplacées par les articles 149 à 151 et la dernière disposition prévoit une période de vacatio legis de six mois. Par conséquent, la voie de la réforme aurait pu sembler ouverte. Cependant, la Constitution panaméenne, au titre du paragraphe 6 de son article 183, prévoit une spécificité qui a toute son importante en matière d'adoption législative et qui donne au président de la République le droit de s'opposer aux projets de loi. Et cette disposition spécifique a été utilisée à cette occasion103, ce qui n'arrive que rarement. Dans le même temps et plus particulièrement le 26 février 2013, la Commission du Gouvernement en charge de la justice et des affaires constitutionnelles de l'Assemblée nationale du Panama discutait de l'adoption du projet de loi sur l'arbitrage commercial national et international au Panama104 dont le rapporteur était le Professeur Raúl Hernández105. Il s'ensuivit l'adoption de la loi 131, du 31 décembre 2013, qui régit l'arbitrage commercial national et international au Panama106. Ainsi le sort de la loi de DIPr semblait être scellé, toutefois, dans les dernières années du mandat du président Martinelli et à la surprise générale, les règles sur l'arbitrage international ont été maintenues et le feu vert a été donné pour promulguer le code de DIPr de la République du Panama107. Ce code comprend 184 articles et se caractérise par sa grande conception du DIPr qui apparait dans ses dispositions (la compétence judiciaire, le droit applicable, la reconnaissance et l'exécution des décisions de justice et la coopération judiciaire internationale en matière civile). Il dépasse le cadre des législations contemporaines en élargissant son champ aux questions comme l'arbitrage international (entrant en conflit avec la loi de 2013, comme cela a été indiqué), le droit pénal, dans le sens « bustamantin » du terme et à d'autres questions comme le commerce ou la faillite internationale. La loi nationale joue un rôle important en matière de droit applicable, bien que le code reconnaisse d'une certaine manière la loi du domicile et la loi de la résidence habituelle. Il est curieux de constater que le code introduit une disposition de caractère général en DIPr mais qui va au-delà des domaines en question en énonçant de façon catégorique que « [l]e mariage entre personne de même sexe est interdit ». La polémique qu'a suscitée cet article a fait de l'ombre, dans les premiers temps de son entrée en vigueur, à l'appréciation générale du code.

C) Projets gouvernementaux et académiques

39. Selon le réseau juridique latino-américain, il est intéressant de se référer aux projets menés à bien en Amérique latine et à ceux en cours d'élaboration en DIPr dont fait partie la présente loi type.

  1. Le projet de code modèle mexicain de DIPr d'octobre 2006 présente des objectifs de codification d'une grande ambition et un formidable effort de coordination d'études préparatoires. Au moyen de ses 226 articles, il est voué à s'appliquer à toute situation ou relation susceptible d'être en lien avec un autre ordre juridique. Il détermine le champ de compétence des autorités mexicaines, il fixe les critères pour la détermination du droit applicable et régit les modalités de reconnaissance des jugements et des actes publics étrangers. Il existe de nombreux points commun entre cet instrument et la loi type, tant pour sa structure tripartite (loi applicable, juridiction compétente et reconnaissance et exécution des jugements) – même si elle est présentée dans un ordre différent, que pour le champ matériel dont il traite et la référence au domicile comme lien dominant ainsi que l'abandon du code Bustamante. Les points qui diffèrent ont été largement influencés par l'œuvre de la CIDIP dans le texte mexicain108 et surtout dans la structure fédérale du système qui est pourvu de presque trois cents lois en vigueur dont un quart conserve un lien avec le DIPr109. Si ce dernier point est résolu, l'État mexicain pourra se conformer aux dispositions de l'article 17 de sa constitution. D'où le choix d'un « code modèle ».
  2. À Porto Rico, le projet d'un livre de DIPr provient d'une proposition présentée entre 1987 et 1991 sous les auspices de l'Académie portoricaine de jurisprudence et de législation (« l'Académie »), présidée à l'époque par l'ex-président de la Cour suprême de Porto Rico, José Trías Monge. La proposition intitulée A Project for the Codification of Puerto Rican Private International Law, a été intensément débattue et amendée. Elle a été adoptée par un comité spécial de l'Académie110 auquel faisait partie Symeon Symeonides, consultant de la Commission commune, et qui proposa un projet de proposition actualisé sous le titre A Bill for the Codification of Puerto Rican Private International Law111. Malgré certaines similitudes terminologiques avec d'autres codifications, c'est un livre totalement différent et indépendant. On trouve un exemple de son universalité et de sa particularité dans un article général et supplétif qui mentionne que l'objectif du mode de détermination de la loi applicable vise à identifier et à appliquer la loi de l'État qui « a le lien de rattachement le plus significatif avec les parties et avec le litige qui les oppose […] »112. Ce livre de DIPr inclut la doctrine jurisprudentielle de Viuda de Fornaris et celle des autres affaires de la Cour suprême de Porto Rico, tout en la développant et en adoptant un point de vue moins territorial et moins quantitatif. Il s'agit d'un point de vue fondé sur l'expérience portoricaine qui reprend les meilleurs éléments des deux côtés de l'Atlantique, sans se soumettre aveuglément et automatiquement aux juridictions étatsuniennes ou espagnoles. La portée et la structure de ce livre, conformément à la tradition civiliste du code civil de Porto Rico, traite uniquement de la loi applicable aux situations présentant un élément d'extranéité. Il ne traite pas de la compétence interétatique ou internationale, ni de la reconnaissance des jugements étrangers. Ce livre se compose de quarante-huit articles ordonnés dans six titres : titre I (« Dispositions générales »), titre II (« Institutions familiales »), titre III (« Droits réels »), titre IV (“Droit des obligations et contrats”), titre V (“Des obligations qui naissent d'une faute ou d'une négligence ») et titre VI (“Droit des successions”).
  3. L'initiative législative de 2014113 s'est fixée de corriger, dans la mesure du possible, cette situation en prévoyant d'atteindre les deux objectifs suprêmes dans les relations de droit international privé qui sont la raison d'être de toute norme de droit, à savoir la justice et la sécurité juridique, ainsi que d'ajuster ses dispositions aux caractéristiques propres et aux besoins de la réalité sociale, économique et humaine de la République Dominicaine. Concrètement, il s'agit en premier lieu de résoudre les problèmes du système de DIPr, que posent les contradictions entre l'article 3, à fort contenu statutaire, et l'article 15 du code civil avec d'autres dispositions éparses dans les autres codes et lois spéciales114. Il s'agit, en second lieu, d'ajuster la législation de DIPr à la réalité sociale de la République Dominicaine et en troisième lieu d'adapter les solutions internes aux réalisations pratiques de la codification internationale, spécialement à partir des expériences issues de la Conférence de La Haye de DIPr à l'échelle mondiale et de la Conférence interaméricaine spécialisée de DIPr à l'échelle de l'Amérique latine. Tout cela doit se faire sans perdre de vue les solutions fournies par l'unification du DIPr dans l'Union européenne du fait de l'origine véritablement européenne du système dominicain. Enfin, il convient d'adapter les solutions dominicaines au développement universel de la matière ainsi qu'aux législations les plus récentes, qui sont devenues au fil du temps des instruments valables pour un développement harmonieux des relations juridiques transfrontalières. Les remarques avancées jusqu'ici permettent de tirer les grandes lignes du projet et de justifier le choix d'une loi spéciale comme technique législative adaptée et la structure tripartite de la matière régie. Cela permet également d'entrevoir les influences dans les solutions adoptées. Elle contient cinq titres : titre I (« Dispositions communes ») : titre II (« Extension et limites de la compétence dominicaine en matière civile et commerciale ») : titre III « Détermination du droit applicable ») : et titre IV (« Reconnaissance et exécution des décisions de justice et des actes publics étrangers »).

40. L'examen comparatif de l'ensemble de ces initiatives menées dans la région de la Caraïbe fait ressortir des divergences et révèle également de nombreux points communs sur lesquels la loi type s'aligne. Et ces points communs s'étendent à d'autres ambitions législatives menées avec plus au moins de succès dans l'hémisphère américain.

  1. Parmi celles-ci figure le processus difficile mené en Argentine qui propose d'insérer dans le code civil un livre VIII comprenant des règles de DIPr relatives à la compétence judiciaire internationale et au droit applicable115. Le projet ne traite pas des problèmes de reconnaissance et d'exécution des décisions judiciaires et extrajudiciaires rendues à l'étranger. Ses défenseurs reconnaissent qu'il répond : a) à une conception de la politique législative très fortement tournée en Argentine vers le processus d'intégration : b) à un engagement juridique et éthique pour la « garantie et la protection des secteurs faibles de la société » : et c) à la coordination imposée par le droit conventionnel dont il n'est pas possible de s'écarter116. Le projet se compose de 130 articles auxquels s'ajoutent deux dispositions contenant les dispositions transitoires. Ces articles sont divisés dans quatre titres. Le premier titre (articles 1 à 16) donne une réponse aux problèmes généraux de DIPr par des « Dispositions générales » qui traitent de l'objet, du champ d'application du projet et des questions traditionnelles en la matière. Le titre II dispose des règles sur la compétence judiciaire au moyen de quatre chapitres à savoir « Dispositions générales », « Compétence spéciale », « Compétence exclusive » et « Litispendance internationale ». Le titre III s'intéresse aux règles de droit applicable et se divise en quinze chapitres qui traitent des divers domaines systématisés comme la « personne humaine », les « personnes morales de droit public », les « personnes morales de droit privé et les sociétés », les « actes juridiques », les « contrats », les « titres », les « obligations alimentaires », la « responsabilité extracontractuelle », les « droits réels », les « droits d'auteur », les « rapports de famille », la « protection des incapables majeurs », les « successions », l'« insolvabilité et la « prescription ». Enfin, le titre IV comprend les « Dispositions transitoires »117.
  2. Il convient également dans tout processus de codification interne en Amérique latine de mentionner le projet de loi générale de DIPr élaboré en Uruguay118. Comme cela est indiqué dans l'exposé des motifs, cette initiative a des objectifs modérés quant au contenu de la matière. Il s'agit de mettre à jour les règles de source nationale en les harmonisant avec les règles de source internationale ayant été ratifiées en Uruguay ou auxquelles le pays a largement participé au travers de ses délégations. Le tout également sans préjudice des dernières réglementations de source nationale adoptées en droit comparé afin d'éviter un isolement inutile. L'influence qu'a eue sur lui l'œuvre codificatrice de la CIDIP est même supérieure à celle opérée dans le cas du Mexique. L'influence des Conventions de La Haye de DIPr est très importante aussi. Le projet vise à remplacer l'actuel appendice du code civil et comprend trois domaines fondamentaux. Le premier porte sur les principes généraux et contient trois thèmes : les indicateurs qui doivent régir la mécanique de l'application de la règle de conflit, l'incidence de la spécificité du droit commercial international dans ce domaine et la définition du domicile comme l'élément de rattachement personnel fondamental, tel que cela a toujours été le cas. Ce premier thème est innovant au regard des normes de conflit de source nationale mais pas au regard de celles de source internationale. Le second thème a pour objet la loi applicable aux catégories juridiques posées comme références du système et le troisième thème porte sur la compétence dans la sphère internationale des tribunaux nationaux. Il est constitué des normes unilatérales, qui relèvent des modes d'attribution de compétence.

41. Le panorama s'avèrerait incomplet s'il ne faisait pas référence à quelques exemples de codification privée menée en Amérique latine en matière de DIPr.

  1. En Colombie, la proposition de créer un corpus normatif homogène ou une loi regroupant et complétant les règles de DIPr qui sont actuellement dispersées dans l'ordre juridique colombien s'explique119 non seulement par la nécessité de promouvoir son unification mais également d'organiser de façon systématique le grand nombre de règles de ce type qu'il contient. C'est la raison pour laquelle il est apparu impératif qu'un projet vienne proposer une unité normative, dont l'objectif primordial est d'effectuer les ajustements pertinents pour adapter la législation nationale aux pratiques internationales actuellement en développement dans le contexte mondial et ainsi intégrer des règles de type conventionnel et multilatéral en vigueur dans cet ordonnancement juridique. Cette tâche a été menée à bien par le professeur José Luis Marín Fuentes de l'Université de Medellín qui a élaboré le projet de loi générale de droit international privé pour la Colombie120. Il prévoit, entre autres, de a) unifier dans un seul corps normatif les différentes règles de droit international privé qui se trouvent non seulement dans différents codes mais également dans les textes conventionnels ratifiés par la Colombie : b) disposer d'une règlementation de la matière plus claire, plus précise, plus cohérente et mieux ordonnancée, facile à consulter, à comprendre et à appliquer : c) faciliter l'ouverture juridique au champ international, en recherchant à adapter le droit international privé colombien aux changements actuels qui interviennent dans le domaine juridique, social et commercial international : d) défendre un développement harmonieux des relations de droit international privé, ainsi que les mouvements migratoires et commerciaux dans la sphère internationale : e) clarifier les dispositions légales actuelles, et dans le même temps énoncer des règles plus simples et plus précises pour régir les domaines complexes de cette discipline : f) rendre toute cette information plus accessible à toutes personnes ayant un intérêt direct ou indirect pour la matière, sans en importer les spécificités dont elles relèvent : g) diffuser et développer la science du droit international privé dans le domaine juridique colombien, en recherchant par là même un développement harmonieux de ses règles avec celles qui font partie de l'ordonnancement juridique national. La structure du projet est la suivante : après un chapitre consacré aux « Dispositions générales » il est question, dans un premier temps, des problèmes d'application de la règle de conflit, de la compétence judiciaire internationale et de l'efficacité des jugements étrangers, pour s'achever en précisant les éléments de rattachement en insistant plus particulièrement sur la résidence habituelle. Dans un second temps, le projet s'attache à régir les institutions concrètes comme les personnes physiques, le mariage, les donations, la filiation, l'adoption, les aliments, la protection des mineurs, la disparition, l'absence et la mort présumée, les successions, les personnes morales, les sociétés commerciales, les biens, les obligations contractuelles et non contractuelles, la responsabilité civile extracontractuelle, la propriété intellectuelle, l'insolvabilité, les titres et la prescription. Le projet se conclut par un ensemble de dispositions finales. Il est actuellement en cours de discussion par la communauté scientifique colombienne.
  2. Hors de la zone caribéenne, la Bolivie a publié la première version d'un projet dont l'auteur est Fernando Salazar-Paredes et qui suit de très près les lignes générales de la loi de DIPr vénézuélienne de 1998. Durant l'année 2005, la Faculté de Droit de l'Université Privée de Santa Cruz de la Sierra a reçu une demande de l'auteur sur le projet pour débattre les divers pans du projet comme cela a été le cas le 11 mai 2005 sur « L'avant-projet de la loi de droit international privé bolivien ». Dans le chapitre I (« Dispositions générales »), après avoir énoncé le champ d'application de la loi, le projet traite des problèmes techniques d'application qu'impliquent la solution des conflits de lois reprenant l'essentiel des principes de la Convention interaméricaine sur les normes générales de droit international privé que la Bolivie a signé en 1984. Le chapitre II (« Du domicile ») fixe le régime du domicile des personnes physiques et des personnes morales comme mode de détermination du droit applicable ou de la compétence des juges ou des tribunaux. Après avoir traité de l'établissement du lieu de domicile des personnes en général, il s'oriente ensuite vers les cas spéciaux comme le domicile conjugal, celui des mineurs et des incapables majeurs et, enfin, les cas où le domicile de la personne ne peut pas être pris en compte. Le concept général de domicile, dans le cadre de la loi, est dénommé « résidence habituelle » ce qui s'avère facile à vérifier tout comme les domiciles spéciaux, parmi lesquels figure celui de la femme mariée qui se voit attribuer pleine autonomie juridique par rapport au domicile du mari. Le chapitre III (« Des personnes”) définit le droit applicable à l'existence, à l'état et à la capacité des personnes physiques et morales. Le chapitre IV (« Des personnes morales ») traite de l'action extraterritoriale des personnes morales de droit public comme de droit privé. Le chapitre V (« De la famille ») détermine le droit applicable à la validité et à la preuve du mariage, y inclus les conditions du mariage à distance et du mariage consulaire, et énonce une énumération des empêchements d'ordre public international conduisant à ne pas reconnaitre les mariages célébrés à l'étranger qui contreviendraient aux principes fondamentaux de l'ordonnancement juridique bolivien. De même, le texte régit le droit applicable aux unions hors mariage, et aux effets personnels et patrimoniaux du mariage y compris les conditions de reconnaissance des contrats de mariage passés à l'étranger. De même, le texte régit le régime juridique applicable au divorce et à la séparation, à l'établissement de la filiation, aux règles applicables à l'adoption internationale ou étrangères et ce qui se réfère à la tutelle et autres protections des incapables, tout en se référant expressément aux problèmes posés par l'enlèvement des enfants et au trafic international des mineurs. Concernant le droit patrimonial, le chapitre VI (« Des biens »), dans la première section se réfère aux droits réels et dans la deuxième section aux droits d'auteur. Quant aux « obligations » traitées dans le chapitre VI (et plus particulièrement dans le cas d'obligations contractuelles), le texte a tenté de résumer dans un ensemble de dispositions les orientations prises par la Convention interaméricaine sur le droit applicable aux contrats internationaux du Mexique de 1994, signée par la Bolivie. Le chapitre VIII (« Des successions ») détermine la loi du domicile du de cujus comme étant celle applicable aux successions. De même, la capacité de tester ou de révoquer un testament est soumise au droit le plus favorable entre celui du domicile et celui de la nationalité du testateur. Le chapitre IX (« De la forme des actes et du pouvoir de représentation ») propose une réforme nécessaire relative à la forme des actes en marquant la différence entre la loi qui impose une forme, celle qui la règlemente et enfin celle qui considère qu'elle présente une équivalence d'effets. Le projet s'intéresse également à certaines questions propres au droit des affaires internationales. Ainsi, le chapitre X (« Des titres cambiaires ») fixe le régime intégral du droit applicable aux titres cambiaires internationaux relatif au vide juridique qui existe dans ce domaine dans la législation bolivienne actuelle. Le chapitre XI (« De l'insolvabilité ») prévoit que les procédures d'insolvabilité sont régies par le droit de l'État dont relève le tribunal qui est saisi, et quant à la « prescription », le chapitre XII considère qu'elle est la cause d'extinction et d'acquisition de droits et propose de rattacher le droit applicable à la prescription à celui des droits et obligations auxquels elle se réfère. Les questions de compétence judiciaire internationale sont traitées au chapitre XIII (« De la compétence judiciaire »). La première section commence par accepter la prorogation de juridiction expresse ou tacite en matière patrimoniale, sauf si les juridictions de la République ont compétence exclusive. De même, elle traite de la notion de « for de nécessité ». Ensuite, la deuxième section prévoit spécifiquement la compétence internationale dans diverses situations. Quant à l'« efficacité des jugements étrangers », le chapitre XIV dispose que les jugements et autres décisions de justice rendus à l'étranger auront, en Bolivie, la force qui leur est reconnue par les traités respectifs. Enfin, concernant le chapitre XV (« De la procédure »), le projet de loi prévoit que la compétence et la forme de la procédure seront régies par le droit e l'autorité devant laquelle elle se déroulera. Le déclinatoire de compétence du juge ou des juridictions boliviennes au profit du juge ou des juridictions étrangères pourra être déclaré d'office, ou à la demande d'une partie, à tout moment et degré de l'instance121.

D) Participation limitée dans la codification internationale

42. Depuis le début de l'OEA, les États américains ont réaffirmé que la meilleure contribution pour la paix est le respect du droit international public. En ce sens, la Charte de l'organisation dispose que « le droit international est la norme de conduite des États dans le cadre de leurs relations réciproques » et que l'ordre international est constitué, entre autres, « par l'exécution fidèle des obligations nées des traités et des autres source de droit international ». Parmi les matières sélectionnées pour la codification, dans le contexte interaméricain il peut être fait mention de la Convention sur les traités de la Havane en 1928 et les règles sur les réserves, qui ont été reprises postérieurement par la jurisprudence de la Cour internationale de Justice et par la Convention de Vienne sur le droit des traités. À partir de là, l'orientation vers l'application prioritaire des traités internationaux de DIPr devient prédominante dans la majorité des systèmes latino-américains122, et plus précisément dans les États qui sont membres de la Conférence de La Haye de DIPr qui se sont inspirés de la conception « moniste » quant à l'intégration des traités dans les ordres juridiques internes123. De même, à l'exception du Venezuela, ces États sont signataires de la Convention de Vienne de 1969 sur le droit des traités, ce qui conduit à une certaine unicité dans ce domaine124 hormis ses limites. Dans le cadre de la CIDIP, il est également fait expressément référence à l'application des normes de conflit, ce qui produit un effet didactique à l'encontre surtout du juge125. Ce n'est pas en vain que l'article 1 de la Convention interaméricaine sur les règles générales de DIPr de 1979 dispose que la « détermination de la règle de droit applicable pour régir les situations liées au droit étranger sera fixée par les dispositions de la présente convention et des autres conventions internationales qui ont été ou qui seront signées dans le futur de façon bilatérale ou multilatérales par les États parties. » Il ajoute qu'à défaut de traité « les États parties appliqueront les règles de conflit issues de leur droit interne »126. Le DIPr de source nationale se voit donc octroyer un rôle supplétif, et si cela semble évident pour certaines règles législatives internes, comme l'art 20 du code civil cubain de 1987 ou l'article 12 du code civil mexicain de 1987, cela ne l'est pas dans d'autres. Le cas de l'article 2047.1° du code civil péruvien de 1984 est singulier en ce sens car il exige la « pertinence » des traités internationaux « ratifiés » par le Pérou, « et dans le cas où ils ne le seraient pas » le livre X du code s'appliquera.

Nonobstant, la solution aux questions de l'insertion des règles de DIPr d'origine conventionnelle est déterminée dans sa généralité par les textes constitutionnels ou les dispositions préliminaires des codes civils, qui rendent parfois difficile une telle insertion et posent des problèmes de hiérarchie interne des règles internationales127. Et ce, dès lors que nous ne sommes pas en présence de conventions qui, par leur faible usage, leur ancienneté ou par leur caractère récent, se trouvent méconnues du juge128.

43. Au jour d'aujourd'hui, le processus d'intégration en matière de DIPr en Amérique latine repose sur les traités internationaux et sur ce point de nombreuses divergences existent dans la zone. Le système interaméricain comprend un cadre normatif suffisant quant aux Conventions relatives à la coopération juridique et judiciaire et à l'assistance mutuelle, et couvre tant le droit de la procédure que le droit de la famille, toutefois ce système ne s'applique pas suffisamment à la zone OHADAC. L'application effective de la coopération judiciaire dans ce cadre passe par la création d'un réseau d'autorités centrales et de fonctionnaires gouvernementaux comme le requièrent les conventions. Il conviendrait d'offrir aux autorités centrales les instruments nécessaires pour assurer correctement leur fonction et une communication sûre et efficace, ainsi que pour favoriser les investigations en matière de coopération judiciaire en Amérique latine. En effet, définir un cadre légal stable de coopération judiciaire requiert de connaitre préalablement et en profondeur la réalité de la situation quant aux normes concernées.

Dans la communauté latino-américaine, il existe des modèles qui présentent des problèmes similaires d'interaction entre les processus de production normative, posés par la coexistence de normes entre le code civil, et ses différentes versions qui portent sur le DIPr (napoléon, allemand, chilien et argentin), et la réglementation d'origine conventionnelle129. Le cas le plus significatif est celui du Mexique qui, après une longue période d'opposition au régime conventionnel pour régir les relations de droit international privé, a entamé à partir de 1975 une politique d'insertion des traités internationaux, particulièrement multilatéraux, ce qui a posé à ce pays de nombreux problèmes d'interaction avec l'ordre juridique interne130. Ces problèmes ont été, en quelque sorte, assez proches de ceux qui se sont posés en Espagne après les changements de régime politique à la même époque. Parmi les autres modèles, il convient de signaler le rôle des « Traités de Montevideo »131, nés de l'euphorie codificatrice supranationale qui s'est manifestée dans les Républiques latino-américaines à la première heure de leur indépendance et qui ont eu une influence fondamentale sur le DIPr. Qu'il s'agisse de la polémique sur la loi de la nationalité et celle du domicile comme toile de fond132, ou bien du « code Bustamante », cela confère une singularité au système de codification internationale de DIPr en Amérique latine.

E) Répercussion de l'œuvre de la Conférence de La Haye de DIPr

44. Les Conventions de La Haye de DIPr ont été élaborées dans une double perspective : d'une part, fournir un cadre juridique aux échanges privés internationaux qui impliquent des personnes, des familles ou des entreprises, ce qui offre un certain degré de certitude dans les solutions : d'autre part, faciliter la résolution ordonnée et efficace des litiges transfrontaliers, la bonne gouvernance et l'État de droit dans le respect de la diversité des traditions juridiques133. À cela peut s'ajouter une fonction importante comme celle de constituer un soutien un instrument d'appui essentiel dans l'intégration régionale134.

Au cours des dernières années, le nombre d'États membres de la Conférence de La Haye a pratiquement doublé. Aujourd'hui presque cent cinquante États de la communauté internationale participent en tant qu'États parties à des conventions issues de cette institution. Cela démontre qu'il existe une demande croissante de la part des gouvernements pour la formation spécialisée et le conseil. Un tel soutien est très souvent essentiel pour assurer les objectifs des différentes conventions, comme la protection des enfants ou des adultes qui requièrent une mise en œuvre et un contrôle spécial et continu.

Malgré son importance indiscutable, la répercussion de l'œuvre de la Conférence de La Haye de DIPr en Amérique latine135 et, en particulier dans la zone de la Caraïbe, a été très limitée hormis le cas du Mexique ou du Venezuela136 et des territoires liés à la France, aux Pays-Bas et au Royaume-Uni. Au cours des dernières années, le groupe caribéen a augmenté suite à l'entrée du Costa Rica en 2011 ainsi que d'autres pays d'Amérique latine comme le Paraguay en 2005, l'Équateur en 2007, à l'issu du Programme spécial pour l'Amérique latine de 2005.

Cette ouverture a l'avantage de permettre aux représentants de ce groupe de pays de débattre en espagnol, même si cette langue n'est pas encore parvenue à devenir une véritable langue de travail. Pour sa dix-huitième session, à l'occasion de la Conférence relative à la compétence, à la loi applicable, à la reconnaissance, à l'exécution et à la coopération en matière de responsabilité parentale et des mesures de protection des mineurs d'octobre 1996, l'invitation adressée à ce groupe pour participer aux débats en tant qu'observateurs a été réitérée donnant lieu à l'assistance de représentants de la Colombie, du Costa Rica, de l'Équateur, du Paraguay et du Pérou.

45. Depuis 2004 et en vue de soutenir l'application effective et généralisée de ses conventions, la Conférence de La Haye a développé une politique d'expansion tournée vers les expériences d'intégration régionale en Amérique latine, en Europe de l'Est, dans la région de l'Asie-Pacifique et dans toute l'Afrique. Pour ce faire, elle a déployé un vaste programme d'activités au niveau régional qui encourage la coopération et la coordination entre les États ayant des liens particuliers sur le plan culturel, géographique et linguistique. En retour, il s'agit de faciliter une adaptation plus effective des Conventions de La Haye à la culture juridique et, en particulier, à des domaines partagés entre les États d'une région. Suite aux conclusions et recommandations adoptées en décembre 2004 et au cours du Séminaire des Magistrats latino-américains de la Convention de La Haye sur l'enlèvement international d'enfants mineurs en 1980, le Bureau permanent a pris très au sérieux le besoin de renforcer le fonctionnement des Conventions de La Haye en Amérique latine et de promouvoir la participation des États de cette région aux travaux de la Conférence de La Haye.

Cette initiative a donné lieu à la mise en place en 2005 d'un Programme spécial pour les États d'Amérique latine auquel ont collaboré les gouvernements argentin, étatsunien et espagnol et auquel ont contribué de nombreux autres États dans le cadre du budget supplémentaire géré par le Centre International d'études judiciaires et d'assistance technique de la Conférence de La Haye. Principalement, les objectifs de ce programme tendent à encourager : a) la participation des agents régionaux et des États dans les travaux de la Conférence de La Haye; b) la création de réseaux entre les organismes, les autorités centrales, les magistrats du Réseau de La Haye, les organisations internationales et le milieu universitaire : et, c) l'accès à l'information quant à la Conférence de La Haye aux acteurs de la région, en incitant la connaissance et les bonnes pratiques issues des Conventions de La Haye. Ce programme vise également à rassembler l'information et à mener une investigation dans la région conformément aux besoins du Bureau permanent, afin d'aider au développement des outils et des guides de la Conférence de La Haye (v.gr., INCADAT, INCASTAT, iChild, e-APP et des guides de bonnes pratiques, entre autres) pour les personnes et les organismes en charge de l'application des Conventions de La Haye. Il a aussi pour but de développer et d'encourager le travail de la Conférence de La Haye en espagnol et de coordonner l'assistance technique à destination des États d'Amérique latine en proposant des formations et des séminaires pour les juges les fonctionnaires gouvernementaux, l'autorité centrale et les autres fonctionnaires et professionnels chargés de l'application des conventions de La Haye.

De façon permanente, les fonctionnaires, les juges, les professionnels et les universitaires de la région sont désormais en contact avec le Bureau de l'Amérique Latine, qui, soit leur répond directement, soit oriente les demandes exprimées vers le Bureau permanent. De même, de nombreuses demandes effectuées à partir du Bureau permanent de la région sont orientées vers le Bureau de l'Amérique qui sert de source d'information et de canal régional pour de nombreuses initiatives émanant de niveau global et qui sont traitées par le Bureau permanent.

Il est difficile d'évaluer avec précision les résultats d'un programme dont la portée n'a cessé d'augmenter d'année en année et qui est entièrement lié au fonctionnement du Bureau permanent. Plus particulièrement, le personnel du Bureau permanent a été très impliqué et/ou a directement participé à de nombreuses activités qui ont été rapportées dans le présent document. Toutefois, nous tentons de montrer quelques avancées concrètes qui se sont produites dans la région au cours des sept dernières années et qui sont directement liées au travail mené par le Bureau de l'Amérique latine.

La participation des États d'Amérique Latine aux activités de la Conférence de La Haye s'effectue au travers du Bureau de l'Amérique latine et comprend la distribution de questionnaires, la traduction de documents préliminaires en langue espagnole, l'envoi de documents et le financement de voyages pour faciliter l'assistance aux évènements. Ce Bureau facilite la participation des délégués de la région aux réunions internationales, aide les délégués et les experts à obtenir des informations importantes et encourage le dialogue régional par des conférences téléphoniques, des réunions régionales, la préparation de propositions conjointes et de documents de travail pour les réunions mondiales.

46. Malgré ce qui précède, il n'en demeure pas moins que les instruments en vigueur dans la zone OHADAC, même s'ils sont limités, se réfèrent à des questions comme la légalisation, la procédure civile, l'enlèvement d'enfants mineurs et, compte tenu des spécificités de cette matière, l'adoption internationale137. Et cette situation n'a guère varié substantiellement même si, au cours des dernières années, le Costa Rica et la République Dominicaine ont intégré la Convention du 5 octobre 1961 sur l'apostille et la République Dominicaine et Cuba ont signé la Convention du 29 mai 1993 relative à la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. De même, la République Dominicaine est partie à la Convention du 19 octobre 1996 relative à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesure de protection des enfants.

À l'insuffisance constatée du nombre d'instruments limité qui régissent la matière, s'ajoute le manque d'un véritable développement des mécanismes d'assistance judiciaire internationale et de coordination entre les autorités extrajudiciaires afin de permettre aux acteurs juridiques d'atteindre les principes énoncés dans les Conventions. En d'autres termes, l'application de ces instruments est coûteuse et constitue souvent un point de départ vers une adaptation sur le plan interne, mais elle n'est en aucun cas un apport autosuffisant permettant de résoudre les problèmes liés au droit international privé. D'où la nécessité de veiller, lors de l'entrée d'un État, à anticiper les problèmes éventuels que poserait son application dans l'ordre juridique interne, et qui très souvent requiert une dotation budgétaire très importante138.

Une troisième limite porte sur la politique de blocs qui existe dans la Conférence de La Haye et qui se traduit par une relativité spatiale quant à l'efficacité des Conventions qui en découlent, et tel que cela apparait au sein du « Groupe européen de DIPr » et même de l'UE. Non seulement ce groupe déploie une influence ad extra à la propre Conférence mais en plus, il se trouve inévitablement dans une position de force extrême au sein même de la Conférence. Pour le moment, cette position se concentre de préférence dans le domaine patrimonial, mais les champs de compétence étendue en matière de coopération judiciaire civile que le « Troisième pilier » défini par Maastricht apportent, et les nouvelles possibilités d'harmonisation du droit de la famille en Europe, peuvent constituer un nouveau facteur de particularisme régional et, par conséquent, d'éloignement.

47. Enfin, les tâches codificatrices menées des deux côtés de l'Atlantique sur la même matière risquent difficilement de se rejoindre à cause du jeu des clauses d'adhésion insérées dans les Conventions spécifiques aux « conflits de lois ». En effet, certains de ces instruments émanant de la Conférence de La Haye depuis 1961 contiennent des clauses d'application universelle qui excluent toute condition de réciprocité. Si cela est, sans aucun doute, propice à l'unification des normes de conflit, cela peut également conduire à faire obstacles aux relations de DIPr outre les problèmes d'interaction qui peuvent surgir entre des règles de DIPr de source nationale et leur application inappropriée par les juridictions. Cette situation peut empêcher un État lié par une Convention erga omnes d'adhérer à une autre Convention de ce type portant sur la même matière139 ou de définir ses propres stratégies de DIPr national.

Il existe, au contraire, d'importants facteurs de rapprochement. L'un d'eux, comme l'on peut s'en douter, consisterait à adopter l'espagnol comme langue de travail. Au départ, la seule langue officielle était le français, puis avec l'entrée des États-Unis d'abord comme observateur puis comme État membre, l'anglais a été ajouté, bien qu'au départ le texte français des conventions prévalait en cas de litige. Cette situation, qui va à l'encontre du caractère universel de cette organisation et qui peut être justifiée pour des raisons économiques évidentes, est loin d'être apaisée140. Un autre facteur de rapprochement, même s'il peut paraitre peu pertinent, est la traduction en espagnol des conventions à partir de la langue commune partagée par tous les pays hispano-américains. Bien entendu, les textes des conventions émanant de la conférence ne feraient foi qu'en français et en anglais. Cette question n'est pas nouvelle dans la conférence car l'Allemagne, l'Autriche et la Suisse ont présenté un texte commun en ce sens et indubitablement traiter cette question éviterait que d'horribles traductions privées prolifèrent et favoriserait l'application des conventions par les États membres en évitant de voir circuler leur traduction dans diverses versions linguistiques141. Après une série d'initiatives informelles, deux réunions des délégués de la langue espagnole se sont tenues à La Haye en 1989 pour débuter les travaux préparatoires de révision des textes dans cette langue. L'année suivante et sous les auspices du Ministre des affaires étrangères espagnol, une nouvelle réunion s'est tenue à Madrid afin d'asseoir les bases définitives d'une future traduction unifiée des Conventions de La Haye en espagnol142.

F) Répercussion de l'œuvre de la CIDIP

48. Le processus de codification du DIPr dans le contexte interaméricain a été l'une des activités juridiques permanentes des États de la région depuis les dernières décennies du XIXème siècle. Ce travail a été assuré par diverses institutions et depuis quelques années ce sont les Conférences interaméricaines spécialisées sur le DIPr (CIDIP) qui s'en sont chargées. Une fois cette nouvelle étape de codification en Amérique entamée, les efforts se sont concentrés, d'une part, sur la coordination pour ne pas adopter d'instruments contradictoires, et d'autre part, sur le compromis à faire entre l'influence mutuelle exercée par les divers processus en présence et tout particulièrement par celui né de la conférence de DIPr de La Haye.

Les débuts de cette Conférence ont été marqués par la Charte de Bogota approuvée en 1948 et à laquelle il faut impérativement se référer. Cette conférence a créé un Conseil interaméricain de jurisconsultes dont la mission consistait notamment, dans la mesure du possible, à encourager l'uniformisation des législations américaines. La troisième Conférence interaméricaine qui s'est tenue à Buenos Aires en 1967, a décidé de transférer les compétences du Conseil à un autre organisme, le Comité juridique interaméricain (CJI)143, qui a pour mission de « promouvoir le développement progressif et la codification […] du droit international […] et d'étudier les problèmes juridiques relatifs aux pays du continent qui sont en développement ainsi que la possibilité d'uniformiser leurs législations quand cela s'avèrera opportun » (article 105 de la Charte OEA). Dans les années cinquante, les organismes techniques de l'OEA ont déployé des efforts pour harmoniser les critères de choix du droit applicable prévus par le code Bustamante avec ceux contenus dans les Traités sud-américain de DIPr et le Restatement of the Law of Conflicts of Laws élaboré par le American Law Institute. Toutefois, ces efforts n'ont pas connu le succès escompté. Même un projet de code élaboré par le CJI n'a pas reçu le soutien des États membres de l'organisation. Cela a conduit le CJI à abandonner l'objectif de codification globale de cette discipline juridique et à entamer une deuxième étape, marquée par la codification sectorielle du DIPr. Pour ce faire, il fallait explorer d'autres possibilités qui consistaient concrètement à élaborer une série d'instruments sur les relations de droit international privé et portant sur les aspects les plus importants d'ordre tant matériel que procédural. En 1971, l'assemblée générale de l'OEA a décidé de convoquer la première Conférence interaméricaine spécialisée de DIPr (CIDIP-I)144, qui s'est tenue dans la ville de Panama du 14 au 30 janvier 1975, et a ouvert un important travail de codification du DIPr sur le continent américain.

Les CIDIP ont constitué, au cours des dernières années, le moyen le plus employé pour traiter des questions de DIPr et ont emporté un certain succès. L'une des caractéristiques principales des CIDIP est que les thèmes qu'elles proposent sont définis par la CIDIP précédente au titre des recommandations. Ces thèmes sont alors étudiés en réunions d'experts qui analysent les aspects du DIPr les plus pointus.

49. La présentation incontournable du panorama de l'œuvre de la conférence démontre ce qui suit. La CIDIP-I, qui s'est tenue dans la ville de Panama en 1975, a adopté six conventions sur le commerce international et le droit de la procédure, à savoir : la Convention interaméricaine sur les conflits de lois en matière de lettres de change, billets à ordre et factures, la Convention interaméricaine en matière de chèques, la Convention interaméricaine sur l'arbitrage commercial international, la Convention interaméricaine sur les commissions rogatoires, la Convention interaméricaine sur les conflits de lois sur l'obtention des preuves à l'étranger, la Convention interaméricaine sur le régime juridique des procurations à employer à l'étranger145. La IIème Conférence s'est tenue à Montevideo en 1979, et elle a également enregistré d'importants résultats. En effet, elle a donné lieu à huit convention de codification à savoir : la Convention interaméricaine sur les conflits de lois en matière de chèques, la Convention interaméricaine en matière de sociétés commerciales, la Convention interaméricaine sur l'efficacité extraterritoriale des décisions et sentences arbitrales étrangères, la Convention interaméricaine sur l'exécution des mesures de protection, la Convention interaméricaine sur la preuve et l'information relative au droit étranger, la Convention interaméricaine sur le domicile des personnes physiques en DIPr, la Convention interaméricaine sur les normes générales de DIPr, et le Protocole additionnel à la Convention interaméricaine sur les commissions rogatoires. La IIIème Conférence a été convoquée à La Paz en 1984, et a présenté des résultats plus que modestes : la Convention interaméricaine sur les conflits de lois en matière d'adoptions des enfants mineurs, la Convention interaméricaine sur la personnalité et la capacité des personnes morales en DIPr, la Convention interaméricaine sur la compétence internationale pour l'efficacité extraterritoriale des décisions étrangères, et le Protocole additionnel à la Convention interaméricaine sur l'obtention des preuves à l'étranger. Montevideo a été le siège de la IVème Conférence, qui s'est tenue en 1989 et qui a adopté la Convention interaméricaine sur la restitution internationale des enfants mineurs, la Convention interaméricaine sur les obligations alimentaires, et la Convention interaméricaine sur les contrats de transport international de marchandises par route. La CIDIP-V s'est tenue dans la ville de Mexico en 1994 et a adopté la Convention interaméricaine sur le droit applicable aux contrats internationaux et la Convention interaméricaine sur le trafic international d'enfants mineurs. Une crise institutionnelle s'est produite et la CIDIP-VI, tenue au siège de l'OEA à Washington DC en 2002, a adopté la loi type interaméricaine sur les garanties mobilières, la lettre de transport directe uniforme négociable interaméricaine pour le transport de marchandises par la route, et la lettre de transport directe uniforme non négociable interaméricaine pour le transport de marchandises par la route. Enfin, la septième Conférence de DIPr (CIDIP-VII) a été convoquée en juin 2003 et a donné lieu à l'approbation des questions sur la protection du consommateur et les registres électroniques.

La CIDIP a fait montre d'un extraordinaire réalisme du fait qu'elle a eu une vision juste et ce malgré la tradition commune américaine et la préexistence d'un travail de codification important. Elle a opté pour le rejet clair d'une codification commune du DIPr pour se pencher sur des aspects concrets d'intérêt pour les relations de droit international privé des États parties. Nous sommes face à ce que l'on pourrait appeler une « décodification » du DIPr conventionnel146. D'autre part, et inévitablement, un certain mimétisme de la Conférence de La Haye de DIPr a été opéré dans les techniques de codification et dans la manière de traiter les problèmes concrets147. Il est probable que l'appartenance de plusieurs pays américains à la Conférence de La Haye, qui a une vocation universelle, explique l'influence qu'elle a eue sur cette œuvre de codification parallèle. Toutefois, une telle similitude n'existe pas quant à l'agenda de travail et à la matière codifiée. Alors que la Conférence de La Haye porte sur le « contenu » stricto sensu du DIPr, dans la CIDIP ce contenu est bien plus important, car il intègre des questions propres au droit du commerce international (lettres de change, billets à ordre, factures, chèques, arbitrage, sociétés commerciales et transport international et marchandises par la route)148 et montre une tendance expansive dans le ressenti de certaines délégations. Dans tous les cas et tout comme pour la Conférence de La Haye149, les plus grands succès du point de vue de l'adhésion des États aux Conventions ont été enregistrés dans le domaine du droit de la procédure civile internationale et, en particulier dans le champ de l'assistance judiciaire internationale.

Il convient de souligner que les travaux de la CIDIP mettent au jour le rôle très marqué de trois pays (le Mexique, le Venezuela et l'Uruguay), le reste étant limité à une action relativement passive qui se traduit par une distorsion entre l'effort codificateur réalisé et le nombre d'États ayant adhéré aux conventions qui ont émané de la Conférence.

G) Inadéquation et insuffisance du code Bustamante

50. Le code a été adopté par la sixième Conférence panaméricaine et conçu à un moment historique qui était encore dominé par une certaine euphorie internationaliste à laquelle la crise économique de 1929 a coupé court. Il vise à réunir en un seul texte toutes les matières qui à cette époque étaient considérées comme appartenant au DIPr. Pour cette raison, il se divise en quatre livres précédés d'un titre préliminaire qui respectivement portent sur la matière civile, la plus longue sans doute, sur les domaines commercial, pénal et procédural. Cela a donné lieu à un texte d'une extraordinaire hétérogénéité matérielle et d'une longueur démesurée (437 articles) qui, dans de nombreux cas, a dépassé la simple tâche d'unification de la pratique existante jusqu'à ce jour, intégrant l'ordre de nombre matières sur lesquelles il n'existait aucune pratique dans la jurisprudence des États parties. Cette dernière facette a conféré au code un caractère qu'il a développé progressivement du droit à fort contenu académique et une propension à régir des questions qui correspondent totalement au droit international public (v.gr., extradition) pour entrer de plein champ dans des domaines qui relèvent de la souveraineté nationale.

L'adhésion des États latino-américains dans cet instrument est limitée : acceptation totale (Cuba, Guatemala150, Honduras, Brésil, Haïti, République Dominicaine et Venezuela151), ratification sous réserves indéterminées et subordonnée à la législation interne (Bolivie, Costa Rica152, Chili153, Équateur et El Salvador) et désengagement total (Argentine, Colombie, Mexique154, Paraguay et Uruguay). Cela donne lieu, sans aucun doute, à des divergences notoires liées à la propre dimension du droit international public dans ses rapports avec les constitutions nationales qui, malheureusement, est peu développée du point de vue comparatiste. Comme l'on peut l'observer, dans la zone OHADAC l'acceptation totale du code est effective uniquement à Cuba, au Guatemala, au Honduras, au Nicaragua, au Panamá. Il a été ratifié sous réserve de quelques articles par Haïti, la République Dominicaine et le Venezuela. Il a été ratifié avec des réserves indéterminées et subordonnée à la législation interne par le Costa Rica. La répercussion considérable que le code Bustamante a eue dans la région de la Caraïbe et sa large diffusion impose une série de remarques.

51. Il va sans dire qu'il est totalement justifié de souligner l'importante valeur de ce code, qui est parvenu à s'ériger comme un authentique monument juridique. Plus encore, il a été l'un des instruments juridiques les plus importants du XXème siècle et il a supposé, à son époque, l'aboutissement d'un travail considérable qui doit être reconnu et valorisé. Il a également été l'un des instruments le plus accepté dans les pays centraméricains, de la Caraïbe latine ainsi que du nord et du centre de l'Amérique du sud. L'on peut dire qu'il a institué un développement conventionnel sous-régional de grande ampleur. Pour l'époque, il a constitué un grand accord pour les États qui l'ont signé pour la résolution des conflits de lois dans leur système juridique respectif. Il s'agit d'un instrument de codification générale de DIPr, dont l'autorité scientifique se base sur le grand intérêt que les œuvres de DIPr écrites en Amérique suscitent et qui constitue un document essentiel pour comprendre l'application pratique du DIPr155. Les États, au sein desquels il est entré en vigueur, sont devenus des États pionniers car ils ont utilisé la législation appropriée dans les affaires présentant un élément d'extranéité et aussi dans le développement et l'essor du DIPr156.

Le code a été le point de référence obligé pour toutes les constructions de DIPr élaborées en Amérique latine durant presque un siècle. Il en a été de même dans d'autres cercles juridiques157, avec des répercussions essentielles dans certaines institutions fondamentales comme celle portant sur l'application judiciaire du droit étranger. De cette manière, il a d'un côté apporté aux juridictions des pays non signataires de ce grand code, et à certaines occasions, une source de résolution des problèmes dans les relations de droit international privé alors que d'un autre côté, il a conduit les juridictions nationales à l'interpréter et à l'appliquer de façon très disparate ce qui appelait à élaborer une œuvre unificatrice.

Comme toute œuvre humaine ne dure qu'un temps, le code n'a pas résisté aux poids des années. Il s'est inscrit dans une époque dominée par la conception publiciste du DIPr, qui considérait le DIPr comme branche du droit international public. Il a donné des réponses au problème de conflit de souveraineté des États, il était imprégné d'une forte conception « euro-centrique » pour laquelle le principe de nationalité était un postulat essentiel face à d'autres conceptions contraires profondément ancrées en Amérique latine. Enfin, il correspondait à des circonstances spéciales en matière de transactions économiques internationales dans la période postérieure à la Société des Nations, et loin des réalités d'aujourd'hui. Des considérations similaires se trouvent dans l'Exposé des Motifs de la Loi DIPr vénézuélienne, en ces termes : l' « expérience nous montre, en effet, que les règles contenues dans une série de dispositions législatives isolées mais cohérentes et même dans un texte organique aussi dense et intelligent que le code Bustamante, ont eu une vie latente et ont manqué de signification réelle. »

52. Du point de vue de la technique utilisée pour le code, il ne faut pas omettre qu'il s'agit d'une convention internationale, avec tous les inconvénients que présentent ce type d'instruments pour régir des situations de droit privé international qui requièrent une sécurité juridique. Comme toute convention, le code Bustamante est soumis à des règles générales qui régissent les traités internationaux, et de ce fait, avant de procéder à l'application de ses articles il faut répondre à quatre interrogations préliminaires.

En premier lieu, la question se pose de savoir si la matière objet du litige entre dans le cadre de son champ d'application matérielle, ou si, au contraire, en présence de vide juridique, les règles de droit interne doivent être appliquées. En second lieu, les modalités d'application dans le temps du code amènent à se demander si ses dispositions peuvent s'appliquer rétroactivement à des situations juridiques intervenues antérieurement à l'entrée en vigueur du code. En troisième lieu, si l'État est impliqué dans la relation juridique litigieuse, le code Bustamante ne contient pas, contrairement aux instruments internationaux de DIPr actuels de règles erga omnes, et ne s'applique qu'aux relations entre les États parties. Autrement dit, et il est important d'insister sur ce point, il ne s'agit pas d'un instrument international d'unification. En quatrième lieu, il convient de se demander si comme toute norme conventionnelle, le code est susceptible d'entrer en conflit avec des traités signés postérieurement par les États parties et portant sur la même matière, et dans ce cas, le conflit doit être tranché dans la majorité des cas par les juridictions. Si au début du XXème siècle, la convention internationale constituait la seule source de DIPr possible, aujourd'hui cette technique a été largement dépassée. Nombre de ces questions ont reçu une réponse adaptée par la jurisprudence qui a souligné de façon réitérée le caractère inapproprié du code comme instrument normatif du système de DIPr.

À cela il convient d'ajouter le caractère archaïque de nombre de solutions contenues dans le paragraphe relatif au droit des affaires internationales. Le traitement de l'autonomie de la volonté du régime des contrats internationaux a été totalement dépassé par les évènements, ce qui fait que le code est devenu totalement obsolète dans le champ important des transactions commerciales internationales. Et il en va de même des dispositions sur l'arbitrage qui, à partir de l'adoption de l'œuvre de la CNUDCI, a emprunté des voies différentes. Si, à son époque, le code a constitué une avancée en matière de problème de droit international privé, presque un siècle plus tard dans un contexte où l'économie mondiale a substantiellement changé, pour intégrer presque totalement un marché globalisé, la grande partie de ses réponses ne peuvent plus répondre à la réalité.

53. La diffusion du code dans un but d'unification dans toute l'Amérique latine n'a pas pu tenir les promesses qui avaient été faite. De même des juristes latino-américains de renom ont considéré que le code n'a pas été plus qu'une simple déclaration de bonnes intentions et que son aspect pratique ainsi que ses résultats ont été peu significatifs. En outre, comme cela sera indiqué ci-après, le code a connu une application très limitée et assez singulière dans les États qui avaient émis des réserves générales.

En effet, il est très important de tenir compte du fait que certains États signataires, comme l'Argentine, le Paraguay, l'Uruguay, la Colombie et le Mexique, ne sont pas parvenus à adhérer à cette convention internationale, et ce chacun pour des raisons très différentes. Mais en tout cas, la Colombie a déclaré s'aligner sur la doctrine « véritablement américaine » qui écarte la loi personnelle si elle est différente de la loi du domicile. D'autres États comme le Brésil, Haïti, le Venezuela, la Bolivie, le Costa Rica, le Chili, l'Équateur et El Salvador ont émis des réserves plus ou moins importantes (la réserve vénézuélienne ayant porté sur pas moins de 44 articles). En conséquence, l'adhésion généralisée du code a concerné un petit nombre de pays : Cuba, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua, le Panama et le Pérou. Cet instrument, d'un point de vue général, régit les relations d'un nombre limité d'États d'Amérique latine et sa mise en œuvre est très souvent conditionnée par le jeu des réserves émises quant à son champ d'application.

Au regard de la jurisprudence issues des juridictions caribéennes, le code Bustamante n'a pas été appliqué de façon significative et s'est limité à être une référence utilisée à certaines occasions par les parties pour justifier en droit une demande spécifique (contrariété à l'ordre public, maintien de la possession au possesseur troublé, domicile des diplomates à l'étranger, droits successoraux, etc.) ainsi que des dispositions constitutionnelles ou de droit international en matière des droits humains.

III. Conception d'une loi type OHADAC de droit international privé

1. Questions de technique législative

54. Tout système juridique national, en matière de droit international privé, ne peut pas se limiter à des solutions juridiques produites exclusivement par le législateur interne car elles sont souvent inappropriées et en décalage avec la réalité juridique contemporaine. Il convient, au contraire, de s'ajuster aux réalisations concrètes qui se produisent au sein de la communauté internationale et plus concrètement dans les pays faisant partie de son environnement le plus proche. D'un autre côté, la globalisation requiert que des nouveaux blocs normatifs permettent de dépasser les problèmes traditionnels des sources du DIPr par des solutions matérielles uniformes. Le besoin d'harmoniser le DIPr repose sur le constat que les lois nationales souffrent généralement d'une inadéquation aux affaires internationales et qu'il existe une disparité entre elles, y compris dans un cadre géographique comme celui de l'OHADAC.

Unification et harmonisation sont des termes de portée différente. L'harmonisation étant plus flexible, elle n'implique pas nécessairement l'adoption d'un texte concret, mais induit plutôt un rapprochement des concepts juridiques. Ce rapprochement peut s'opérer à travers divers instruments comme la mise en œuvre d'une « loi type ». Cette flexibilité constitue une étape intermédiaire entre les résultats de la comparaison des ordonnancements et l'unification proprement dite158. Nous nous trouvons face à un processus qui tend à faciliter la modification de certains systèmes de droit interne des États, afin de conférer une prévisibilité aux relations de droit international privé. Au contraire, l'unification requiert l'existence d'un texte commun, soit une « convention », soit une « loi uniforme » et d'application directe pour l'opérateur juridique. Durant ce processus, les États approuvent des règles ou des systèmes juridiques communs afin de régir des aspects spécifiques des relations de droit international privé.

Ce contexte se caractérise par une interdépendance économique issue de ce que l'on dénomme le dialogue « Nord-Sud » et, d'un point de vue juridique, par une dialectique entre pays de common law et de droit romano-germanique. C'est dans cette dimension universelle que la solidarité régionale est dépassée par les courants d'unification universelle159. Il s'agit d'un terrain fertile pour insister, avec toutes les réserves que cela entraine, sur l'idée de « famille de droit » qui est reflétée d'une certaine manière devant les instances internationales de codification du DIPr. Et le résultat n'est autre que la forte tendance vers l'harmonisation internationale de cet ordonnancement juridique. À partir de cette perspective, l'harmonisation se présente comme une nouvelle réalité de la coopération en matière de droit privé qui tente de dépasser l'insuffisance des solutions juridiques traditionnelles à travers des normes de conflit de lois et de juridictions harmonisées, comme moyen de connexion entre les divers ordonnancements nationaux. Les processus de décodification, la création croissante de lois spéciales par les pays et l'augmentation du particularisme a généré un ensemble de règles de diverses natures, origine et formulation, ayant pour but de lisser les aspects de droit privé présents dans les relations de commerce international.

55. L'harmonisation internationale du DIPr pose des questions particulières sur lesquelles il convient de s'arrêter, même brièvement. En premier lieu, la codification nécessite un contexte favorable pour pouvoir être mise en place160. Si la codification effectuée au sein de la Société des Nations a été limitée et s'est caractérisée par une faible participation des États à l'élaboration des conventions de DIPr, il ne faut pas oublier les séquelles de la crise boursière newyorkaise et son incidence décisive dans ce fait. Pour citer un seul exemple, si la codification du droit du commerce international a manifesté un sérieux retard, celui-ci est lié à la crise pétrolière des années 1973 et 1978 et sa répercussion dans le contexte de ce qui est dénommé le « Nouvel ordre économique international ». En second lieu, il convient d'ajouter à ces motifs de nature économique d'autres de type institutionnel et qui ne sont pas moins négligeables. Il s'agit de l'absence d'un Parlement international qui impose de rattacher la codification international aux organisations internationales et plus concrètement, aux organisations régionales où les particularismes sont moins forts et constituent une chance supplémentaire de succès.

La codification internationale de DIPr requiert, en plus, une technique adéquate qui en complément de l'utilisation traditionnelle de la convention internationale permet d'adopter divers textes comme des lois uniformes, des lois-modèles, etc.161, et auxquelles nous nous sommes déjà référés. Il faut également qu'elle remplisse une série de conditions dans ses diverses étapes d'élaboration et plus précisément, dans le choix des domaines à codifier, dans l'élaboration des textes préparatoires, dans le choix des « rapporteurs spéciaux » dans les débats en réunion plénière, dans l'adoption du texte définitif et, enfin, dans le moment décisif de l'adoption totale ou partielle du texte final par les États. Le choix d'une voie normative idoine s'avère crucial du point de vue de la technique juridique : un mode spécifique dans le cas des systèmes d'intégrations avancés (comme au sein de l'UE qu'il s'agisse de la directive ou, plus particulièrement, du règlement), une convention internationale ou un instrument dit de soft law, comme c'est le cas d'une loi-cadre ou d'une « loi type ». Sans un mode normatif propre, la loi type parait préférable à la convention afin de garantir un résultat codificateur passant par l'adhésion des États plutôt que par la contrainte comme c'est le cas de la convention. Sans oublier que si la matière à traiter est fortement empreinte des spécificités conceptuelles d'un petit groupe d'État, le texte final a toute chance de ne pas obtenir le nombre suffisant de ratification, d'adhésions, etc., nécessaires pour entrer en vigueur.

Il convient d'ajouter qu'à ces conditions mentionnées ci-dessus, la codification internationale est efficace si les autorités du pays ou des pays engagés apportent leur concours de deux façons différentes. En premier lieu, les institutions internes doivent s'ajuster aux obligations internationales adoptées par l'État. Il s'agit d'une étroite coordination entre ce qui est codifié et les moyens nationaux existant pour sa mise en pratique. En second lieu, et cela est commun à toute entreprise de codification, il faut une volonté politique réelle, de s'atteler à une codification, tout en tenant compte de son importance, tel que nous l'avons indiqué dans les pages précédentes. En troisième lieu, une harmonisation authentique peut uniquement être obtenue à partir d'un texte qui inclut un langage juridique familier, et généralement admis, qui facilite une application et une interprétation judiciaire uniforme. Il faut aussi qu'il vise à dépasser tout particularisme avec tout ce que cela comporte comme renoncement et, le cas échéant, de modération dans l'utilisation des ressources généralement admises comme l'ordre public national.

2. Méthodologie codificatrice

A) Problèmes d'uniformité et de diversité des techniques normatives

56. Le particularisme, la nécessité d'une méthodologie approfondie et les intérêts hégémoniques ne sont pas les seuls problèmes en présence. Comme nous l'avons déjà indiqué, il est d'importance majeure de trouver les bonnes techniques de codification. Outre les expériences qui sont uniquement possibles dans des cercles juridiques déterminés, qui en plus bénéficient de processus d'interprétation uniforme, les voies traditionnelles d'unification ont largement démontré leurs insuffisances. C'est plus précisément les instruments fondés sur les lois uniformes qui se sont avérées la plupart du temps puissantes face à la tendance irrésistible des États au particularisme. C'est la raison pour laquelle il ne faut pas sacraliser le processus d'unification internationale et encore moins le processus de production normative au niveau international. Il n'y a aucune raison de considérer que la solution de l'uniformisation est la meilleure et il faut considérer avec beaucoup de réserves que les productions fondées sur ses prétendus bienfaits reposent, purement et simplement, sur un texte international162. Le phénomène d'unification, hérité de l'harmonisation internationale des solutions, n'est pas une fin en soi mais une valeur abstraite. Il ne peut être considéré comme positif que s'il offre des solutions plus adéquates et bien plus adaptées que les normes de droit interne. Il sert rigoureusement à clarifier et rationaliser les solutions internes.

Tout effort unificateur de droit ne peut pas être conçu en termes approximatifs et idéalistes, sinon la tâche est vouée à l'échec et se réduit à une simple spéculation de caractère dogmatique. Si au contraire le phénomène répond à des intérêts concrets, ou mieux, à la conciliation des intérêts réciproques des États qui entrent dans ce processus, les résultats sont beaucoup plus efficaces et l'unification acquiert ses lettres de noblesse. C'est la raison pour laquelle il existe des domaines juridiques, comme le DIPr, pour lesquels l'unification est consubstantielle non seulement sur le plan normatif mais également sur le plan de son application judiciaire. Il s'agit d'une situation focalisée sur l'actualité du moment et l'on perçoit des réalisations concrètes dans des domaines juridiques qui jusqu'à ce jour étaient restés en marge du mouvement unificateur. Ces réalisations changeront probablement le panorama et, par la même, elles produiront une révolution copernicienne dans les techniques de codification et, par conséquent, dans l'unification qui en résultera.

57. Il est indéniable que le droit uniforme est une technique de réglementation valide pour l'unification du DIPr, dans la mesure où il garantit parfaitement la sécurité juridique et la prévisibilité des opérateurs économiques163. Nonobstant, il est important d'avancer une série de considérations préliminaires afin d'en définir les contours. D'une part, il faut prendre en compte le volume de textes que l'on prétend coordonner et qui peut aller de la simple harmonisation normative, simplement régie par des principes tout en conservant la diversité normative des États, et l'unification à proprement parler164. D'un autre côté, il faut distinguer l'unification intégrée du droit unifié. L'unification est caractérisée par un ensemble de règles adoptées par un groupe d'États manifestant une volonté commune de soumettre leurs relations juridiques à une même réglementation. Le droit unifié se réfère au résultat juridique qui découle de l'unification du droit et prend diverses formes : les lois types, les lois uniformes, les traités d'unification et, dans quelques cercles juridiques à fort degré d'intégration, certains instruments spécifiques peuvent être adoptés comme c'est le cas au sein de l'Union européenne avec les directives et plus particulièrement les règlements. À partir de là, le droit uniforme n'est rien d'autre qu'un droit unifié issu d'un seul et unique processus : la loi uniforme, instrumentalisée au moyen d'un traité international165.

Les meilleurs résultats en matière d'unification du droit ont été obtenus pour régir la vie des personnes physiques. Cela a été le cas chaque fois qu'il est intervenu sur la réalité même du DIPr, et même avec des propositions différentes de celles classiquement formulées. Nous nous trouvons face à une vraie technique normative qui, même si elle nait en dehors du DIPr, constitue un instrument très important pour résoudre des situations de droit international privé166. L'unification du droit matériel et encore plus lorsqu'elle porte sur du DIPr, même si elle comporte de nombreuses difficultés, implique de garantir au mieux les relations juridiques dans des espaces supranationaux. Pour ce faire, l'opérateur juridique doit être assuré de la meilleure sécurité juridique et de la prévisibilité du droit. Le droit uniforme constitue la solution matérielle, très spéciale mais fondée sur une large expérience juridique, aux problèmes de relations de droit international privé. Toutefois, il ne faut pas s'étonner que l'on en vienne à affirmer rigoureusement que le droit uniforme est théoriquement la technique la plus efficace de DIPr et particulièrement pour sa fonction préventive qui le rend pratiquement infaillible167. Il s'agit de la quintessence de la notion de « DIPr préventif » ou conflict avoidance.

58. Aujourd'hui il apparait évident que l'unification juridique du DIPr, au moins dans le domaine du droit applicable et indépendamment de la méthode employée, offre des avantages inéluctables168. Néanmoins, il est indéniable que jusqu'à présent et dans ce champ spécifique, la convention internationale a été l'instrument le plus efficace. Jusqu'à récemment, le recours à l'unification conflictuelle a été défendu car il était moins controversé et parce qu'il offrait de plus grandes possibilités de négociation que l'exécution d'une convention. Toutefois, la question se pose de proposer des actions universelles ou régionales dans ce domaine169. Guère nombreux sont les défenseurs de cette position pour invoquer que l'unification des normes matérielles d'application générale ignore les différences conceptuelles et méthodologiques entre les différentes législations. Cela n'est pas le cas si l'on a recours à des techniques conflictuelles170. En outre, d'une façon générale, le choix entre l'une ou l'autre technique dépend si les États sont ou non disposés à modifier leurs ordonnancements juridiques. Il est évident qu'il existe de grandes réticences vis-à-vis de l'unification du droit matériel, qui est en soi plus agressive que l'unification d'une poignée de règles de DIPr. En tout cas, la tendance à la matérialisation des règles de DIPr sur le droit applicable ne s'accommode pas des techniques codificatrices traditionnelles basées sur les conventions internationales. Bien entendu, ce n'est pas le cas dans le domaine de la coopération judiciaire internationale, où la pièce maitresse de la réglementation internationale relève bien de la technique de la convention internationale. Les résultats de la codification internationale de DIPr mettent en évidence que c'est dans ce domaine particulier où les meilleurs résultats ont été obtenus, tant pour l'adhésion massive des États que pour son application usuelle par les juridictions nationales171.

D'un autre côté, il ne faut pas perdre de vue que les traités internationaux qui unifient les règles pour déterminer la loi applicable sont des sources obligatoires et rigoureuses. Elles laissent peu de marge de manœuvre aux États parties. Lorsque les règles sur la loi applicable comportent un degré élevé de droit matériel, ce qui est de plus en plus fréquent, il faut que les États trouvent un consensus. Toutefois, plus la matérialisation devient incontournable, plus ce consensus s'avère difficile à trouver172. Les États qui n'optent pas pour une orientation matérielle afin de trancher sur la loi applicable ne pourront pas l'assumer en tant que telle. Mais d'un autre côté de la balance, il faut reconnaitre également que le caractère présumé « neutre » des règles de conflit émanant des conventions peut décourager les États à les ratifier s'ils n'y voient pas leur intérêt. La neutralité issue du consensus obligatoire tend à accentuer le caractère conservateur des règles de conflit inclues dans les traités internationaux. Cela explique pourquoi les relations commerciales internationales tendent à fuir cette méthodologie codificatrice. En effet, chaque fois cette méthodologie tend davantage à se focaliser sur des questions non patrimoniales qui s'accommodent mieux de l'unification matérielle.

B) Inconvénients des traités internationaux comme méthode d'unification

59. À proprement parler, le droit uniforme préfère le traité international multilatéral comme mode de création du droit, ce qui présente des avantages et des inconvénients. Il a pour avantage d'apporter une certitude quant à la matière unifiée. Il a pour inconvénients d'être rigide comme toute codification et de présenter des difficultés d'adaptation dans le système juridique national comme tout texte de ce genre. Pour s'en rendre compte, il suffit d'observer le nombre peu important d'États parties ayant adhéré aux conventions de droit uniforme. Par exemple, le petit nombre d'États ayant opté pour le droit cambiaire de Genève et, surtout, l'absence de pays anglo-saxons s'avère, en ce sens, significatif. Une fois ces remarques peu positives avancées, il convient de remarquer que l'uniformité souffre de problèmes généraux et typiques à cette technique de codification et ce, indépendamment de son contenu173.

En premier lieu, il existe un éventuel « déficit démocratique », qui est dû au fait que les rédacteurs des projets (qui dans la plupart des cas agissent à titre individuel) et les négociateurs à la Conférence internationale sont souvent éloignés du réseau juridique qu'ils sont supposés représenter. À cela s'ajoute l'absence de coordination entre les processus de codification interne et international174. En second lieu, il constitue une unification conventionnelle qui exprime un positivisme un peu démodé dans le sens où il permet aux États de préserver leur capacité de contrôle sur la création du droit. De cette manière, nous assistons à un phénomène parallèle à celui qui se produit pour la législation interne, à savoir trop de quantité et peu de qualité175. En troisième lieu, le résultat est très souvent antagonique. Il se traduit par des compromis qui pour satisfaire la nécessaire simplicité des normes unifiées donnent lieu finalement à des textes ambigus. Ces textes présentent de grosses difficultés d'interprétation quand ils ne sont pas tout simplement contradictoires voire incohérents les rendant difficilement conciliables avec la pratique176. En quatrième lieu, nombre de conventions qui ne prévoient pas de mécanisme flexibilité dans leurs dispositions présentent une rigidité qui les rend, à la moindre évolution du commerce international, totalement obsolètes à court terme. Cette rigidité est, la plupart du temps, due à l'inexistence d'un pouvoir politique autre que celui des États et qui soit susceptible d'encourager l'élaboration et l'exécution de conventions en adéquation avec la réalité sociale177. De même, il faudrait assouplir la traditionnelle rigidité des mécanismes habituels contenus dans le droit des traités afin de pouvoir modifier, amender ou tout simplement actualiser les conventions passées et ce, avec l'accord de tous les États signataires. En cinquième lieu, l'intégration des traités unificateurs dans l'ordre juridique interne des États pose problèmes. Cela peut générer l'apparition de divers sous-systèmes selon les effets de la norme conventionnelle. Ces sous-systèmes sont généralement issus de deux sources, l'une interne, l'autre conventionnelle178. À cette question, il convient d'ajouter le problème de l'application de la convention dans les différentes unités territoriales dans le cas d'États pluri-législatifs179. En sixième lieu, l'intégration au droit interne d'une convention de droit uniforme dépend de la réception et de l'acceptation des traités par les juges nationaux dans le cadre de l'application du droit. L'interprétation judiciaire à travers des catégories juridiques du droit du for ou l'éventuelle action de l'ordre public sont des éléments qui rendent difficile la mise en pratique d'une assimilation saine du droit unifié par les instances nationales. Finalement, l'existence d'un large éventail de traités dans ce champ, souvent de caractère successif, pose la question de leurs relations entre eux180 et, par conséquent, du jeu des clauses de compatibilité, de subordination ou de complémentarité de l'instrument international. Quant aux champs d'application matérielle de la convention, dans le temps et dans l'espace, il donne de plus en plus lieu à des « conflits de conventions » qui parfois sont difficilement résolus du fait du fonctionnement des clauses de ces conventions181 ou parce qu'elles ne traitent pas de cette question. Et cela en marge du jeu des réserves, particulièrement important, dans les conventions qui régissent le commerce international.

60. En outre, les conventions de droit uniforme ont pour avantage de limiter leur application aux relations de droit international privé c'est-à-dire qui mettent en lien plus d'un ordre juridique, tout en cohabitant avec les règles de droit interne. Cela pose tout simplement un problème de délimitation entre les deux ordres juridiques. Il ne faut pas perdre de vue qu'il existe une profonde interaction entre les règles unificatrices et le système interne qui les réceptionnent, ce qui peut provoquer certaines distorsions. Parfois, le seul fait de qualifier une convention spécifique de norme « uniforme » est parfois en soi une difficulté.

  1. Hormis le cas où une convention peut trouver une application universelle, elle suscite de toutes façons des problèmes d'interprétation susceptibles d'engendrer des résultats très disparates. Dans tous les cas, cela fait courir un risque à la sécurité juridique qui doit pourtant être au cœur du droit du commerce international. Toutefois, toutes les conventions qui régissent le commerce international ne présentent pas cette vocation d'universalité, comme c'est le cas de la Convention de Vienne de 1980 sur les contrats de vente internationale de marchandises qui régit la plupart des transactions.
  2. Le développement croissant de la codification internationale du droit uniforme génère de plus en plus souvent des conflits entre conventions182. Cela pose des problèmes importants et complexes de délimitation normative et nuit à une réglementation saine des transactions marchandes sur le plan international. Divers facteurs sont en cause. Il est fréquent qu'au sein d'un même organe codificateur, il se produise une révision des conventions précédentes ou que des matières identiques fassent l'objet simultanément d'une codification internationale dans divers organes (comme par exemple, les conventions sur les contrats internationaux des NU, de l'Union européenne, d'Unidroit, etc.). À noter que souvent surgissent de faux conflits de conventions suite à une interprétation défaillante de ses champs d'application respectifs. Malgré tout, les problèmes de délimitation entre des conventions apparaissent et sont chaque jour plus nombreux dans la jurisprudence interne des États. La délimitation entre les conventions présentent de multiples risques et conduit soit à ignorer l'existence de certains textes internationaux, dont le nombre va croissant, soit à l'inverse à s'affronter à la difficulté que pose le choix de la norme correcte à appliquer.
  3. Ces difficultés ont conduit à inclure dans les mêmes textes conventionnels ce que l'on dénomme la « clause de compatibilité avec les traités »183. Elle a pour but soit d'éliminer tout conflit futur quant à l'application des traités dans le temps, soit d'appliquer le principe de la loi la plus favorable passant par des situations très complexes selon les intérêts en jeu ou générant une incertitude laissant au juge une marge de manœuvre. Finalement, ce sera le juge qui choisira selon ses connaissances, quel texte conventionnel est applicable au cas d'espèce184. Dans ce dernier cas, ce n'est pas la solution définitive des éventuels problèmes à résoudre qui compte mais la rédaction de la clause par la technique codificatrice de « la fuite en avant », afin d'éviter que les négociations soient paralysées.
  4. Il faut écarter l'idée selon laquelle les conventions de droit uniforme visent à éliminer tout conflit de lois susceptible de se produire car l'uniformité normative ne suppose pas l'uniformité d'interprétation. La pratique commerciale démontre que les systèmes juridiques, provenant même au sein d'une même famille de droit, ont pour habitude de produire des réponses diverses et divergente sur une même question concrète régie par un instrument d'unification internationale185. Le problème de l'interprétation de ce type de conventions, est non seulement l'une des questions les plus débattues, mais fournit une grande partie de la substance théorique186. En principe, si l'on pouvait compter sur un texte qui éliminerait de façon préventive toutes les questions d'interprétations et utiliserait des catégories très bien délimitées, on éviterait les problèmes qui surgissent a posteriori. Toutefois, ce travail dans la majorité des cas ne peut pas être accompli en amont car le dilemme apparait au moment de l'application des normes. En outre les problèmes ne sont pas résolus pour autant. En effet, avec la multiplication des conventions internationales de droit uniforme ces dernières années, il apparait d'importantes différences d'interprétation d'un même concept. Ce n'est pas l'interprétation d'un même concept au sein d'une même convention qui pose problème à plusieurs États signataires de cette convention mais bien l'interprétation de ce même concept dans au moins deux conventions internationales et ce même par un seul État. Il n'existe pas, aujourd'hui, de « concepts autonomes » comme la « vente », « les biens meubles, « l'établissement commercial » ou « factoring », qui sont des notions de portée différente selon le type d'instrument concret. Cela oblige à coordonner les efforts d'unification afin d'éviter à titre préventif les difficultés d' « interprétation inter-conventionnelle »187.

C) Avantages des lois types

61. Face à cette situation, il faut relever les nouvelles techniques normatives d'unification du droit et qui se développent dans des travaux de codification internationale. Face à la réticence des États à adhérer à des lois uniformes, pour défendre à outrance leurs particularismes juridiques, l'on peut recourir à une voie plus flexible sous la forme d'une loi type. Elle joue un rôle de plus en plus important comme instrument de rapprochement des États en leur apportant une marge de liberté pour décider de régir une matière concrète à partir de solutions internationalement acceptées. Cela permet aussi de moderniser leur législation en fonction de leurs propres besoins et constitue un instrument précieux pour l'interprétation, dans le cadre international, de certaines conventions et autres instruments internationaux existant. En outre, il faut indiquer qu'il s'agit d'une technique de codification « alternative » qui requiert peu de coopération internationale puisqu'elle est davantage configurée, dans la plupart des cas, comme une solution ponctuelle adaptée à une situation concrète que comme un mécanisme générique de codification.

La loi type, telle que nous allons maintenant la présenter, est un texte législatif :

  1. Dont l'intégration dans le droit interne des États est recommandée. Et à la différence d'une convention internationale, l'État qui l'adoptera ne sera pas tenu de remplir des conditions posées par le droit des traités, souvent nombreuses et complexes, comme par exemple la notification à faire auprès du dépositaire ou des autres États parties. Les États doivent, dans la mesure du possible, respecter le texte uniforme de la loi type car il rend le droit interne plus transparent et accessible aux parties étrangères, ainsi qu'aux conseillers juridiques et conciliateurs étrangers qui interviennent pour résoudre une difficulté sur le territoire de l'État qui l'a promulguée :
  2. Qui est généralement adopté dans le cadre d'une conférence internationale à l'issu de débats préparatoires visant sa seule mise en place, dans un processus et une technique similaire à celle du « Livre vert » de l'Union européenne. Une fois adopté, il est recommandé aux États d'insérer totalement ou partiellement le texte dans leur droit interne. Cela ne confère pas au texte de caractère contraignant direct (les États n'ont pas à notifier à l'organisme ou aux autres États qu'ils ont intégré le texte dans leur ordonnancement) mais constitue une source d'inspiration pour le législateur interne au moment de légiférer sur une matière concrète prévue par une loi type. Étant donné qu'il s'agit d'un modèle de texte légal dont la finalité est d'être inséré dans le droit interne, il présente les mêmes caractéristiques que n'importe quel autre texte légal destiné à être promulgué par un Parlement et, par conséquent, il ne contient pas de liste de « signataires » comme celle qui est habituellement annexée aux traités internationaux.
  3. Dont le texte peut être modifié ou supprimé par chaque État, dans le processus d'intégration dans le droit interne, ce qui évite la pratique traditionnelle des réserves utilisées pour les conventions internationales. Cette pratique n'est généralement pas bien perçue en matière de codification internationale, et il est de plus en plus fréquent que les conventions en limitent à titre exceptionnel scrupuleusement la portée. Il est indéniable que l'harmonisation et la sécurité qui est obtenue à travers la législation modèle est certainement inférieure à celle issue d'une convention. Toutefois, cet inconvénient apparent peut être compensé par le fait que le nombre d'États qui décideront d'intégrer la loi type sera supérieur au nombre d'États prêts à ratifier ou à adhérer à une convention. Et, en tout cas, cette technique offre une flexibilité qui permet au législateur national d'adapter le texte modèle à ses spécificités internes, comme par exemple de nature procédurale. Bien entendu, les institutions codificatrices recommandent vivement aux États d'éviter ce genre de pratique afin d'assurer plus d'efficacité à la codification. Afin d'atteindre un niveau d'harmonisation et de sécurité satisfaisant, les États devront, au moment d'incorporer la loi type dans leur droit interne, éviter le plus possible d'introduire des changements et de s'assurer que tout changement est compatible avec les principes de base de la loi type.

La CNUDCI, institution codificatrice prédominante dans le secteur commercial, a adopté ces derniers temps une technique en vue de résoudre les réticences des États et d'étendre une série de principes de base sur certains concepts. Prenons l'exemple significatif de la loi type de la CNUDCI sur l'arbitrage commercial international de 1985 qui n'a pas apporté les fruits attendus. En effet, il suffit de constater le désintérêt du législateur interne lors de l'élaboration des lois nationales sur l'arbitrage et plus spécifiquement de la loi espagnole de 1988. Prenons aussi l'exemple de la loi type sur l'insolvabilité internationale de 1997 qui a été prise en compte par les codifications récentes et qui est un exemple de la manière dont il est possible d'adapter une loi type aux règles de procédure des États. Cependant, la technique de la loi type n'est pas généralisée dans tous les organes de codification. Par exemple la Conférence de La Haye de DIPr a écarté depuis de nombreuses années la possibilité d'harmoniser les règles de conflit de lois par des lois modèles, comme les représentants des États nord-américains le proposaient188. Notons que cette position marque un certain assouplissement depuis ces dernières années.

62. Une loi adoptée par le législateur national, même si elle est d'apparence technique, est toujours la traduction d'une idéologie et d'intérêts et sa teneur relève d'une politique commune ce qui requiert une unicité de souveraineté, exclue par hypothèse189. Face à cela, une loi type est le texte par excellence qui harmonise le droit interne, alors que la convention est un instrument international que les États approuvent officiellement afin d'unifier certains champ de leur droit interne dans le contexte international.

Hormis le cas du Venezuela et de Panama, les pays de l'OHADAC manquent pour régir, au moins, le champ substantiel des problèmes de droit international. En général, les différents domaines qui configurent le contenu du DIPr sont : la détermination de la compétence des tribunaux du for et de la loi applicables dans les affaires présentant un caractère d'extranéité, la reconnaissance et l'exécution des décisions rendues à l'étranger. Ces domaines ne sont pas suffisamment réglementés et sont traités dans des champs de la loi différents ce qui entraine de sérieux problèmes pour se retrouver dans les solutions proposées par les divers articles.

Cette construction vise l'existence d'une série de critères d'ordre général. En premier lieu, l'indépendance dans le traitement des conflits de lois et des conflits juridictionnels. En second lieu, le caractère attractif de la juridiction caribéenne qui se considère comme pleine et indéclinable. Pour les tribunaux caribéens, ils optent pour une conception au sens large de la notion de juridiction en la rattachant à la notion de souveraineté nationale. Cela se matérialise par :

  1. La transposition pure et simple sur le plan international de la vis atractiva. Cela consiste, sur le plan interne, à affirmer le caractère exclusif et excluant de la juridiction interne ordinaire face aux juridictions étrangères, pour traiter de toutes les litiges civils nés sur le territoire national. Cela a conduit, à de multiples occasions, à appliquer des critères de délimitation de la compétence territoriale interne à des situations en lien avec d'autres pays.
  2. La reconnaissance de la compétence des tribunaux caribéens, dans le cas d'un litige né de l'exécution d'un contrat, même dans le cas où il existe une clause expresse et non équivoque prévoyant de soumettre le litige à une juridiction étrangère. Autrement dit, il n'est pas d'usage d'admettre que la volonté des parties, lorsque celles-ci soumettent leur litige à une juridiction étrangère, puisse avoir un effet dérogatoire ce qui va à l'encontre des exigences mêmes du commerce international. Cela dénote par rapport aux règles existantes sur l'arbitrage dans les pays de l'OHADAC qui admet sans équivoque qu'il puisse y avoir un déclinatoire au profit de l'arbitre quand les parties ont convenu d'une clause compromissoire. De même il n'existe pas de règles de procédure qui régissent les effets du choix par les parties au contrat de soumettre leur litige à une juridiction étrangère.

3. Orientations de la loi type OHADAC

A) Choix pour une orientation civiliste

63. La question est liée à la prise en compte du contenu lato sensu ou stricto sensu du DIPr. Il est indéniable que la conception qui est la plus étendue en Amérique latine penche, depuis ces dernières années, pour une « conception large » qui ne couvre pas seulement les champs classiques bien établis par la doctrine française (nationalité, extranéité, conflit de lois et conflit de juridictions)190. Une conception qui s'impose à la longue, de type « conflictualiste » et « normativiste » elle vient régir des domaines étrangers au droit privé comme le droit pénal ou le droit du travail191. L'exemple le plus significatif réside dans le code Bustamante et apparait aujourd'hui de façon marquée dans le code panaméen de DIPr. Ce double développement a disparu des législations modernes de DIPr et, par conséquent, de l'enseignement, même si certaines lois ne peuvent éviter de s'insérer dans certaines institutions du droit commercial.

La loi type, n'ayant pas pour seule vocation de résoudre les questions relatives à la loi applicable dans l'espace, ne constitue pas un cadre normatif général pour l'ensemble des relations de droit international privé. La loi type vise, de préférence, à solutionner les conflits de lois et de juridictions de type « civil » même si cette limitation emporte des exceptions importantes en admettant le droit public étranger (article 65), la réglementation du contrat de travail (article 47), ou en prenant en compte certaines institutions de nature purement commerciale.

64. Précisément concernant ce dernier domaine, la loi type amène des réflexions qui justifient le fait qu'il ne soit pas pris en compte. Le dépassement du formalisme a conduit à séparer progressivement le DIPr et le droit des affaires internationales (que certains auteurs appellent droit du commerce international ou droit commercial international). Le droit des affaires internationales est un ordre qui régit les échanges de biens et de services et qui vise à apporter des réponses aux relations entre les parties à une opération internationale, commerciale ou financière, ou à une prestation de services transfrontalière. Si d'un point de vue privatiste, l'étude du régime des échanges commerciaux est fondamentalement intéressant, il n'en demeure pas moins qu'une étude complète de l'ordonnancement juridique des transactions commerciales internationales doit analyser les acteurs de ces échanges. Cela conduit à s'introduire dans le droit des sociétés et dans son cadre fonctionnel, à savoir le marché international. Cette analyse du marché international exige non seulement de se pencher sur ses mécanismes de protection, en particulier dans le domaine de la libre concurrence et de l'accès aux propriétés spéciales, mais également d'analyser la structure même d'un tel marché : l'organisation institutionnelle, la structuration et le fonctionnement des différents marchés régionaux et l'organisation interne du commerce extérieur. Cela suppose inévitablement de dépasser le cadre d'analyse purement privatiste ou commercial et impose d'introduire des concepts et des développements de droit administratif international et de droit international économique. Il serait absurde d'analyser le régime des échanges internationaux sans avoir une vision des lignes directrices sur lesquelles doivent se développer et se réaliser ces échanges.

Indépendamment du droit des affaires internationales, conçu dans une approche normativiste mettant l'accent sur le « conflit des lois »192, le droit commercial international, en tant que droit spécial, repose en grande partie sur le processus de codification mené par la CNUDMI. Face à l'inexistence, aujourd'hui, d'un droit des affaires internationales commun à tous les États, il faut combiner plusieurs sources de production juridique, d'origine institutionnelle, conventionnelle et interne. À partir de là, cet ordonnancement peut se définir comme « l'ensemble des règles juridiques qui régissent les opérations commerciales réalisées par les opérateurs juridiques privés dont les intérêts se situent dans des États différents ». À partir de cette définition, les remarques suivantes peuvent être formulées quant au droit des affaires internationales. a) Il comprend un bloc normatif qui régit l'activité commerciale internationale et qui émane des dispositions nationales ainsi que des traités internationaux, tout comme des règles et des usages internationaux entre professionnels. b) Il porte sur un ensemble d'opérations qui impliquent l'exercice du commerce, tant pour ce qui se réfère à la structure de l'activité (statut des dirigeants des sociétés), que pour les actes qui caractérisent l'activité de l'entreprise (vente, concurrence...). c) Il s'applique à toutes les relations commerciales et financières entre des personnes qui ont des intérêts, ou des liens situés dans des États différents.

B) Le dépassement du modèle de la règle de conflit rigide et au résultat imprévisible

65. Le cadre étroit qui est réservé aux dispositions de DIPr a conditionné de façon décisive la répartition des champs régis par les codes civils pour la conservation de leur empreinte statutaire (Cuba, République Dominicaine), ce qui n'a pas empêché d'avoir ses détracteurs193. La loi vénézuélienne de DIPr a écarté expressément cet immobilisme en refusant dans son exposé des motifs « qu'un système statutaire enraciné, avec ses propres caractéristiques originales et crédibles, ait été endommagé par la pratique et en soit venu à se convertir à un système de coloration territorialiste ou, encore pire, à cumuler des solutions incertaines et incohérentes. »

66. Une telle technique législative met en évidence le fait que la codification moderne opte pour l'abandon des normes de conflit comme moyen unique de résolution des litiges, et propose divers moyens mieux adaptés aux différentes relations et institutions juridiques qui se produisent dans le droit international privé194.

La conception de la règle, comme solution unique, émane du modèle élaboré par le juriste allemand au XIXe siècle, F.K. von Savigny, qui dans son état le plus épuré se compose de trois éléments. Premièrement, d'une situation de fait qui entre dans le champ du droit et qui peut résulter d'une relation juridique (« les effets du mariage », « la succession à cause de mort », « l'émission de titres valeurs », etc.), d'une institution (« la tutelle ou les autres modes de protection », « l'adoption », « la possession », « la propriété », etc.) ou d'un droit subjectif (« le droit à une pension alimentaire », « le droit de propriété intellectuelle ou industrielle », etc.). Deuxièmement, d'une conséquence juridique, qui n'est pas prévue dans la règle même, mais qui doit être déterminée indirectement par le biais du mandat d'application de la règle que le législateur confère à l'ensemble du droit national. Troisièmement, d'un lien de causalité qui permet de rattacher l'élément étranger émanant du fait juridique, et de le placer dans la conséquence juridique (« la loi de la nationalité commune au débiteur et au créancier de la dette alimentaire », « la loi nationale du de cujus », « la loi de rattachement choisie expressément par les parties », « la loi du pays de la signature de l'acte », etc.)195. Il convient de rappeler que cet auteur partait de la fonction de la norme de conflit pour déterminer le droit matériel applicable en théorie à une situation de fait, à savoir une seule loi à l'exclusion de toutes les autres à l'exception des correctifs qu'imposerait la règle de résolution des conflits elle-même196.

La méthode avancée impliquait des mécanismes et des automatismes au détriment, très souvent, des critères de justice. Elle se centrait précisément sur la fonction de la règle de manière dogmatique et rigide, faisant primer l'objectif de garantie et de sécurité juridique sur tous les autres. Ce n'est pas en vain qu'elle a été qualifiée, à juste titre, de « machine aveugle ».

Ce modèle rigide contraste largement avec celui suivi par les règles de conflit contenues dans les législations nationales modernes et dans les conventions internationales de l'après-deuxième guerre. Ces règles de type traditionnel comprennent une orientation matérielle, un résultat, qui laisse une marge de manœuvre plus large au juge ou à l'autorité qui les applique. Il s'agit de la « règle de conflit multilatérale fonctionnalisée » qui vise à appliquer au cas d'espère la loi qui lui est le plus étroitement liée ou la loi qui lui est matériellement la plus appropriée ou la loi que la ou les parties impliquées considèrent comme la plus adaptée pour défendre leurs intérêts, et ce dans le respect de la méthodologie de type fonctionnaliste.

C) Abandon des constructions fondées sur la loi de nationalité

67. Il a déjà été signalé l'influence de la codification européenne et de son choix de considérer la nationalité comme un élément déterminant face au choix du domicile opéré en Amérique latine. Toutefois, prenant en compte que le domicile emportait un large consensus, le code accordait à chaque État le droit d'appliquer, en plus des lois de nationalité et de domicile, « les lois qu'il a ou aura adopté ultérieurement dans son droit interne » (article 7). Cela permettait de faire entrer des règles fondées sur des principes territorialistes. La majorité des pays de la Caraïbe ont fait ce choix197, hormis Cuba et la République Dominicaine qui, fidèles à la tradition juridique espagnole et française, se sont fondés sur le principe de nationalité. Cela était cohérent au regard des dispositions de l'article 3.3º du code civil. Conformément à cette question, qui figurait également à l'article 9 de la précédente version du code civil espagnol de 1889, le principe de nationalité régissait non seulement l'état et la capacité des personnes mais aussi les relations de famille et le droit successoral, ce qui entrainait une large application extraterritoriale des lois française, espagnole ou dominicaine, applicables aux ressortissants de ces pays où qu'ils se trouvent dans le monde.

Toutefois, l'application du droit de la nationalité qui, il y a plus d'un siècle, pouvait être justifiée dans des pays comme la France, l'Italie198, l'Espagne, les Pays-Bas, le Portugal ou la Suisse, ne parvient pas à s'implanter dans la majorité des ordres juridiques. Depuis des décennies il s'est produit un fort rejet199 suite à une vive polémique entre les défenseurs de la loi nationale et ceux de la loi du domicile. Cela a conduit à retenir la loi du lieu de résidence habituelle200. C'est le cas par exemple du code belge de DIPr201, de la loi vénézuélienne de DIPr, du projet dominicain, ou du projet argentin, où le lieu de résidence habituelle est utilisé de façon indifférenciée et au même titre que le domicile des personnes physiques, considéré comme le critère classique d'attribution. Cette solution est de plus en plus adoptée et s'impose comme mode de régulation.

Il est habituel d'exposer et d'analyser les arguments qui justifient l'une ou l'autre des solutions en signalant leurs avantages respectifs. Ainsi, par exemple, on invoque en faveur de la loi nationale : a) sa plus grande stabilité par rapport à la loi du domicile, car ce dernier peut être changé plus facilement : b) son degré de fiabilité, étant donné qu'il est plus aisé de déterminer la nationalité d'un individu que de repérer son domicile : c) sa plus grande adaptation à la culture de l'individu (race, religion, langue) : d) sa virtualité pour atteindre des solutions unitaires, par exemple pour les membres d'une même famille. Face à cela, les défenseurs de la loi du domicile avancent aussi des arguments de poids. La loi du domicile : a) s'adapte mieux aux intérêts des émigrants dans un pays étranger : b) correspond à l'intérêt des tiers qui signent des contrats avec l'étranger : c) reflète le lien le plus fort que la personne a avec son milieu socio-économique dans lequel elle développe ses activités : d) est le fruit de l'intégration de l'étranger dans son environnement et d'une société présentant plus de cohésion sans faire de différence juridique avec ses ressortissants : e) apporte une adéquation entre le lieu où le litige se produit et le droit appliqué par le juge : f) constitue le point de connexion fondé sur la loi du for, sans avoir à prendre en considération les dispositions d'un ordre juridique étranger relatif à la nationalité : g) est la meilleure solution technique aux problèmes spécifiques des apatrides ou des personnes qui ont deux ou plusieurs nationalités : et h) est mieux adaptée aux personnes morales et aux sociétés, car elle leur permet d'être plus mobile et améliore leur compétitivité, tout en conservant un lien avec le marché sur lequel elles opèrent202.

Outre le fait que la polémique a atteint un certain niveau d'abstraction, l'on peut considérer que la nationalité rend prévisible la loi applicable, même si elle est souvent inappropriée en matière de statut personnel, alors que le domicile apporte une loi plus appropriée mais difficile à déterminer dans certains cas, lui conférant son imprévisibilité. Au contraire, il peut arriver spécialement dans les relations familiales, que les particuliers présument qu'il leur sera appliqué le droit avec lequel ils sont le plus liés, à savoir celui du territoire où ils sont domiciliés depuis des années. Il leur parait dès lors surprenant que leur loi nationale leur soit appliquée alors qu'ils n'ont plus de lien réel avec elle. Dans les pays comptant un nombre élevé d'immigrants, l'application de la loi nationale pose non seulement des problèmes d'application procédurale du droit étranger, mais génère parfois une insatisfaction sociale car si d'un point de vue du spécialiste la solution s'explique, du point de vue du citoyen elle est décevante car elle est déconnectée du cas d'espèce.

Dans tous les cas, le domicile constitue un point de conciliation dans la controverse entre territorialisme absolu et personnalisme, propre à la nationalité, utilisée comme facteur personnel. Le domicile permet dans de nombreux cas d'appliquer la loi du for sans abandonner la possibilité d'appliquer le droit étranger203. En même temps, la qualification du domicile comme résidence habituelle répond à une tendance universelle pour l'assouplissement de ce concept qui est facile à vérifier et facilite la détermination du lieu d'application du droit. Ce nouveau facteur impose de s'interroger sur deux questions précises : l'interprétation de la résidence habituelle, pour pouvoir être identifiée, et la portée de son application d'une part pour les personnes physiques et d'autre part comme critère permettant de déterminer le droit applicable ou la compétence des juridictions204.

68. Nous ne nous trouvons évidemment pas face un simple problème théorique car rattacher la nationalité ou le domicile dans un système de DIPr déterminé ne constitue pas un acte neutre mais reflète les intérêts d'un État à un moment déterminé de son histoire. Les premières règles de DIPr n'optaient pas pour telle ou telle solution de façon neutre. Si la France, l'Italie, l'Espagne ou l'Allemagne ont opté pour la loi nationale pour régir le statut personnel c'était soit pour des raisons d'affirmation politique de l'identité nationale soit parce qu'à ce moment-là, ces pays étaient des pays d'émigration. Ce n'est pas par hasard, non plus, si le rejet de cette option et l'adoption de la loi du domicile se sont produits dans des pays qui traditionnellement recevaient des étrangers. Comme cela a été indiqué, dans les pays d'Amérique latine, le rattachement à la loi nationale institué par le code Bustamante, ne s'est pas ajusté aux spécificités de nombre de ces pays à l'époque qui recevaient un nombre important d'émigrants205.

Il s'agit d'un débat historique qui appartient désormais au passé. Actuellement le choix de la nationalité ou du domicile répond à d'autres besoins et se limite aux pays de tradition romano-germanique. Dans les autres pays comme les États-Unis d'Amérique, la question se limite à savoir si la règle étasunienne s'applique à une situation de droit international privé. Pour ce faire, la méthode traditionnelle de la règle de conflit sera remplacée dès lors que la situation présente suffisamment de lien avec ce pays pour déterminer la compétence de ces juridictions et l'application de son droit.

Outre ce changement de perspective, il existe des solutions de conciliation. La majeure partie des conventions de DIPr qui dans les dernières décennies ont visé à unifier le mode de résolution des problèmes de droit international privé ont utilisé comme alternative la « résidence habituelle ». Ce rattachement offre l'avantage de s'en remettre au contexte réel de la vie de la personne et, s'agissant d'un critère de fait, il évite les difficultés que posent la nationalité et le domicile206. Concrètement, la Convention interaméricaine sur le domicile des personnes physiques dans le DIPr de 1979 qualifie, en premier lieu, le domicile comme résidence habituelle. En second lieu, elle le situe comme siège principal des affaires. Et si ces deux situations ne se présentent pas, elle prendra en compte le lieu où se trouvera la personne (article 2). Cet article démontre le caractère factuel de la résidence tel qu'il est observé dans les législations comparées.

D) Modernisation du système

69. Il est évident qu'avec la présente loi type, la conception du DIPr en vigueur dans nombre de pays de la Caraïbe doit nécessairement changer. De même la loi type va modifier la conception d'une discipline juridique construite, souvent, à partir de raisonnements fondés sur une seule disposition législative dérivée de l'article 3 du code Napoléon, source de nombreuses constructions doctrinales qui s'avèrent très souvent inaccessibles aux non-initiés.

  1. L'un des éléments les plus innovants de la loi type est l'introduction de nombreuses solutions adoptées dans la codification internationale de DIPr incluant la coordination des droits en présence et qui sont clairement diversifiés. L'objectif est d'atténuer le retard pris par la majorité des pays de l'OHADAC dans l'adoption de normes d'origine conventionnelle et ainsi d'éviter les problèmes inévitables découlant du « conflit de conventions ». Le choix de ces solutions a été effectué après avoir pondéré scrupuleusement les avantages et les inconvénients dans les diverses alternatives et avec la conviction que, dans les matières juridiques, la plus acceptable est simplement celle qui entraine dans la pratique le moins d'inconvénients.
  2. La loi type, sensible à l'évolution de la société, introduit des règles adaptées aux temps nouveaux. Nombre de ses dispositions sont empreintes de droits humains en matière de DIPr pour diverses questions et situations afin de garantir, par exemple, l'accès à la justice, tempérée par la limitation logique des immunités nationales (articles 7 et 77), les droits des travailleurs (article 47) ou les intérêts supérieurs des enfants mineurs (article 38)207. La loi type est également sensible aux nouveaux phénomènes comme l'apparition d'une règlementation internationale de la consommation (article 48). De même, elle prête attention au phénomène de plus en plus courant d'une relation de famille entre deux personnes non liées par l'institution matrimoniale mais ayant des relations affectives et un projet de vie commune qui sont similaires ou identiques au mariage traditionnel. L'article 34 opte dans ce sens pour une solution modérée, en se limitant à la seule pratique nécessaire tout en étant conscient qu'il existe, de plus en plus, dans ce domaine une réglementation très spécialisée sur ce point en droit comparé.
  3. La nouvelle lecture des droits humains ainsi que le rôle de la personne dans le noyau familial et son autonomie, ne pouvait pas passer inaperçu dans une réglementation moderne de DIPr208. L'idée que les parties sont les meilleurs juges de leurs propres intérêts, constitue un argument essentiel de la construction juridique et apporte une réponse aux multiples questions qui se posent dans le cadre des relations de droit privé international209. Sans entrer dans la polémique de ces dernières années, sur ce que dénomme A.E. von Overbeck « l'irrésistible champ d'autonomie de la volonté du droit international privé »210, la loi type innove, de façon significative, avec l'idée traditionnelle de l'autonomie de la volonté dont le rayon a été considérablement restreint dans le contexte du DIPr. Dans la loi type, cette autonomie a été restreinte au champ du contrat international ce qui suppose en soi une grande avancée par rapport au modèle du code Bustamante. Toutefois, cette autonomie s'est étendue à d'autres secteurs qui vont au-delà des aires traditionnelles décentralisées211 à savoir : les relations patrimoniales dans le mariage (article 31), le divorce et la séparation judiciaire (article 33), la succession à cause de mort (article 41), les donations (article 44), les contrats en général (article 45), le contrat de travail (article 47), les contrats passés par des consommateurs (article 48) et les obligations extracontractuelles (article 52). Ce mouvement vise à assurer l'élimination des problèmes de conflits que pose le rattachement à la « nationalité » de façon complémentaire à l'action de la résidence habituelle dans ce domaine.
  4. La loi type, du point de vue de la procédure internationale, vise un objectif qui dépasse les notions traditionnelles de souveraineté, de territorialisme et de pouvoir juridictionnel. Pour ce faire, elle éclaire sur la différence qui existe entre la compétence juridictionnelle dans l'ordre civil en droit international et la compétence juridictionnelle en droit interne. Elle permet de d'établir plus facilement la juridiction du for, l'exequatur des actes émanant des autorités étrangères, elle renforce la coopération judiciaire internationale et adapte les règles de procédurales. Et, les règles relatives à l'efficacité internationale des décisions de justice impliquent également une modernisation et une rationalisation des dispositions en vigueur. Celle-ci doit permettre en meilleure adéquation entre les critères techniques et la justice, ce qui s'avère nécessaire à la résolution de l'un des problèmes qui a le plus d'impact dans le domaine du droit international privé. Pour des raisons pratiques et de bonne technique législative, il a été considéré sur ce point que les autres questions doivent rester dans le champ de la matière régie par les règles procédurales de chaque État en particulier.

4. Choix quant à son acceptation

70. Le DIPr constitue un instrument essentiel pour les relations entre les sociétés afin de faciliter la mobilité des personnes, l'échange des biens et des services, ainsi que de promouvoir l'intégration. Dès les premières étapes de travail de codification, deux choix essentiels se sont présentés. Le premier porte sur une approche globale et vise à établir un corpus des règles englobant toutes les relations de droit international privé. Le second opte pour un processus graduel et progressif et comprend des instruments internationaux sur des questions particulières. Le choix opéré par la loi type OHADAC de DIPr, sans méconnaitre l'œuvre codificatrice internationale construite sur les conventions internationales, consiste à fournir des réponses aux transactions internationales privées dans un monde globalisé, et ce particulièrement dans le cadre des processus d'intégration interaméricaine. Mais cette mission doit être menée avec mesure et prudence et être coordonnée avec la pratique consolidée des États caribéens et de leur environnement immédiat. En outre, la loi type n'exclut pas l'application de dispositions spécifiques relatives au DIPr et contenues dans d'autres lois, tant que les règles qu'elles établissent sont d'ordre général. L'article 2 exclut expressément toutes matières qui, par leur spécificité, devraient être contenues dans une loi spéciale, comme c'est le cas de l'arbitrage212 ou de la faillite.

Le caractère général de la loi type doit, cependant, être nuancé du point de vue de l'adhésion d'un État de la zone OHADAC :

  1. Il ne s'agit pas d'imposer un choix entre tout ou rien. Actuellement, il existe des mécanismes qui, tout en favorisant l'autonomie de la volonté, permettent de concilier les éventuels intérêts en présence. La spécialisation des solutions apportées à des problèmes spécifiques offre aussi une possibilité de choisir une spécialité : il ne s'agit pas d'incorporer toutes les règles relatives à la loi nationale, ou à celle du domicile, ou encore à celle de la résidence habituelle. Une sélection ad hoc est non seulement possible, mais est également un avantage. En ce sens, la présente loi type devra être vue, donc, comme un mécanisme équilibré de règles autonomes qui pourront être introduites dans le droit interne des États soit en tant que texte unique, soit comme partie d'un domaine concret des règles de droit international privé.
  2. Le choix n'est pas neutre sur le plan strictement pratique : il est vital de connaitre les conséquences de ce choix sur l'application du droit étranger. Il est indéniable que l'application de la loi nationale par le juge pose beaucoup moins de problème que l'application de la loi étrangère. En outre, il est notoire que la justice rendue en application de la loi interne, qui est parfaitement connue du juge, est de meilleure qualité. Traditionnellement, le choix pour la loi du domicile génère un fort taux d'application de la loi interne, vu le rattachement opéré entre le domicile et la compétence judiciaire. Cela dépend tant de la configuration démographique de chaque État, que du litige concret à trancher par les juridictions et, pourquoi pas aussi, des règles de compétence juridictionnelle internationale qui reconnaissent la compétence à leurs juridictions. Cette évolution correspond à la transformation sociale de ces dernières décennies. Les grands mouvements migratoires donnant souvent lieu à ce que des personnes disposent d'une double nationalité ont eu pour conséquent de faire perdre de l'importance à la règle de rattachement par la nationalité.
  3. L'emploi préférentiel de la résidence habituelle comme critère de rattachement facilite la coordination des solutions établies dans les instruments les plus modernes de coopération internationale, y compris ceux auxquels participent plusieurs pays de la zone OHADAC, comme c'est le cas de le Convention de La Haye du 19 octobre 1996 relative à la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et la coopération en matière de la responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants.

Par ces prémisses, la loi type entend servir de guide pour le développement de la codification du DIPr dans les pays de la zone OHADAC et de référence pour les autres initiatives de ce type qui se produiront dans l'hémisphère américain.

71. La travail de codification est extrêmement complexe dans un domaine aussi débattu que le DIPr. Si le texte est trop technique et détaillé, il risque d'imposer des constructions abstraites qui sont dans la majorité des cas le fruit de débats académiques stériles, éloignés des intérêts concrets de la société caribéenne. Indépendamment de son inadéquation aux besoins actuels, le code Bustamante est l'exemple d'un échantillon de ce type de texte qui manque véritablement de signification réelle. Par contre, en optant pour la solution contraire, c'est-à-dire en élaborant un système excessivement simple et généraliste, le risque serait de faire perdre tout leur sens aux réponses posées par le législateur. Cela rendrait leur application par les juges diffuse et entrainerait une faillite de la sécurité juridique indispensable en DIPr.

La loi type a pour objectif, dans la mesure du possible, de corriger cette situation pour atteindre ce qui constitue les deux buts suprêmes de justice et de sécurité juridique dans le cadre des relations de droit international privé. Elle vise également à ajuster ses dispositions aux caractéristiques et aux besoins propres d'une réalité sociale, économique et humaine des pays de la zone OHADAC. Plus concrètement, les objectifs poursuivis sont : a) résoudre les problèmes des différents systèmes de DIPr, qui présente des contradictions entre les codes et les lois spéciales : b) adapter la législation de DIPr à la réalité sociale des États concernés : c) mettre en adéquation les solutions internes et les solutions pratiques mises en œuvre dans la codification internationale, plus particulièrement à partir des expériences menées à la Conférence de La Haye de DIPr à l'échelle mondiale et à la Conférence spécialisée interaméricaine de DIPr à l'échelle de l'Amérique latine. Et ce, sans perdre de vue les solutions d'unification du DIPr posées par l'Union européenne et qui sont en application dans quelques pays de l'OHADAC du fait de leur ordre véritablement européen : d) adapter les solutions, existant dans les pays concernés, au développement universel de la matière et aux législations les plus récentes et qui sont devenus des instruments valable pour un développement harmonieux des relations juridiques internationales.

Par conséquent, les trois principaux objectifs poursuivis par la présente loi type sont : la transparence, la modernité et l'ouverture internationale. Pour ce faire, toutes les dispositions de DIPr nécessaires pour un État de la Caraïbe, exprimées dans une formulation simple et précise, ont été regroupées dans un seul et unique texte.

5. Structure du texte proposé

72. Les remarques qui ont été formulées jusqu'à présent permettent d'établir les lignes directrices de la présente loi et de justifier le choix d'une loi spéciale comme technique législative adéquate et comme configuration tripartite de la matière régie. Il permet également d'entrevoir les influences quant aux solutions adoptées. Une fois la configuration tripartite acceptée - compétence judiciaire, loi applicable, reconnaissance et exécution des décisions – se pose la question du choix fondamental. Faut-il traiter de façon spécifique les institutions de droit privé dans leur ensemble et par rubrique et ainsi prévoir des solutions pour chacune d'elles (comme cela se fait partiellement dans la loi suisse de DIPr, dans le code belge de DIPr ou dans le code panaméen de DIPr) : Ou, faut-il au contraire introduire à l'intérieur de chaque rubrique les institutions en question : Il a été décidé d'opter pour cette dernière proposition car elle permet à l'opérateur juridique d'individualiser la question précise qui se pose en DIPr au moment de trancher concrètement. Cette dernière technique est celle adoptée par la loi italienne de DIPr, ainsi que par le projet uruguayen et le projet dominicain. En outre, le choix de la loi spéciale ne présente pas seulement un caractère autonome de DIPr, mais au gré des besoins et pour des raisons pratiques, il facilite plutôt son actualisation213.

73. Le titre I (« Dispositions communes ») est précédé de dispositions portant sur l'objet de la loi type qui régit les rapports privés internationaux à caractère civil et commercial. Ces dispositions communes déterminent ensuite l'étendue et les limites de la compétence juridictionnelle caribéenne, la détermination du droit applicable et les conditions de reconnaissance et d'exécution des décisions étrangères tout en procédant à trois exclusions expresses : la matière administrative, l'arbitrage commercial et la faillite ou autres procédures analogues. Puis, la loi type énonce deux réserves générales pour son application. En premier lieu, elle donne préférence aux traités internationaux ratifiés par l'État qui incorpore la loi ce qui signifie que ces traités prévaudront sur la loi type. En second lieu, elle donne également préférence aux lois spéciales qui régissent les rapports privés à caractère international. Le titre termine par un article sur la définition des critères déterminant la loi du domicile et de la résidence habituelle, pour les personnes tant physiques que morales.

74. Le titre II (« Étendue et limites de la compétence juridictionnelle caribéenne en matière civile et commerciale ») régit les conditions dans lesquelles des tribunaux d'un État ayant adhéré à la loi type peuvent être saisis et les limites posées à leur compétence au regard d'une série de critères rattachant les rapports privés internationaux et ces tribunaux. Ces critères ont qualité de for de compétence et tiennent compte des intérêts ou des objectifs de politique législative de l'État en question.

Les dispositions régissent le for exclusif en attribuant une compétence exclusive, unique et indérogeable aux juridictions de l'État qui incorpore la loi type sans qu'une autre juridiction ne puisse être saisie du litige : les immeubles se trouvant sur son territoire, les sociétés, les immatriculations réalisées sur les registres de cet État, la propriété intellectuelle, la reconnaissance et l'exécution des décisions de justice sur le territoire de cet État ainsi que les décisions arbitrales rendues à l'étranger, les mesures conservatoires qui sont exécutables sur son territoire et les questions relatives à la nationalité. En second lieu, il est prévu deux fors généraux de compétence des tribunaux de l'État qui incorpore la loi type, quel que soit le domaine concerné si les règles de compétence attribuent la juridiction à ses tribunaux ou si le domicile du défendeur se situe sur son territoire. En troisième lieu, il est traité des fors spéciaux quant au domaine de compétence. Il s'agit de champs matériels spécifiques qui entrent dans les fors spéciaux et dans ces cas, les juridictions de l'État qui incorpore la loi type ne seront pas compétentes au regard des fors généraux, sauf s'il ne s'agit pas d'un domaine de compétence exclusif. Chacun de ces fors régit une matière particulière ou une institution donnée ou une relation juridique concrète au sein d'une même matière pour laquelle il s'avère impossible que deux fors soient susceptibles d'être compétents.

À cela s'ajoute le « for de nécessité » dans le cas où l'affaire présente un lien avec un État qui incorpore la loi type sans pouvoir l'inclure dans la compétence judiciaire internationale d'un des tribunaux relevant des différents États concernés par cette affaire, ou si la reconnaissance de la décision rendue à l'étranger est rejetée sur le territoire de l'État qui incorpore la loi type. Il est prévu que les juridictions caribéennes pourront s'abstenir de juger, à la demande des parties, ou surseoir à statuer si des motifs apparaissent hors de leur territoire et justifient ce que les Anglo-Saxons dénomment le forum non conveniens.

75. Dès lors que les questions relatives à la compétence judiciaire internationale seront élucidées, il conviendra, alors, de s'interroger sur le droit applicable. Ce point est traité dans le titre III qui est organisé en deux chapitres.

Le premier comprend les « règles de conflit de lois », ayant pour objet de fournir une réponse quant au droit applicable en droit international privé pour les personnes, les rapports de famille, la protection des incapables et les pensions alimentaires, les successions et les donations, les obligations contractuelles, les obligations non contractuelles et les biens.

Quant aux choix spéciaux que la loi type propose, il faudra prendre en compte :

  1. Que les réponses fournies aux questions sur le droit applicable ne sont pas en contradiction avec les engagements conventionnels de l'État qui incorpore la loi type. Dans ce cas, il conviendra d'utiliser la technique d'incorporation au droit en se référant au contenu matériel de la Convention par effet erga omnes.
  2. Que la règle choisie est celle de conflit multilatéral dans sa dimension fonctionnelle, une solution préférable à celle appliquée depuis presque deux siècles et ce jusqu'à une bonne partie du XXe siècle. Cette solution se caractérise par des critères matériels, sur lesquels porte le cas d'espèce, avec des assouplissements, par des points de connexion successifs ou alternatifs, tout en recherchant la solution la plus juste.
  3. En matière d'obligations contractuelles, il a été choisi de reprendre les réponses apportées par la Convention interaméricaine sur le droit applicable aux contrats internationaux signée au Mexique le 17 mars 1994 et qui est l'un des textes juridiques interaméricains présentant la meilleure précision technique. Entre autres, il s'agit de transférer au juge le pouvoir de déterminer, à défaut de choix des parties, le droit applicable en recherchant au cas par cas le lien étroit que présente le contrat avec tel ou tel ordre juridique.
  4. Si le champ matériel du titre prête une attention toute particulière à la matière civile et commerciale, il s'est avéré opportun de donner une réponse au droit applicable en matière de contrat de travail. En effet, le domaine du droit du travail révèle que le travailleur est la partie faible au contrat de travail et de ce fait requiert une protection particulière.

76. Le deuxième chapitre comprend un bloc normatif portant sur les « règles d'application » qui sont destinées au juge ou à l'autorité nationale chargée de mettre en application les « règles de conflit de lois ». Ce chapitre offre des réponses aux problèmes généraux d'application des règles de conflit et traite de ces règles qui ont, dans le passé, nourri la jurisprudence et la doctrine à cause de l'imperfection de leur énonciation dans les textes antérieurs. La loi type fournit un nouveau modèle de règle de conflit et fait disparaitre nombre de problèmes dont nous ne pouvons établir la liste détaillée, par exemple le modèle contenu dans la Convention de la CIDIP sur les règles générales de droit international privé de 1979214, qui ne pose pas de problème particulier entre les États caribéens. Cela explique pourquoi ce chapitre est rédigé dans des termes très concis afin de simplifier215, par exemple, l'exclusion du renvoi. Toutefois, il convient de prêter attention aux régimes de détermination et d'interprétation de la loi étrangère contenant des règles de droit public ainsi qu'au recours à l'ordre public comme mode de correction fonctionnelle. Et, sans s'en remettre aveuglément à la tradition, il est apparu opportun d'intégrer dans la loi type trois institutions qui, malgré leur formulation dans le passés, continuent d'exister de remplir de nos jours un rôle important : l'adaptation, le renvoi à un ordre pluri-législatif et les droits acquis.

77. La troisième interrogation en DIPr porte sur la reconnaissance et l'exécution des décisions et des actes étrangers. C'est l'objet du titre IV qui se réfère aux décisions de justice étrangères et comprend des dispositions complémentaires spécifiques sur la reconnaissance des actes juridiques établis à l'étranger et plus particulièrement sur les actes en matière de juridiction gracieuse, ce à quoi s'ajoute un domaine particulièrement sensible dans la société caribéenne à savoir la reconnaissance des adoptions et les décisions relatives aux liens de filiation paternelle rendus à l'étranger. Enfin, ce titre apporte une réponse nécessaire quant à l'efficacité des actes publics étrangers.

6. Méthodologie de travail et participants

78. La méthodologie qui a été adoptée s'est fondée sur la compilation, l'analyse et la sélection de l'information disponible sur le DIPr des États de la zone concernée à partir d'études par domaines, certaines basées sur un régime national spécifique et d'autres centrées sur le dénominateur commun résultant d'appartenance des États à la même orientation juridique. C'est le cas des territoires qui sont régis par les régimes de droit britannique, français, hollandais et étatsunien. Cette méthodologie a permis de traiter une information à la fois quantitative et qualitative ayant permis de fournir une vision systématique et multidimensionnelle des règles existant dans la zone concernée.

79. Au cours de la première étape, un questionnaire a été réalisé et adressé aux territoires et aux États de la zone OHADAC afin de connaitre les solutions concrètes qui sont appliquées en matière de DIPr.

D'une façon générale, il était demandé dans ce questionnaire de faire une brève description de la situation politique, sociale et économique du territoire ou de l'État concerné, puis de répondre aux questions suivantes :

  1. Appartenance du territoire concerné à un système d'intégration économique régional ou à un Traité de libre-échange :
  2. Rattachement de l'ordre juridique à une famille spécifique, tant d'un point de vue du droit matériel que de celui du DIPr :
  3. Caractéristiques de l'ordre interne de DIPr, à savoir existe-t-il des lois spéciales ou des projets de réforme allant dans ce sens. Les dispositions figurent-elle dans des corpus législatifs différents : Le code civil est-il la base de l'ordonnancement juridique : Ou enfin les solutions émanent-elles de la propre production créatrice des juges :
  4. Liste des règles de droit interne qui fournissent une réponse : a) aux questions de la compétence judiciaire internationale, b) aux questions relatives au droit applicable et, c) aux questions de reconnaissance et d'exécution des décisions de justice.
  5. Participation aux traités internationaux de DIPr, date d'incorporation et mention des réserves éventuelles ou des déclarations interprétatives émises : a) Traités multilatéraux (de la Conférence de La Haye de DIPr, de la CNUDCI, d'UNIDROIT, des Conférences spécialisées sur le DIPr, et autres) : b) Traités bilatéraux : de reconnaissance et d'exécution des décisions en matière civile et commerciale, d'assistance judiciaire en matière civile, de nationalité, d'adoption internationale, de protection des mineurs, et autres. Ce panorama conventionnel permet ensuite de déterminer la portée de la participation des États et des territoires de l'OHADAC dans les traités internationaux de DIPr, tant sur le plan multilatéral, au regard principalement de la CIDIP et de la Conférence de La Haye de DIPr, que sur le plan bilatéral. Cet examen visait deux objectifs essentiels, en premier lieu, il permet d'observer le niveau d'acception des règles conventionnelles susceptibles de servir d'inspiration à la rédaction de la loi type. En second lieu, il permet de vérifier les contradictions que ces instruments pourraient susciter dans une réglementation actuelle de DIPr et d'avertir les États destinataires que l'adoption du projet de loi type, en totalité ou partiellement, risquerait de faire renoncer à certaines dispositions.
  6. Position jurisprudentielle (“les grands arrêts de la jurisprudence en matière de droit international privé”). Il s'est agi d'obtenir le plus d'informations possible sur les décisions des juridictions des territoires et des États membres concernés en matière de relations de droit international privé. Cette information a été d'une inestimable utilité pour la rédaction du texte de la loi type et pour le choix des solutions concrètes à adopter dans les différents domaines.

Les réponses aux questions devaient être accompagnées d'annexes législatives et jurisprudentielles de l'État ou du territoire concerné.

80. La constitution de cette base légale ou jurisprudentielle pour chaque ordre concerné a permis ensuite d'étudier les réponses aux trois questions fondamentales en la matière qui sont, en premier lieu, les règles de compétence judiciaire internationale, en second lieu, la détermination de la loi applicable et enfin, le régime de reconnaissance et d'exécution des décisions étrangères. Cet examen comprenait le DIPr stricto sensu, y inclus le droit des personnes, tant physiques que morales, le droit de la famille, le droit des successions, le droit des obligations et des contrats et le régime des droits réels.

Les matières correspondant au droit des négociations internationales, et faisant l'objet d'autres travaux parallèles menés dans le cadre de ce projet OHADAC par les professeurs Sixto Sánchez Lorenzo et Rodolfo Dávalos Fernández ont été exclus de la loi. Ces travaux feront l'objet d'une plus grande considération dans le futur compte tenu de la complexité de la matière.

81. Au cours de cette première étape, l'équipe comptait de nombreuses personnes et couvrait divers territoires caribéens. Jose Maria del Rio Villo, Rhonson Salim et James White ont pris en charge les territoires britanniques d'outre-mer. Après avoir étudié les réponses à l'enquête menée dans ces territoires, ils ont publié un document uniforme intitulé « Collective Notes on Private International la in Certain Caribbean States » : Lukas Rass-Masson, chercheur à l'Université Paris II-Assas, a mis en relief dans un autre rapport la vitalité de l'influence hollandaise dans un contexte de diversité de modèle d'émancipation. Enfin, une analyse du professeur de l'Université de Paris II-Assas Bertrand Ancel a remarqué la solidité actuelle de la souveraineté française dans l'espace OHADAC et en particulier sur quatre groupes insulaires et un territoire continental, peuplés de plus d'un million cent mille habitants.

De même à partir des résultats du questionnaire mentionné ci-dessus il a pu être menée une étude globale des systèmes nationaux de DIPr sur les règles de DIPr en Colombie, dont se sont chargés Patricia Orejudo Prieto de los Mozos, Maître de conférences en DIPr à l'Université de la Complutense de Madrid et José Luis Marín Fuentes de l'Université de Medellin. La Professeure Ana Fernández Pérez de l'Université de Castille la Mancea a traité les systèmes du Costa Rica et de Porto Rico, ce dernier étant extrêmement intéressant pour deux raisons principales. D'une part, car il se situe à la confluence de deux modèles habituellement opposés (civil law et common law) et, d'autre part, car il existe une initiative très marquée en vue de le réformer en partant d'un texte dont le rapporteur spécial a été le professeur Symeon C. Symeonides de l'Université de Willamette. Les professeurs José Carlos Fernández Rozas et Rodolfo Dávalos Fernández ont étudié le système cubain. Les professeurs José Carlos Fernández Rozas et Nathanael Concepción de la Fundación Global Democracia y Desarrollo de la República Dominicana, ont étudié le système en vigueur en République Dominicaine ainsi que le projet de loi de DIPr présentée au Parlement en 2014 et pour lequel les deux sont intervenus comme membres de la commission de rédaction. En Amérique centrale, les règles nicaraguayennes ont été examinées par Enrique Linares, chercheur boursier de l'Université de la Complutense de Madrid et les règles honduriennes l'ont été par la professeure Gaudy Bustillo de l'Université Nationale Autonome du Honduras. L'étude du système panaméen et le projet de réforme de 2013 a été menée par Dr. Juan Cárlos Aráuz Ramos, vice-bâtonnier du barreau des avocats de Panama qui a beaucoup pris en compte les apports du Doyen de la Faculté de droit de l'Université de Panama Gilberto Boutin. L'ambitieux code mexicain de DIPr a été traité par le professeur José Carlos Fernández Rozas en tant que membre de l'Académie Mexicaine de DIPr et de droit comparé. Enfin, le modèle vénézuélien a fait l'objet d'un examen exhaustif par Mme Claudia Madrid Martínez, Professeure Associée à l'Université Centrale du Venezuela et à l'Université Catholique Andrés Bello.

82. Après avoir examiné les résultats de l'enquête, le professeur José Carlos Fernández Rozas a été désigné comme rapporteur afin d'élaborer un projet préliminaire. Dans ce projet préliminaire il a été déterminé le modèle à suivre dans la perspective de la technique législative à partir du choix d'une loi spéciale. Pour ce faire le rapporteur a suivi de très près le processus mis en œuvre, d'une part, en Europe au regard des expériences autrichienne, turque, suisse, belge, italienne et polonaise, et d'autre part, en Amérique latine en prenant pour référence les processus suivis avec succès au Venezuela et au Panama et les jalons posés à Porto Rico, en Colombie et en Uruguay et, plus récemment, ceux qui se sont développés au Mexique et en République Dominicaine.

Il a fallu opérer un choix entre adopter une démarche systématique prenant en compte la matière régie ou, au contraire, préférer une structure tripartie au sein de laquelle la détermination de la compétence judiciaire internationale devrait émaner de la solution apportée aux problèmes de droit applicable. Il a finalement été décidé par le rapporteur de répondre aux questions relatives à la reconnaissance et à l'exécution des décisions en optant pour le deuxième choix.

Le projet de la loi type a été exposé par cinq membres de la Commission de rédaction du projet, à savoir : M. Bertrand Ancel, Professeur de DIPr de l'Université Paris II-Assas, M. Pedro A. De Miguel Asensio, Professeur de DIPr de l'Université de la Complutense de Madrid, M. Rodolfo Dávalos Fernández, Professeur à l'Université de La Havane et M. Santiago Álvarez González, Professeur de DIPr à l'Université de Saint Jacques de Compostelle. Suite aux larges débats entre la Commission et le rapporteur, ce dernier a intégré les observations qui en ont résulté dans un nouveau texte qui a été de nouveau discuté pour finalement donner lieu à la loi type maintenant mise à discussion.

83. Afin de faciliter les débats sur le texte en question, la commission de rédaction et le rapporteur se sont répartis les articles contenus dans le projet afin d'en effectuer les commentaires opportuns. Dans ces commentaires, le choix opéré pour chacun des articles sera justifié du point de vue de la technique législative et doctrinale, tout en s'appuyant sur des informations fournies dans les questionnaires et en se référant au droit comparé des divers ordres juridiques des États et territoires composant l'OHADAC, le tout étant assorti d'exemples d'application. Pour préparer ces commentaires, la commission de rédaction a obtenu le concours du professeur Rafael Arenas García, Professeur de DIPr de l'Université Autonome de Barcelone, et de Mª Pilar Jiménez Blanco, Maître de conférence, HDR, de l'Université d'Oviedo.

7. Diffusion publique et débat

84. La présentation de la présente loi type n'est pas une fin en soi. Elle constitue l'achèvement d'un processus dont l'objectif visait à présenter sous la forme d'un code toute une série d'études réalisées par une Commission dans le cadre d'un accord de collaboration avec ACP legal. La diffusion de ces résultats contribuera à la connaissance de la situation actuelle et suscitera un débat sur les stratégies, les instruments et la gestion d'une codification future dans ce domaine.

La loi type présente une grande importance politique ou économique et les règles proposées sont, par nature, complexes et vastes et la participation des opérateurs intéressés (à travers des lobbys ou directement) peut être facilement considérée comme insuffisante ou incomplète. De ce fait, il est important de procéder à une diffusion publique de cet instrument afin de faire connaitre ses points de vue et certaines idées qu'il développe. Pour ce faire, il convient de convier tous les opérateurs ou les personnes intéressées à faire part de leurs impressions, opinions, propositions ou de leurs craintes que la réglementation de cette matière suscite. La délibération qui s'ouvrira après la publication des résultats de cette étape s'avèrera essentielle car elle pourra disposer d'une perspective suffisante sur les opinions et les préoccupations exposées et sera dès lors en mesure d'élaborer une proposition définitive pour ensuite prendre une forme législative.

Le processus de débat public qui sera engagé à la suite de l'adoption du texte constitue, pour les groupes de pression et autres personnes intéressées, une excellente opportunité de faire connaitre leurs opinions, de défendre leurs intérêts et finalement d'interférer dans le processus décisionnaire. Pour ce faire, après cette étape de finalisation du présent instrument, s'ouvre une nouvelle phase beaucoup plus importante qui consiste à le mettre à disposition des opérateurs juridiques, des organisations et des particuliers ayant un intérêt, afin de les inviter à prendre part au processus de consultation et de débats dont il ressortira un nouveau texte consolidé. Il s'agit de mettre en place un mécanisme de participation des secteurs concernés afin qu'ils puissent présenter des propositions, formuler leur opinion ou leur désaccord en vue de l'adoption du texte final de la loi type. Un congrès international devrait évaluer les résultats et mettre en place le mécanisme de rédaction définitif.

Il ne faut pas omettre que ceux qui mettent en pratique les règles de DIPr ne sont pas les État mais les personnes : la soumission d'un litige à telle ou telle juridiction nationale ou l'application de tel ou tel droit matériel présente des conséquences qui pèsent directement sur les particuliers concernés et seulement indirectement sur les États.

85. Enfin, il convient d'ajouter qu'au moyen d'un bloc normatif intégré et structuré, l'objectif est de :

  1. Apporter en toute cohérence une série d'informations à la fois quantitatives et qualitatives qui permettra d'évaluer les instruments actuels, les possibilités qu'ils offrent et d'apprécier les besoins, ce qui présente un intérêt en vue d'optimiser la codification du DIPr dans un cadre géographique délimité. Pour ce faire, il est fourni un ensemble de ressources et de procédures essentielles permettant d'élaborer un projet de réglementation dont le contenu matériel doit être accessible à tous ceux à qui il est destiné.
  2. Préciser les besoins, à savoir la demande sociale ou institutionnelle, qui doivent être satisfaits par la loi type qui va être exposée, délimiter le domaine régi tout en en appréciant la viabilité juridique et matérielle et fixer la marche à suivre opportune.

Dans cette étape, ce sont les Parlements nationaux, les seuls dépositaires de la souveraineté populaire, qui auront la parole.

1 L'idée de compatibilité entre l'intégration régionale et la libéralisation croissante de l'économie mondiale a été reprise dans la formulation du concept de régionalisme ouvert. Émanant de l'APEC, elle a été adoptée et diffusée en Amérique latine par la CEPAL. Selon cette commission, le régionalisme ouvert consiste en une « interdépendance stimulée au départ par des signes du marché provenant de la libéralisation commerciale générale, qui s'accompagne d'accords à caractère préférentiel ». Il y a lieu de penser que les tendances actuelles à la globalisation de la concurrence et l'internationalisation de la production imposent aux pays d'ouvrir leur économie au commerce et aux investissements internationaux. Toutefois, une ouverture préférentielle (et par conséquent plus poussée) à d'autres pays de la même région n'est pas exclue ; au contraire, la libéralisation générale et l'ouverture préférentielle peuvent se compléter, dans le but d'améliorer la compétitivité et de dynamiser l'économie. Vid. M.R. Agosin, “Las experiencias de liberalización comercial en América Latina: lecciones y perspectivas”, Pensamiento Iberoamericano, nº 21, 1992, pp. 13–29, spéc. p. 15. M. Kuwayama, Open Regionalism in Asia Pacific and Latin America: A Survey of the Literature, Santiago du Chili, Cepal, 1999, et l'œuvre compilée du même auteur, Nuevas políticas comerciales en América latina y Asia. Algunos casos nacionales, Santiago de Chile, Cepal, 1999.

2 J.C. Fernández Rozas, Sistema del comercio internacional, Madrid, Civitas, 2001, nº 98 et seq.

3 Cela ne correspond pas à la notion « d'intégration économique ». En Amérique latine, depuis sa création, la CEPAL a préconisé une intégration commerciale dans la région, et a tenté en quelque sorte de la concrétiser par le biais du processus d'intégration dans le cadre de l'Association latino-américaine de libre-échange (ALALE) et, par la suite, de l'Association latino-américaine d'intégration (ALADI).

4 P. McClauren, “The Status of Consumer Protection Policy in the Caricom Region”, L'intégration économique régionale et la protection du consommateur. Regional economic integration and consumer protection. La integración económica regional y la protección del consumidor, Cowansville, Québec, Blais, 2009, pp. 277-294.

5 G. Ibarra Pardo, “Políticas de competencia en la integración en América latina”, Integración Latinoamericana, septembre 1993, pp. 45-51.

6 J.C. Fernández Rozas, “Un nuevo mundo jurídico: la lex mercatoria en América Latina”, Estudios sobre Lex Mercatoria. Una realidad internacional, Mexico D.F., Instituto de Investigaciones Jurídicas. Universidad Nacional Autónoma de México, 2006, pp. 61-127.

7 M.M. Fogt, “Private International Law in the Process of Harmonization of International Commercial Law”: the ‘Ugly Duckling'?”, Unification and Harmonization of International Commercial Law: Interaction or Deharmonization?, Alphen aan den Rijn, Kluwer Law International, 2012, pp. 57-103.

8 Cf. M. Virgós et F.J. Garcimartín Alférez, “Estado de origen vs. Estado de destino”, InDret. Revista para el análisis del Derecho, 4/2004, p. 6. http://www.indret.com/pdf/251_es.pdf.

9 G.A.L. Droz, “L'harmonisation des règles de conflits de lois et de juridictions dans les groupes régionaux d'États”, Études de droit contemporain (VIème Congrès international de droit comparé, Hambourg, 1962), Paris, Cujas, 1962, pp. 275-292.

10 L. Limpens, “Relations entre l'unification au niveau régional et l'unification au niveau universel”, Rev. int. dr. comp., 1964, pp. 13-31.

11 Sur le plan politique, outre les institutions propres à chaque sous-région, le Groupe de Río bénéficie d'une certaine influence. Composé à l'origine de dix pays d'Amérique du Sud, du Panama et du Mexique, d'un représentant de l'Amérique centrale et d'un de la Caraïbe, il comprend actuellement : l'Argentine, le Bélize, la Bolivie, le Brésil, le Chili, la Colombie, le Costa Rica, Cuba, l'Équateur, le Guatemala, la Guyane, Haïti, le Honduras, la Jamaïque, le Mexique, le Nicaragua, le Panama, le Paraguay, le Pérou, la République Dominicaine, El Salvador, le Suriname, l'Uruguay et le Venezuela. Il constitue un mécanisme de consultation et de coopération qui veille au maintien de la démocratie et coordonne les positions des États concernant les relations extérieures de l'Amérique latine par l'intermédiaire de chefs d'État et de gouvernement de la région. Conçu en tant que Mécanisme permanent de consultation et de concertation politique (MPCCP), le Groupe de Río est, à l'heure actuelle, le forum de discussion le plus important d'Amérique latine et de la Caraïbe.

12 J.C. Fernández Rozas, “Los modelos de integración en América latina y el Caribe y el Derecho internacional privado”, Iberoamérica ante los procesos de integración. Actas de las XVIII Jornadas de Profesores de Derecho Internacional y Relaciones Internacionales, Madrid, BOE, 2000, pp. 151-192.

13 E. Pérez Vera, “Reflexiones sobre los procesos de integración regional”, RIE, 1977, pp. 669-700, spéc. p. 699.

14 Cf. K.P. Berger, The Creeping Codification of the Lex Mercatoria, La Haye, Kluwer, 1999, p. 230.

15 J.J. Garcimartín Alférez, “La racionalidad económica del Derecho internacional privado”, Cursos de Derecho internacional de Vitoria-Gasteiz 2001, Servicio Publicaciones Univeridad del País Vasco, 2002, pp. 87-154, spéc. pp. 100-101.

16 F. Rigaux, “Codification of Private International Law: Pros and Cons”, Lousiana L. Rev., vol. 60, nº 4, 2000, pp. 1321-1330.

17 À titre d'exemple, il convient de se référer au processus d'unification qui a eu lieu à l'époque au Benelux concernant le « conflit de lois ». Vid. L.I. de Winter, “La nouvelle version du Projet Benelux de loi uniforme de droit international privé”, Rev. crit. dr. int. pr., 1968, pp. 577-606 ; K.H. Nadelmann, “The Benelux Uniform Law on Private International Law”, Am. J.Comp. L., vol. 18, 1970, pp. 406-419.

18 Vid. infra commentaire des art. 1 et 3.2 de la présente loi type.

19 En 1950, la CEPAL a prescrit des recommandations aux pays d'Amérique latine afin que, lors de l'élaboration de programmes et de mesures économiques incitatives, ils prennent en compte les possibilités d'augmentation de la demande moyennant l'échange réciproque, dans le but de parvenir à une meilleure intégration de leurs économies.

20 F. Rueda Junquera, “Integración económica en América Latina y el Caribe. Del regionalismo cerrado al regionalismo abierto”, El Estado de Derecho Latinoamericano. Integración económica y seguridad jurídica en Iberoamérica (I. Berdugo Gómez de la Torre et R. Rivero Ortega, eds.), Salamanca, Ediciones Universidad de Salamanca, 2003, pp. 123–161.

21 J.C. Fernández Rozas, “El marco general de la integración latinoamericana”, El Tratado de Libre Comercio, la integración comercial y el Derecho de los mercados (R. Rincón Cárdenas, E. Santamaría Ariza et J.J. Calderón Villegas”, eds.) Bogotá, Editorial de la Universidad del Rosario, 2006, pp. 152–179, spéc. pp. 161–162.

22 O. Dabène, The Politics of Regional Integration in Latin America. Theoretical and Comparative Explorations, New York, Palgrave, Macmillan, 2009.

23 M. Burac, H. Godard et F. Taglioni, “Le bassin caraïbe dans les Amériques: intégration régionale ou continentale?”, Mappemonde, nº 72, 2003-4, pp. 12-15. http://www.mgm.fr/PUB/Mappemonde/M403/Integration.pdf.

24 Vid. concernant l'Amérique latine, J. Luch English, La théorie politique de l'intégration et son application à l'Amérique latine, Louvain, Institut de Science Politique de l'Université Catholique, 1970.

25 V.gr., le Traité révisé de Chaguaramas, portant création de la Communauté des Caraïbes ainsi que du marché et de l'économie uniques de la CARICOM, le Traité de Basseterre, portant création de l'Organisation des États de la Caraïbe orientale ou l'Accord ayant établi une zone de libre-échange entre la Communauté des Caraïbes et la République Dominicaine.

26 Il s'agit d'un espace de dialogue politique créé en octobre 1992 dans le but de gérer et de coordonner l'aide financière que l'Union européenne verse aux pays de la Caraïbe signataires des conventions de Lomé et de promouvoir l'intégration et la coopération dans la Caraïbe. Font partie de cet espace : Antigua-et-Barbuda, les Bahamas, la Barbade, le Bélize, Cuba, la Dominique, la Grenade, la Guyane, Haïti, la Jamaïque, la République Dominicaine, Sainte-Lucie, Saint-Christophe-et-Niévès, Saint-Vincent-et-les-Grenadines, le Suriname et la Trinité-et-Tobago. Les territoires britanniques et néerlandais ci-après ont un statut d'observateur : Anguilla, les Antilles néerlandaises, Aruba, les îles Vierges britanniques, les îles Caïmans, Montserrat et les îles Turques-et-Caïques. Les départements français d'outre-mer situés dans la mer des Caraïbes ont également ce statut : la Guadeloupe, la Guyane et la Martinique. Vid. D.A. Mohammed, “The Cariforum-EU Economic Partnership Agreement: Impediment or Development Opportunity for Caricom SIDS?”, The Diplomacies of Small states: Between Vulnerability and Resilience, Basingstoke, Palgrave MacMillan, 2009, pp. 160-177.

27 Cette organisation a pour membres associés les îles suivantes : Antigua-et-Barbuda, la Dominique, la Grenade, Montserrat, Saint-Christophe-et-Niévès, Sainte-Lucie et Saint-Vincent-et-les-Grenadines. Elle a notamment pour objectif de promouvoir la coopération entre les États membres à la fois au niveau régional et international ainsi que l'intégration économique entre les États membres.

28 Il s'agit d'un organisme intergouvernemental de niveau régional qui comprend les chefs d'État et de gouvernement des pays d'Amérique latine et de la Caraïbe, qui se sont réunis lors du sommet de l'unité de l'Amérique latine et des Caraïbes, constitué par le XXIème sommet du Groupe de Río et par le IIème sommet CALC (sommet de l'Amérique latine et des Caraïbes sur l'intégration et le développement), à la Riviera Maya, Mexique, les 22 et 23 février 2010. Son objectif est « d'avancer de manière résolue vers une organisation qui regroupe tous les États d'Amérique latine et de la Caraïbe. »

29 P. Francescakis, “Problèmes du droit international privé de l'Afrique noire indépendante”, Recueil des Cours, t. 112 (1964-II), pp. 269-361 ; V. Babini, “Il diritto internazionale privato quale elemento di armonizzazione dei diritti dei nuovi Stati africani”, Riv. dir. int. pr. proc., vol. III, 1967, pp. 302-314 ; U.U. Uche, “Conflict of Laws in a Multi-Ethnic Setting Lessons from Anglophone Africa”, Recueil des Cours, t. 228, (1991-III), pp. 273-438.

30 G. Ngoumtsa Anou, “La régionalisation pour le droit: l'exemple de l'OHADA”, La régionalisation du droit international (S. Doumbé-Billé, coord.), Bruxelles, Bruylant, 2012, pp. 189-207.

31 C'est que l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires a adopté des lois d'uniformisation du droit matériel, appelées Actes uniformes. Applicables aux rapports internes et internationaux, ces textes remplacent le droit matériel des États membres dans le domaine uniformisé. Ils font ainsi l'économie des conflits de lois et de leurs méthodes de solution, mais dans une mesure limitée. Le droit unifié est d'abord incomplet dans la mesure où il ne règle pas toutes les questions dans le domaine qu'il s'assigne, soit parce qu'il contient des lacunes, soit parce que l'ordre communautaire préfère soumettre la question à un ordre juridique extérieur. Ainsi, certains conflits de lois demeurent et ne peuvent être réglés que par le recours aux règles de conflit nationales ou communautaires. Bien plus, le droit unifié s'applique aux situations extracommunautaires par l'entremise des règles de conflit et emprunte les mécanismes du droit international privé pour assurer le respect de ses valeurs. Ainsi s'explique l'existence d'un ordre public international de l'OHADA et des lois de police communautaires, à l'image de ce que l'on observe dans le droit de l'Union européenne. On constate alors l'émergence d'un droit international privé de l'OHADA, appelé à se développer en matière de conflits de lois et de juridictions. En comparant l'OHADA à l'expérience européenne, l'ouvrage s'attache donc à déterminer l'incidence de l'intégration juridique sur le droit international privé. Vid. G. Ngoumtsa Anou, Droit OHADA et conflits de lois, Paris, LGDJ, 2013.

32 P. Gannagé, “Observations sur la codification du droit international privé dans les États de la Ligue arabe”, Études en l'honneur de Roberto Ago, vol. IV, Milan, Giuffrè, 1987, pp. 105-123.

33 A. Payne, “The Rise and Fall of Caribbean Regionalisation”, Journ. of Common Market Studies, vol. XIX, 1981, pp. 225-280 ; H.S. Gill, “Caricom: origen, objetivos y perspectivas de integración en el Caribe”, Integración Latinoamericana, nº 191, 1993, pp. 37-44.

34 E.E. Espinosa Martínez, “La Asociación de Estados de Caribe: una nueva realidad institucional”, Economía y Desarrollo, vol. 126, nº 1, 2000, pp. 71–96.

35 A.P. Gonzales, “Caricom and Strategic Adjustment Options in the Post-Lomé World”, Les relations ACP/UE après le modèle de Lomé: quel partenariat?, Bruxelles, Bruylant, 2007, pp. 3-27.

36 En août 1998, la République Dominicaine et les pays de la Communauté des Caraïbes (CARICOM) ont signé l'accord pour la mise en place d'une zone de libre-échange entre les deux parties. La résolution 38-01 du congrès national a ratifié cet accord en février 2001. Vid. J.C. Fernández Rozas et L. Contreras, Derecho del comercio internacional y política comercial de la República Dominicana, Santo Domingo, Funglode, 2013, pp. 197 et seq.

37 J.C. Fernández Rozas, “Orientaciones del Derecho internacional privado en el umbral del siglo XXI”, Revista Mexicana de DIPr, nº 9, 2000, pp. 7-32.

38 C. Kessedjian, “Le droit international privé et l'intégration juridique européenne”, Intercontinental Cooperation through Private International Law: Essays in Memory of Peter E Nygh (T. Einhorn & K Siehr, eds), La Haye, TMC Asser Press, 2004, pp. 192 et seq.

39 S. Alvarez González, “Objeto del DIPr y especialización normativa”, Anuario de Derecho Civil, t. XLVI, 1993, pp. 1109-1151.

40 C. Mouly, “Le droit, peut-il favoriser l'intégration européenne?”, Rev. int. dr. comp., 1985, pp. 895-945 ; V. Heutger, “Worldwide Harmonisation of Private Law and Regional Economic Integration”, European Review of Private Law, vol. 10, 2002, pp. 857-864.

41 E. Jayme et C. Kohler, “L'interaction des règles de conflit contenues dans le droit dérivé de la Communauté européenne et des conventions de Bruxelles et de Rome”, Rev. crit. dr. int. pr., 1985, pp. 15-16.

42 Vid. J.Mª Gondra Romero, “Integración económica e integración jurídica en el marco de la Comunidad Económica Europea (Una aproximación al proceso de integración del Derecho en el ámbito de la Comunidad Europea, desde una perspectiva sistemático-funcional)”, Tratado de Derecho comunitario europeo, vol. I, Madrid, Civitas, 1986, pp. 275-312.

43 J.C. Fernández Rozas, “Derecho internacional privado y Derecho comunitario”, loc. cit., pp. 785-786.

44 Vid. infra, art. 45 et seq. de la présente loi.

45 Concernant l'expérience espagnole, vid. N. Downes Peirú, “Reflexiones en torno al turismo en el Derecho internacional privado español”, Anales de la Facultad de Derecho de la Universidad de La Laguna, nº 18, 2001, pp. 117-136.

46 M.C. Belderrain Boer, “Globalização e Turismo: efeitose tendências”, Relações internacionais & globalização: grandes desafíos (O. de Oliveira, coord.), 2ème éd. Ijuí: Ed.Unijuí, 1999, pp. 285-318.

47 A. Calderón Hoffmann, “Foreign Direct Investment in Latin American and the Caribbean; an Assessment at the Start of the New Millenium”, Foreign Direct Investment in Latin American: The Role of European Investors, Washington D.C., Inter-American Development Bank, 2001, pp. 17-41 ; J.P. Tuman &C.F. Emmert, “The Political Economy of U.S. Foreign Direct Investment in Latin America: A Reappraisal”, Latin American Research Rev., vol. 39, nº 3, 2004, pp. 9-28 ; J.D. Daniels, J.A. Krug et L. Trevino, “Foreign Direct Investment from LatinAmerica and the Caribbean”, Transnational Corporations, vol. 16, nº 1, 2007, pp. 27-54.

48 R. Dolzer et M. Stevens, Bilateral Investment Treaties, London, M. Nihjoff Publishers, 1995; G. Sacerdoti, “Bilateral Treaties and Multilateral Instruments on Investment Protection”, Recueil des Cours, t. 269, 1997, pp. 251-460 ; J.C. Fernández Rozas, “América Latina y el arbitraje de inversiones: ¿matrimonio de amor o matrimonio de conveniencia?”, Revista de la Corte Española de Arbitraje, vol. XXIV, 2009, pp. 13-37.

49 J.C. Fernández Rozas, Tratado de arbitraje comercial internacional en América Latina, Madrid, Iustel, 2008 ; A.M. Garro, “Enforcement of Arbitration Agreements and Jurisdiction of Arbitral Tribunals in Latin America”, J. Int'l Arb., vol. 1, nº 4, 1984, pp. 293-321 ; H.A. Grigera Naón, “Arbitration in Latin America: Overcoming Traditional Hostility”, Arb. Int'l, vol. 5, nº 2, 1989, pp. 146-148 ; R. Layton, “Changing Attitudes Toward Dispute Resolution in Latin America, J. Int'l Arb., vol. 10, 1993, pp. 123 et seq. ; D.E. González, G.F. Hritz, M. Rios et R.C. Lorenzo, “International Arbitration: Practical Considerations with a Latin American Focus”, The Journal of Structured and Project Finance, Spring, 2003, pp. 33-43 ; R. Santos Belandro, “Brisas favorables de orientación estatal impulsan, a vela desplegada, el arbitraje comercial internacional en la región”, Estudios de arbitraje. Libro homenaje al profesor Patricio Aylwin Azócar, Santiago, Editora Jurídica Chile, 2006, pp. 553-565.

50 R. Badinter, “L'universalité des droits de l'homme dans un monde pluraliste”, Revue universelle des droits de l'homme, 1989, pp. 1 et seq. ; M. Bedjaoui, “La difficile avancée des droits de l'homme vers l'universalité”, ibid., pp. p. 5 et seq. ; J.A. Carrillo Salcedo, “El problema de la universalidad de los derechos humanos en un mundo único y diverso”, Derechos culturales y derechos humanos de los inmigrantes, Madrid, Universidad Pontificia de Comillas, 2000, pp. 39–53.

51 E. Ralser, “Pluralisme juridique et droit international privé”, Revue de la recherche juridique. Droit prospectif, 2003 pp. 2547 et seq.

52 J.C. Fernández Rozas, “Los modelos de integración en América latina...”, loc. cit., pp. 151-192.

53 A. Dreyzin de Klor: El Mercosur (Generador de una nueva fuente de Derecho internacional privado), Buenos Aires, Zavalia, 1997 ; D.P. Fernández-Arroyo, “La nueva configuración del DIPr del Mercosur: ocho respuestas contra la incertidumbre”, Revista de Derecho del Mercosur, vol. 3, 1999, pp. 38-53.

54 L'originalité de l'expérience communautaire et son influence dans le cadre du DIPr est décrite avec précision dans le cours de M. Fallon, “Les conflits de lois et de juridictions dans un espace économique intégré: l'expérience de la Communauté européenne”, Recueil des Cours, t. 253, 1995, pp. 25 et seq. et dans celui de A. Struycken, “Les conséquences de l'intégration européenne sur le développement du droit international privé”, Recueil des Cours, t. 232, 1992, pp. 257 et seq.

55 Vid. J.C. Fernández Rozas, “Nuevas perspectivas de la cooperación en el ámbito de la justicia en la Unión Europea”, “Los dos pilares de la Unión Europea, Madrid, Colección Veintiuno, 1997, pp. 239-267.

56 Ce paragraphe reprend les arguments de S. Sánchez Lorenzo, Introducción al Derecho de los contratos internacionales, Santo Domingo, Funglode, 2013, pp. 36 et seq.

57 A. Borrás, “La comunitarización del Derecho internacional privado: pasado, presente y futuro”, Cursos de Derecho Internacional y Relaciones Internacionales de Vitoria-Gastez 2001, pp. 285-318 ; M. Desantes et J. L. Iglesias Buhigues, “Hacia un sistema de Derecho Internacional privado de la Unión Europea”, AEDIPr, t. IX, 2009, pp. 115-128 ; P.A. de Miguel Asensio, “Integración europea y Derecho internacional privado”, Revista de Derecho comunitario europeo, vol. 1997-1, pp. 413-445 ; id., “El Tratado de Amsterdam y el Derecho internacional privado”, La Ley (Unión Europea), nº 4510, du 30 mars 1998, pp. 1-3 ; S. Leible et A. Staudinger, “El artículo 65 TCE: ¿Carta blanca de la Comunidad Europea para la unificación del Derecho internacional privado y procesal?”, AEDIPr, t. I, 2001, pp. 89-115 ; SA. Sánchez Lorenzo, “La política legislativa de la Unión Europea en materia de Derecho internacional privado: de la técnica del carro ante los bueyes a la estrategia del avestruz”, Nuevas fronteras del Derecho de la Unión Europea (Liber amicorum José Luis Iglesias Buhigues), Valence, Tirant lo Blanch, 2012, pp. 133-145.

58 S.C. Symeonides, “Codification and Flexibility in Private International Law”, Reports of the XVIIth Congress of the International Academy of Comparative Law/Rrapports, Généraux du XVIIIeme Congrès de l'Academie Internationale de Droit Comparé (K.B. Brown and D.V. Snyder, eds.), Springer Science+Business Media, 2011, pp. 167-190.

59 E. Vassilakakis, Orientations méthodologiques dans les codifications récentes du droit international privé en Europe, Paris, LGDJ, 1987.

60 L.A. Lunz, “L'objet et les principes fondamentaux du droit international privé en URSS et dans les autres pays socialistes européens”, Journ dr. int., t. 100, 1973, pp. 97–115 ; F. Korkisch, “Neues internationales privatrecht in ostmitteleuropa”, Rabels Z., 1968, pp. 601–650 ; T. Ballarino, “Osservazioni sulla codificazione del diritto internazionale privato nell'Europa centro-orientale”, Études en l'honneur de Roberto Ago, vol. IV, Milan, Giuffrè, 1987, pp. 3-24 ; P. Kalensky, “Le droit international privé comparé des États socialistes dans leur coopération économique”, Recueil des Cours, t. 208 (1988-I), pp. 169-281.

61 Rev. crit. dr. int. pr., 1992, pp. 394–400. Vid. S.C. Symeonides, “Les grands problèmes de droit international privé et la nouvelle codification de Louisiane”, ibid., pp. 223–281 ; D.P. Fernández Arroyo, “Nuevas normas de Derecho internacional privado en el Código civil de Louisiana”, REDI, vol. XLV, 1993, pp. 615–620.

62 Le code civil du Québec, en vigueur depuis le 1er janvier 1994, comprend dans son livre dixième un système complet de DIPr contenant, en plus des questions relatives au droit applicable, celles relatives à la compétence judiciaire internationale et à la reconnaissance et l'exécution des décisions. Il utilise la loi du domicile comme lien de rattachement dominant et englobe des questions de nature commerciale. Rev. crit. dr. int. pr., 1992, pp. 574–584 et la note de E. Groffier.

63 La règle de base dans ce contexte est la Loi du 15 juin 1978 sur le droit international privé (IPRG, publiée au journal officiel autrichien, BGBI. nº 304/1978). Elle comprend 54 articles relatifs au droit applicable mais ne traite pas des questions d'ordre procédural. Vid. E. Palmer. “The Austrian Codification on Conflicts of Law”, Am. J. Comp. L., vol. 28, 1080, pp. 197 et seq.

64 Elle comprend 48 articles répartis en trois chapitres portant sur : des questions d'ordre général, le droit applicable et le droit de la procédure civile internationale.

65 L'art. 15, qui porte sur la clause d'exception, en est un exemple concret. Conformément au paragraphe 1 : « Le droit désigné par la présente loi n'est exceptionnellement pas applicable si, au regard de l'ensemble des circonstances, il est manifeste que la cause n'a qu'un lien très lâche avec ce droit et qu'elle se trouve dans une relation beaucoup plus étroite avec un autre droit. » Vid. A. Bucher, “La clause d'exception dans le contexte de la partie générale de la LDIP”, La loi fédérale de droit international privé: vingt ans après, Actes de la 21e Journée de droit international privé du 20 mars 2009 à Lausanne, Genève, 2009, pp. 59-74.

66 Concernant les travaux préparatoires du code, vid. M. Verwilghen, “Vers un Code belge de droit international privé”, Travaux. Com. fr. dr. int. pr., Paris, 2001, pp. 123 et seq. ; J. Erauw, “De codificatie van het Belgisch internationaal privaatrecht met het onderwerp van Wetboek I.P.R.”, Rechtskundig weekblad, vol. 65., 2001-2002, pp. 1557-1566 ; G. Stuer et C. Tubeuf, “La codification en droit international privé”, Rev. dr. U.L.B., 2003-2, pp. 143 et seq. Concernant la signification de cette importante initiative législative vid., pour tous, M. Fallon, “La loi belge de droit international privé belge pour un centenaire”, Travaux Com. fr. dr. int. pr. (2004-2006), pp. 98-118 ; vid., également, J.Y. Carlier, “Le Code belge de droit international privé”, Rev. crit. dr. int. pr., 2005, pp. 11-45 ; N. Watté et C. Barbé, “Le nouveau droit international privé belge: étude critique des fondements des règles de conflits de lois”, Journ. dr. int., vol. 133, 2006, pp. 851-927.

67 V.gr. art. 19 du code de DIPr belge ; L. Barnich, “La clause d'exception dans la proposition de loi portant le Code de droit international privé”, Mélanges John Kirkpatrick, Bruxelles, Bruylant, 2004, 59-72.

68 M. Verwilghen, “La place de la nationalité dans le Code de droit international belge”, Hommage a` Francis Delpérée: itinéraires d'un constitutionnaliste, Bruxelles, Bruylant, 2007, pp. 1687-1701.

69 H. Fulchiron, “Le mariage entre personnes de même sexe en droit international privé au lendemain de la reconnaissance du ‘mariage pour tous'”, Journ. dr. int., 2013, pp. 1055-1113.

70 http://pil.mateuszpilich.edh.pl/New_Polish_PIL.pdf. T. Pajor, “Introducción a la nueva Ley polaca de Derecho Internacional Privado, de 4 de febrero de 2011 (seguida del texto de la ley traducido al inglés)”, REDI, vol. LXIV, 2012, pp. 263 et seq.

71 V.gr., celle employée par le législateur français à travers des réformes du Cc opérées par la loi nº 72-3 du 3 janvier 1972 sur la filiation ou la loi 75-617 du 11 juillet 1975 portant réforme du divorce. Concernant la première vid. Rev. crit. dr. int. pr., 1972, pp. 154-155 ; R. Sabatier, “Le projet de loi sur la filiation, mystique ou réalisme?”, Semaine Juridique, 1971, I, p. 2400 ; J. Foyer, “La reforme du droit de la filiation et le droit international privé”, Travaux Com. fr. dr. int. pr. (1969-71), Paris, Dalloz, 1972, pp. 107-125 ; H. Batiffol et P. Lagarde, “L'improvisation de nouvelles règles de conflit de lois en matière de filiation”, Journ. dr. int., t. 99, 1972, pp. 765-796 ; M. Simon-Depitre et J. Foyer, Le nouveau droit international de la filiation, Paris, L. Techniques, 1973 ; A. Huet, “Les conflits de lois en matière d'établissement de la filiation depuis de la loi du 3 janvier 1972”, Les conflits de lois en matière de filiation, Paris, LGDJ, 1973, pp. 19-63 ; D. Alexandre, “Les conflits de lois en matière d'effets de la filiation”, ibid., pp. 65-94. Concernant la deuxième vid. Ph. Francescakis, “Le surprenant article 310 nouveau du Code civil sur le divorce international”, Rev. crit. dr. int. pr., 1975, pp. 553-594 ; A. Cornec, “Le nouveau divorce international (article 310 du Code civil)”, Gazette du Palais, 1976, 2, pp. 612-614 ; J. Foyer, “Tournant et retour aux sources en droit international privé (l'article 310 nouveau du Code civil)”, Semaine Juridique, 1976, I, pp. 2762 et seq. ; M. Simon-Depitre, “Le nouvel article 310 du Code civil”, Journ. dr. int., t. 103, 1976, pp. 823-830 ; T.E. Carbonneau, “The New Article 310 of the French Civil Code for International Divorce Actions”, Am. J. Comp. L., vol. 26, 1978, pp. 446-460.

72 V.gr., celle employée par le législateur espagnol par l'intermédiaire des réformes successives du code civil. Dans certains cas, elle a introduit de nouvelles règles relatives aux relations internationales dans un contexte de réforme du droit matériel. Concrètement, la réforme du code civil opérée par la loi 30/1981 a préféré ajouter la règle de conflit relative à la séparation et au divorce en complément de la réglementation matérielle de cette institution, au titre IV du livre I du code civil. Au contraire, la loi 21/1987 a bénéficié du cours de la réforme des règles matérielles en matière d'adoption pour modifier les règles de conflit contenues dans le titre préliminaire du code civil sur la filiation.

73 L. de Lima Pinheiro, “The Metholology and the General part of the Portuguese Private International Law. Codification: A Possible Source of Inspiration for the European Legislator?”, Yearb. Priv. Int'l L., vol. 14, 2012-2013, pp. 153-172.

74 ILM, vol. XXIV, 1985, pp. 1002–1014, et la note de A. Garro, ibid., pp. 997–1001 ; Rev. crit. dr. int. pr., 1986, pp. 192 et seq. et la note de J. Lisbonne ; J. Samtleben, “Neues Internationales Privatrecht in Perú”, Rabels Z.,1985, pp. 486–521.

75 Vid., inter alia, P. Wigny, “Le ‘Restatement' américain du droit international privé”, Rev. crit. dr. int. pr., 1936, pp. 67–85 ; M. Giuliano, “II diritto intenazionale privato e processuale nel Restatement of the Laws 2d.”, Riv. dir. int. pr. proc, 1974, pp. 226–229 ; B. Hanotiau, Le droit international privé américain: du premier au second Restatement of the Law, Conflicts of Laws, Paris, LGDJ, 1979 ; R.J. Weintraub, “The Restatement Third of Conflict of Laws: an Idea whose Time has not Come”, Indiana L. J., vol.75, nº 2, 2000, pp. 679-686.

76 Vid. G. Velázquez, Directivas fundamentales del Derecho internacional privado puertorriqueño, Rio Piedras, Editorial de la Universidad de Puerto Rico, 1945.

77 L. Muñoz Morales, Reseña histórica y anotaciones al Código Civil de Puerto Rico, Rio Piedras, Junta Editora UPR, 1947 ; G. Velázquez, Directives Fundamentales del Derecho Internacional Privado, Rio Piedras, Junta Editora UPR, 1945) ; S. Symeonides, “Revising Puerto Rico's Conflicts Law: A Preview”, Colum. J. Trans'l L., vol. 28, 1990, p. 13 et seq.

78 A. Fernos López-Capero, “Perspectiva actual del Derecho internacional privado puertorriqueño”, Revista Jurídica de la Universidad Interamericana de Puerto Rico, vol. XXI-3, p. 589 et seq.

79 J.E. Briceño Berrú, “Reflexiones sobre la codificación del DIPr en América latina”, Studi in memoria di M. Giuliano, Padoue, Cedam, 1989, pp. 157-192 ; D.P. Fernández Arroyo, La codificación del DIPr en América latina, Madrid, Eurolex, 1993 ; T. de Maekelt, “General Rules of Private International Law in the Americas. New Approach”, Recueil des Cours, t. 177 (1982-IV), pp. 193-379 ; L. Péreznieto Castro, “La tradition territorialiste en droit international privé dans les pays d'Amérique Latine”, Recueil des Cours, t. 190 (1985-I), pp. 271-400 ; H. Valladão, “Actualisation et spécialisation des normes du droit international privé des États Américains”, German Yearb. Int'l. L., 1978, pp. 335-36.

80 J.E. Briceño Berrú, “Las convenciones interamericanas sobre DIPr de 1984”, Riv. dir. int. pr. proc., 1987, pp. 429-452 ; C. Delgado Barreto, “Las relaciones de los sistemas conflictuales en las normas generales de Derecho internacional privado aprobadas por la CIDIP II de Montevideo de 1979”, Estudios de Derecho internacional. Libro homenaje al profesor Santiago Benadava, vol. 2, Santiago du Chili, Librorecnia, 2008, pp. 377-405 ; D.P. Fernández Arroyo, “La CIDIP VI: ¿Cambio de paradigma en la codificación interamericana de Derecho internacional privado”, Rev. mexicana DIPr, nº 13, 2003, pp. 114-172 ; W. Goldschmidt, “Normas generales de la CIDIP II: Hacia una teoría general del Derecho internacional interamericano”, Anuario Jurídico Interamericano, 1979, pp. 141-155 ; T.B. de Maekelt, Conferencia especializada de DIPr (CIDIP I): análisis y significado de las Convenciones aprobadas en Panamá, 1975, Caracas, Univ. Central de Venezuela, 1979 ; id., Normas generales de DIPr en América, Caracas, Univ. Central de Venezuela, 1984 ; D. Opertti Badán, “La codificación del DIPr: análisis comparativo e la labor realizada por la Conferencia de DIPr de La Haya y por la CIDIP”, España y la codificación internacional del Derecho internacional privado, Madrid, Eurolex, 1993, pp. 259-283 ; G. Parra-Aranguren, “La primera conferencia especializada interamericana sobre DIPr, Panama, 1975”, Libro homenaje a la memoria de Joaquín Sánchez Covisa, Caracas, Univ. Central de Venezuela, 1975, pp. 253-277 ; id., “Recent Developments of Conflict of Laws Conventions in Latin-America”, Recueil des Cours, t. 164 (1979-III), pp. 57-170 ; id., “La tercera conferencia interamericana sobre DIPr (CIDIP III, La Paz 1984)”, Revista de la Facultad de Derecho (Univ. Católica “Andrés Bello”), no 33 et 34, 1984-1985 (réédition) ; J. Samtleben, “Die interamerikanische Spezialkonferenz für internationales Privatrecht”, Rabels Z., 1980, pp. 257-320 ; id., “Los resultados de la labor codificadora de la CIDIP desde la perspectiva europea”, España y la codificación..., op. cit., pp. 293-302 ; A.M. Villela, “L'unification du droit international privé en Amérique latine”, Rev. crit. dr. int. pr., 1984, pp. 235-262.

81 O. Pfersmann, “Le droit comparé comme interprétation et comme théorie du droit”, Rev. int. dr. comp., vol. 53, 2001, pp. 280-281.

82 H. Batiffol, “Codificación y unificación en Derecho internacional privado”, Choix d'articles, Paris, 1976, pp. 125-136.

83 Cf. R. Sacco, “Codificare: Modo superato de ligeferare?”, Riv. dir. civ., 1983, p. 119.

84 Par exemple, la Convention interaméricaine sur les obligations alimentaires, conclue à Montevideo le 15 juin 1989, établit bien un champ d'application spatial, mais rien n'a été précisé à cet effet concernant des instruments tels que les traités de Montevideo de 1889. Il peut être déduit de la publication sur ce point dans Los Tratados de Montevideo de 1889 y su interpretación judicial, vol. I, 1ère partie, Universidad Nacional de La Plata, Argentina, 1940, une application inter-partes, qui suppose que tout litige, acte juridique ou relation juridique soit rattaché au moins à deux États contractants (toutes les questions traitées dans cette publication concernent l'Argentine et l'Uruguay).

85 Des instruments tels que la Convention interaméricaine sur les normes générales de droit international privé, conclue à Montevideo en 1979, ne prévoit rien non plus de manière explicite concernant son champ d'application spatial. Il y a également lieu de penser qu'il s'agit d'instruments inter-partes, c'est-à-dire qu'ils ne seront applicables que dans la mesure où la loi applicable est celle d'un État contractant. Un champ d'application spatial est explicitement prévu dans le cadre d'autres conventions contenant des dispositions relatives à la loi applicable, telles que la Convention interaméricaine sur l'adoption conclue à La Paz en 1984 et la Convention interaméricaine sur les obligations alimentaires mentionnée précédemment.

86 Ce code a été appelé a posteriori code de procédure civile, administrative, économique et du travail après que la partie sur la procédure économique ait été ajoutée, conformément au décret-loi 241/2006.

87 Cela a été introduit par le décret-loi 241/2006.

88 D'autres règles pertinentes en matière de droit international privé sont disséminées dans : la loi no 1289/75, qui a introduit le code de la famille ; la loi no 1313/1976, relative aux étrangers ; la loi no 50/1984, relatives aux offices notariaux d'État ; et la loi no 51/1985 relative au registre d'état civil.

89 Le 7 janvier 1988, deux décrets ont été publiés au Journal officiel : 1) le premier, qui est venu réformer et compléter le code civil pour le District fédéral en matière commune et pour toute la République en matière fédérale, et 2) le deuxième, qui est venu réformer et compléter le code de procédure civile pour le District fédéral. Peu après, le 12 janvier 1988, a également été publié au Journal officiel un décret réformant et complétant le code fédéral de procédure civile. Plus tard, le 4 janvier 1989, les réformes, ajouts et dérogations apportés à plusieurs dispositions du code de commerce ont été publiés au Journal officiel. Certaines de ces dispositions portent sur le conflit de lois et la coopération en matière de procédure internationale. Toutes les réformes susmentionnées portent sur des modifications en matière de DIPr. Dans l'exposé des motifs des réformes du code civil ainsi que du code de procédure civile du District fédéral, il a été établi que : « Le droit, entendu dans le sens où il encourage le changement social, ne peut rester inerte face aux transformations apportées par la dynamique sociale. Le développement des relations économiques, politiques, sociales et culturelles qui se forment quotidiennement entre les personnes constituant notre société et les ressortissants d'autres États composant la scène internationale ont montré la nécessité de trouver des solutions plus adaptées à notre époque. » Après s'être référé à quelques convention de la CIDIP-I, II et III, la législation nationale a été réformée pour se conformer « aux principes encadrés par les conventions » en question. Par conséquent, l'objectif principal de ces réformes a été d'ajuster les lois mexicaines aux conventions mentionnées précédemment.

90 L. Pereznieto Castro, Derecho internacional Privado, Parte General, 8ème ed., Mexique, Oxford, 2003.

91 N. González Martín, “La Conferencia Especializada Interamericana de Derecho Internacional Privado y la modernización del Derecho internacional privado latinoamericano ¿un cambio en el iter convencional hacia la Ley Modelo?”, Boletín Mexicano de Derecho comparado, 2008, pp. 511-544.

92 Vid., de manière générale, J.C. Fernández Rozas, “¿Por qué la República Dominicana necesita una ley de Derecho internacional privado?”, Gaceta Judicial, la Revista Jurídica de Interés General (République Dominicaine), Año 18, nº 329, 2014, pp. 20-31.

93 Ces articles sont une traduction littérale de leurs homologues du code civil français de 1804. Art. 14 : « L'étranger, même non résident en République Dominicaine, pourra être cité devant les tribunaux dominicains, pour l'exécution des obligations par lui contractées en République Dominicaine avec un Dominicain ; il pourra être traduit devant les tribunaux, pour les obligations par lui contractées en pays étranger envers des Dominicains. » Art. 15 : « Un Dominicain pourra être traduit devant un tribunal dominicain, pour des obligations par lui contractées en pays étranger, même avec un étranger. »

94 La loi No. 834, abrogeant et modifiant certaines dispositions en matière de procédure civile, intègre les réformes les plus récentes et les plus avancées du code de procédure civile français du 15 juillet 1978 (Journal officiel No. 9478).

95 J.M. Castillo Roldán, “Competencia judicial internacional en la República Dominicana”, http://juanmicastilloroldan.blogspot.com.es/2013/06/competencia-judicial-internacional-en.html, 13 juin 2013.

96 Art. 24 : « Lorsque le juge estime que l'affaire relève de la compétence d'une juridiction répressive, administrative, arbitrale ou étrangère, il renvoie seulement les parties à mieux se pourvoir. Dans tous les autres cas, le juge qui se déclare incompétent désigne la juridiction qu'il estime compétente. Cette désignation s'impose aux parties et au juge de renvoi. »

97 Ce critère a été approuvé par les arrêts rendus par la Cour Suprême de Justice (CSJ) le 13 décembre 2006 et le 30 janvier 2008. Vid. E. Alarcón, Comentarios a la Ley de arbitraje comercial de la República Dominicana, Santo Domingo, Librería Jurídica Internacional, 2012 ; J.C. Fernández Rozas et N. Concepción. Sistema de arbitraje comercial en la República Dominicana, Santo Domingo, Editorial Funglode, 2013.

98 G. Ireland et J. de Galíndez, Divorce in the Americas, Buffalo NY: Dennis, 1947.

99 Le code de procédure civile de la République Dominicaine, amendé par la commission nommée par le pouvoir exécutif, conformément au décret du Congrès national daté du 4 juillet 1882, a conservé l'ordre des articles du texte français en vigueur (sic) dans la République depuis 1845.

100 En septembre 2010, la proposition législative avant-projet de code de procédure civile a été établie, selon le plan adopté, sous forme de douze volumes. Le premier reprend les principes fondamentaux du processus, à l'application des règles nationales et supranationales, à la coopération judiciaire internationale et à la reconnaissance et à l'exécution des décisions étrangères et internationales. Pour illustrer nos propos, il convient de s'intéresser au chapitre II du titre II, relatif à l'application des règles de procédure internationale, qui commence par affirmer la primauté des règles internationales (art. 29). Il convient également de se référer au titre IV (art. 48 à 63), qui détaille la reconnaissance et l'exécution des décisions étrangères et internationales.

101 G. Parra Aranguren, “La Ley venezolana de 1998 sobre Derecho Internacional Privado”, REDI, vol. LI 1999, 1, pp. 277-287.

102 H. Barrios, “Del Domicilio”, Revista de la Facultad de Ciencias Jurídicas y Políticas, vol. 46, nº 117, Universidad Central de Venezuela, Caracas, 2000, pp. 41 et seq.

103 L'opposition présidentielle visait essentiellement le projet relatif à l'arbitrage commercial international. Pour ces raisons entre autre, le président a opposé un veto partiel au projet de loi de DIPr. Face à cette situation, la Commission du Gouvernement en charge de la justice et des affaires constitutionnelles, se basant sur l'art. 205 du règlement organique de régime intérieur, a établi son rapport le 6 février 2013 et a considéré que les objections formulées par le président de la République étaient fondées. Pour cette raison, la commission a conclu qu'il convenait de modifier les art. 150, 151-158 et 159 du projet de loi de DIPr, recommandant à la chambre plénière de l'Assemblée nationale de les adopter dans leur intégralité. Cette recommandation a été prise en compte, amenant à un nouveau projet de loi en 2013.

104 http://www.asamblea.gob.pa/apps/seg_legis/PDF_SEG/PDF_SEG_2010/PDF_SEG_2013/PROYECTO/2013_P_578.pdf.

105 Les travaux parlementaires de ce dernier projet n'ont pas été exempts de problèmes, non plus. Il est évident que mener en parallèle le projet de loi de DIPr, contenant des dispositions qui s'éloignent de l'esprit du projet mentionné plus haut, a créé des tensions entre les partisans et les opposants de chaque projet. Le fait que le président de la République soit intervenu directement dans l'abandon du projet de DIPr est la preuve qu'il ne s'agissait pas d'un processus législatif pacifique. Mais ce dernier texte n'était pas le seul à être visé. Le texte qui avait été retenu dans un premier temps a suscité une vive opposition, à tel point qu'il a failli ne pas être adopté. Il ne l'a été qu'à la dernière minute, après avoir fait l'objet de nombreuses plaintes appelant le Président à également opposer son veto à ce texte, pour avoir apparemment induit de graves irrégularités ainsi que pour ne jamais avoir été approuvé en première lecture. F. Gómez Arbeláez, “Nueva ley de arbitraje, irregularidad legislativa”, La Prensa, 19 décembre 2013.

106 J.C. Araúz Ramos, “La porfiada reforma del arbitraje en Panamá”, Arbitraje. Revista de Arbitraje Comercial y de Inversiones, vol. VII, nº 1, 2014, pp. 143-149.

107 Ce code a été publié au Journal Officiel du 8 mai 2014. Selon l'art. 184 du code, il « prendra effet dans les six mois suivant sa promulgation. » http://www.gacetaoficial.gob.pa/pdfTemp/27530/46493.pdf.

108 Il s'agit d'un projet de code modèle de droit international privé du 3 décembre 2005. AEDIPr, t. VI, 2006, pp. 1242-1276 ; J.A. Silva, “Una codificación iusprivatista para México: los trabajos para conformarla”, AEDIPr, t. VI, 2006, pp. 1221-1240.

109 http://www.diputados.gob.mx/LeyesBiblio/index.htm.

110 Le comité a été présidé par Lino Saldaña, ex-juge associé à la Cour Suprême de Porto Rico. Le professeur Arthur T. von Mehren, Professeur de droit à l'université Harvard, a été consultant de ce comité et le professeur Symeon C. Symeonides, Professeur et Doyen à l'école de droit de l'université de Willamette a été le rapporteur de cette contribution.

111 À partir de ce document et à l'aide d'une première ébauche de traduction vers l'espagnol de la proposition de l'Académie soumise par Julio Romanach, du Center of Civil Law Studies de Louisiana State University, cette Commission commune a élaboré l'ébauche du livre de DIPr actuel. La rédaction des articles tout comme celle de leurs commentaires ont subi d'importantes modifications rendant nécessaire une uniformisation du langage et de la structure des articles, afin de les rendre conformes aux critères de rédaction du reste du projet de code civil révisé. De plus, dans certains cas, il a également été nécessaire d'y apporter quelques modifications de fond afin de l'aligner sur le nouveau contenu des autres livres du projet. Ceci a évidemment conduit à modifier des commentaires ayant pour but de justifier les règles. Même en consultant toutes ces sources, ce livre est encore bien loin d'être conforme à chacune d'entre elles.

112 La portion de phrase en italique se rapproche de la phrase « rapport le plus significatif » du Segundo Restatement (sections 5, 188, 222, 28 & 291). Cependant, elle se rapproche également des expressions suivantes, employées dans d'autres codifications : « liens les plus étroits » (art. 9 de la Convention interaméricaine sur la loi applicable aux obligations contractuelles), « le plus directement lié » (art. 30 de la loi vénézuélienne de droit international privé de 1999), « liens les plus étroits » (art. 200 et 206 des projets argentins de droit international privé de 1998), « rapport le plus étroit » ou « lien de rattachement le plus étroit » (loi suisse de DIPr de 1987), « lien étroit » (Code civil du Québec de 1994), « lien de rattachement le plus étroit » (art. 28 de la loi allemande de DIPr et convention de Rome) et « lien de rattachement le plus fort » (loi autrichienne de DIPr de 1978). De même, la phrase « lien de rattachement le plus significatif » est suffisamment différente de toutes les citations mentionnées plus haut. Par exemple, l'expression « plus significatif » invite à effectuer une analyse plutôt qualitative et n'a pas une connotation aussi territoriale ou physique que les expressions « plus fort » ou « plus proche », employées dans les formulations européennes. Dans une certaine mesure, ces différences et similitudes peuvent refléter les influences européennes et américaines en la matière. Il est cependant plus important de noter que les termes « lien de rattachement le plus significatif » et l'objectif qu'ils poursuivent est soutenu par la jurisprudence portoricaine de droit international privé, en particulier à travers l'expression « contacts dominants » employée dans Maryland Casualty, Viuda de Fornaris y Green Giant. Toutefois, l'expression « plus significatif » est suffisamment différente pour ne pas être exposée à une interprétation erronée qui inviterait à effectuer un calcul mécanique ou quantitatif de contacts ou une simple localisation géographique du litige.

113 La commission ayant rédigé le rapport était composée de : Edynson Alarcón, Julio Cesar Valentín, Marco Herrera, Marcos Peña, Cruz, Peña, Fabiola Medina, Mario Pujols, Leidylin Contreras, M.A. Víctor Villanueva, M.A. Nathanael Concepción, M.A. Marjorie Félix, Ana Carolina Blanco Hache, ainsi que du Professeur José Carlos Fernández Rozas en qualité de rapporteur. La Fondation Globale Démocratie et Développement (FUNGLODE), l'Institut Global des Hautes Études en Sciences Sociales (IGLOBAL) et la Fondation Institutions et Justice (FINJUS) ont remis, le 19 mars 2014, la proposition de projet de loi de droit international privé au président du Sénat de la République, Reinaldo Pared Pérez. C'est Marcos Villamán, recteur de l'IGLOBAL, qui a été chargé de remettre cette proposition de projet de loi. http://www.funglode.org/wp-content/uploads/2013/11/proyecto-ley-derecho-internacional-privado.pdf.

114 S.T. Castaños, “Algunas reflexiones sobre la necesidad e importancia de regular el derecho internacional privado de la República Dominicana mediante una ley especial?”, Gaceta Judicial, la Revista Jurídica de Interés General (Republique Dominicaine), Año 18, nº 329, 2014; R. Campillo Celado, “Necesidad de la adopción de una ley nacional sobre Derecho internacional privado en la República Dominicana”, ibid.

115 Le projet de code argentin de DIPr a été élaboré par un groupe de juristes internationalistes privatistes argentins, sous l'égide de la « Commission d'étude et d'élaboration du projet de loi de droit international privé » nommée par l'exécutif (Res. M.J y DH 191/02 et Res. M.J.S y D.H. 134/02) et composée des Dr Miguel Angel Ciuro Caldani, Eduardo L. Fermé, Berta Kaller de Orchansky, Rafael Manovil, Maria Blanca Noodt Taquela, Beatriz Pallarés, Alicia Maria Perugini Zanetti, Horacio Daniel Biombo, Julio Cesar Rivera, Amaia Uriondo de Martinolli et Inés M. Weinberg de Roca. Par la suite, ce projet a été remis au Congrès national conjointement avec le « projet d'unification du code civil et du code de commerce » afin de procéder à leur traitement législatif. http://www1.hcdn.gov.ar/dependencias/dsecretaria/Periodo2004/PDF2004/ TP2004/02abril 2004/ tp037/2016-D-04.pdf-

116 À signaler la convention de La Haye du 19 octobre 1996 concernant la compétence, la loi applicable, la reconnaissance, l'exécution et à la coopération en matière de responsabilité parentale et de mesures de protection des enfants, à la Convention interaméricaine de La Paz de 1984 sur les conflits de lois en matière d'adoption de mineurs ou à la Convention interaméricaine de Montevideo de 1989 sur les obligations alimentaires.

117 Vid. S.L. Feldstein de Cárdenas, “La reforma del Derecho Internacional privado en la República Argentina, ¿la cenicienta se convertirá en princesa?”, www.elDial.com ; id., “La Ley de Derecho Internacional privado en la República Argentina: mito o realidad?”, Revista Jurídica del Centro de Estudiantes de la Facultad de Derecho de Buenos Aires, n° 4, 1999, “El Proyecto argentino en materia de Derecho Internacional privado: Reforma a la italiana?”, www.diritoitalia.com, décembre 2000 ; N. Magallón Elósegui, “La reforma del Derecho internacional privado en la República Argentina”, Revista Estudios Internacionales, 14, 2007.

118 Il s'agit d'un texte composé de 63 articles qui intègre le projet uruguayen de loi générale de DIPr de 2008. L'idée a commencé à se concrétiser en 1994, avec l'initiative mise en œuvre par le Pr. Dr. Didier Opertti Badán à l'institut de DIPr de la faculté de droit de l'Universidad de la República. Un groupe composé de plusieurs membres de l'institut a été désigné, à qui il a été assigné la tâche d'élaborer un premier avant-projet de loi nationale de DIPr, commençant par la théorie générale. Une fois cette tâche accomplie, ils se sont retrouvés dans l'impasse, surtout suite à la relance opérée à la demande du Pr. Opertti. En effet, en qualité de ministre des affaires étrangères de l'Uruguay, il a formellement désigné un groupe de travail dont le rôle était d'élaborer un avant-projet de loi générale de DIPr devant se substituer à l'appendice du code civil créé par la décision no 652/998 du pouvoir exécutif au 17/08/1998. Les membres du groupe, présidé par le Dr. Opertti, était les Dr. Ronald Herbert, Eduardo Tellechea, Marcelo Solari, Berta Feder, Carmen González et Cecilia Fresnedo. Plus tard, les ont rejoint les Dr. Jorge Tálice, Paul Arrighi et Gonzalo Lorenzo.

119 J.L. Marín Fuentes, Derecho Internacional Privado, Medellín, Editorial Universidad de Medellín, 2013, p. 17.

120 http://www.udea.edu.co/portal/page/portal/bibliotecaSedesDependencias/unidades Academicas/ FacultadDerechoCienciasPoliticas/BilbiotecaDiseno/Archivos/01_Documentos/ proyecto_ de_ ley_gral_der_intrna_priv2.pdf.

121 http://asadip.files.wordpress.com/2009/12/ley-dipr-2.pdf.

122 G. Parra-Aranguren, “Las recientes modificaciones del DIPr en el Continente Americano”, Revista de la Facultad de Derecho (Univ. Andrés Bello), nº 43, 1991, pp. 357-443, spéc. pp. 399-406.

123 J.H.A. van Loon, en The Effect of Treaties in Domestic Law (F.J. Jacobs y S. Roberts, eds.), vol. 7, Londres, Sweet & Maxwell, 1987, pp. 229 et seq.

124 Du point de vue du droit des traités vid. I. Sinclair, “The Vienna Convention on the Laws of Treaties: The Consequences of Participation and Non-participation”, Am. J. Int'l L., Proceeding of 78th Annual Meeting, 1984, pp. 271 et seq.

125 Vid. H.U. Jessurun D'Oliveira, “Codification et unification du droit international privé. Problèmes de coexistence”, Unification et le droit comparé dans la théorie et la pratique. Contributions en l'honneur de Jean Georges Sauveplanne, Deventer, Kluwer Law and Taxation Publishers, 1984, pp. 117 et seq.

126 L'adoption de ce principe a été vivement saluée par W. Goldschmidt, “Un logro americano en el campo del DIPr”, El Derecho (Buenos Aires), nº 4.763, 24 juillet 1979.

127 K. Siehr, “Codificazioni del diritto internazionale privato e convenzioni internazionali”, Problemi di riforma del diritto internazionale privato italiano, Milan, Giuffrè, 1986, pp. 497-507.

128 E. Jayme, “Identité culturelle et intégration: le droit international privé postmoderne”, Recueil des Cours, t. 251, 1995, pp. 68-69.

129 Il est juste de signaler la sensibilité particulière aux problèmes de coexistence entre le code civil et les conventions internationales signées par l'Uruguay décrite dans l'ouvrage de Q. Alfonsín, Curso de Derecho privado internacional con especial referencia al Derecho uruguayo y a los Tratados de Montevideo de 1889. Teoría del Derecho privado internacional, Montevideo, Facultad de Derecho y Ciencias Sociales, 1955, spéc. pp. 227 et seq.

130 Plus d'une cinquantaine de traités internationaux relatifs au DIPr au sens large ont donné un nouveau visage aux processus de production normative existants au Mexique. Vid. L. Pereznieto Castro, “El art. 133 Constitucional: una relectura”, Jurídica, nº 25, 1994 et L. Ortíz Ahlf, “Comentarios sobre algunos problemas de Derecho internacional público que plantean las Convenciones de DIPr”, Memoria del XIII Seminario Nacional de DIPr, México, UAM, 1992, pp. 176 et seq.).

131 Ils sont le fruit d'une série de « Congrès hispano-américains » qui se sont tenus à partir de 1826. Ils ont ensuite été nommés « Traités de Montevideo » de 1889, révisés en 1939-1940. Vid. M. Argúas, “The Montevideo Treaties of 1889 an 1940 and their Influence on the Unification of Private International Law in South America”, dans le livre centenaire de la ILA, The Present State of International Law and Other Essays, Kluwer, 1973, pp. 345-360.

132 Lors du Premier congrès juridique latino-américain, qui eut lieu à Lisbonne en 1889, la polémique sur la loi de la nationalité et celle du domicile en matière de réglementation du statut personnel a été au centre des débats. Vid. M. Torres Campos, Elementos de DIPr, 4ème ed, Madrid, Librería de F. Fé, 1913, pp. 145-146.

133 Vid. G. Droz, M. Pellichet et A. Dyer, “La Conférence de La Haye de droit international privé vingt-cinq ans après la création de son bureau permanent”, Recueil des Cours, t. 168 (1980-III), pp. 213-268 ; R. Graveson, “Problems of the Hague Conference of Private International Law”, Essays in honour of R. Ago, vol. IV, Milan, Giuffrè, 1987, pp. 125 et seq ; M. H. van Hoogstraten, “La codification par traités en droit international privé dans le cadre de la Conférence de La Haye”, Recueil des Cours, t. 122 (1967-III), pp. 337-435 ; id., “L'état présent de la Conférence de La Haye de droit international privé”, The Present State of International Law (Libro centenario de la I.L.A.), Deventer, 1973, pp. 371 et seq. ; J.H.A. Van Loon, “Quelques réflexions sur l'unification progressive du droit international privé dans le cadre de la Conférence de La Haye”, Liber Memorialis François Laurent, Bruxelles, Story-Scientia, 1989, pp. 1133-1150 ; A. E. von Overbeck, “La contribution de la Conférence de La Haye au développement du droit international privé”, Recueil des Cours, t. 233 (1992-II), pp. 9-98 ; R. Viñas Farré, Unificación del DIPr. Conferencia de La Haya de DIPr, Barcelona, Bosch, 1978 ; W. von Steiger, “Konventionen oder Modellgesetze?”, Ann. suisse dr. int., vol. 17, 1970, pp. 39 et seq.

134 Vid. G. Vieira da Costa Cerqueira, “La Conférence de La Haye de droit international privé. Une nouvelle voie pour le développement du droit international privé des régionales Organisations d'intégration économique”, Rev. dr. unif. / Unif. Rev. Law, vol. 12, nº 4, 2007, pp. 761-793.

135 Vid. G. Parra-Aranguren, “The Centenary of the Hague Conférence on Private International Law”, Études de droit international en l'honneur de Pierre Lalive, Basilea, Helbing und Lichtenhahn, 1993, pp. 111-112 ; D. Opertti Badán, “The Relationships between Latin American and the Hague Conference regarding the Recent Developments of Private International Law,”, A Commitment to Private International Law. Essays in honour of Hans van Loon, Cambridge, Intersentia, 2013, pp. 421-432.

136 Concernant l'admission et l'acceptation du Venezuela vid. G. Parra-Aranguren, “La Conferencia de La Haya sobre DIPr”, Facultad de Derecho (Univ. Andrés Bello), nº 37, 1986-87, pp. 204-205. Il va sans dire que l'Espagne a voté en faveur de son admission.

137 Dans ce domaine en particulier et en fonction de l'importance de nombreux pays latino-américains en tant qu'« État d'origine » de mineurs susceptibles d'être adoptés, la Conférence de La Haye de DIPr a été exceptionnellement ouverte à des États non membres.

138 De manière générale Cf. J.H.A. van Loon, “The Increasing Significance of International Co-operation for the Unification of Private International Law”, Forty Years On: The Evolution of Postwar Private International Law, Deventer, 1990, p. 102.

139 Concernant le jeu de ces clauses universelles dans le processus codificateur vid. G.A.L. Droz, “Regards sur le droit international privé comparé (Cours général de droit international privé)”, Recueil des Cours, t. 229 (1991-IV), p. 391 et J.D. González Campos et A. Borrás, Recopilación de Convenios de la Conferencia de La Haya de DIPr (1951-1993). Traducción al castellano, Madrid, M. Pons, 1996, pp. 21-24.

140 Vid. G. Parra-Aranguren, “La Conferencia de La Haya...”, loc cit., p. 216.

141 Ibid., pp. 218-220.

142 Cf. A. Borrás, “Unificación de la traducción al castellano de los Convenciones de La Haya de DIPr”, REDI, vol. XLII, 1990, pp. 703-705. Il convient de rappeler que lors de son VIIème Congrès, l'IHLADI avait préconisé l'élaboration d'un vocabulaire juridique international de la Communauté hispano-luso-américano-philippine (Anuario IHLADI, vol. 4, 1973, p. 692-693).

143 Vid. J. R. Vanossi, “El Comité Jurídico InterAmericano (reseña de su historia y de su obra)”, Revista El Derecho (Buenos Aires), vol. 118, pp. 771-783.

144 Il convient de garder à l'esprit que le chapitre XVIII de la Charte OEA a permis de mettre en place des conférences de ce type. Il s'agit de réunions intergouvernementales ayant pour objectif de traiter de questions techniques et spéciales ou de développer certains aspects de la coopération interaméricaine. Ces réunions ont lieu lorsque l'assemblée générale ou la réunion de consultation des ministres des Affaires étrangères en décide, de leur propre initiative ou de celle de l'un des conseils ou organismes spécialisés.

145 Vid. R. Abarca Landero, “Convenciones interamericanas en materia procesal. Panamá, 1975”, Cooperación interamericana en los procedimientos civiles y mercantiles, Mexico, U.N.A.M., 1982, pp. 613-678 ; T. B. de Maekelt, Conferencia especializada de Derecho internacional privado (CIDIP I), análisis y significado de las convenciones aprobadas en Panamá, 1975, Caracas, Universidad Central de Venezuela, 1979 ; G. Parra Aranguren, “La Primera Conferencia especializada interamericana sobre Derecho internacional privado (Panama, 1975)”, Libro-homenaje a la memoria de Joaquín Sánchez- Covisa, Caracas, Ed. Sucre, 1975, pp. 253-277.

146 Vid. D. Opertti Badán, “L'œuvre de la CIDIP dans le contexte du droit international privé actuel”, Liber amicorum Georges A.L. Droz, La Haye, Nijhoff, 1996, pp. 269-286.

147 Vid. D. Opertti Badan, “Unification of Laws in the Western Hemisphere: The Contribution of the Organization of the Organisation of American States”, Rev. dr. unif., 1981, pp. 60-67.

148 Vid. R. Eyzaguirre Echeverría, “Los problemas del Derecho comercial en el DIPr interamericano”, XII Curso de Derecho Internacional del Comité Jurídico Interamericano, 1990, pp. 241-259.

149 Cf. J.C. Fernández Rozas, “La cooperación judicial en los Convenios de La Haya de DIPr”, REDI, vol. XLV, 1993, pp. 83-84.

150 Ce code de droit international privé a été adopté par le décret 1575 de l'Assemblée Législative et publié le 31 août 1929. Au moment de signer la Convention, la délégation de Guatemala a annoncé « sa pleine acceptation et sans réserve d'aucune sorte » du code Bustamante.

151 Les problèmes généraux d'application du code Bustamante au Venezuela et, plus particulièrement, sa primauté sur le droit interne et les réserves émises par ce pays sont détaillés dans l'ouvrage de J. Samtleben, “La aplicación del Código Bustamante en Venezuela”, Libro homenaje a la memoria de Joaquín Sánchez Covisa, Caracas, Univ. Central de Venezuela, 1975, pp. 329-333.

152 Le code a été ratifié par le Costa Rica par le décret No 50 du 13 décembre 1928 du « Congrès constitutionnel » et avalisé par le pouvoir exécutif le 4 février 1930.

153 La Convention a été signée par le Congrès national sous la réserve suivante : « Veuillez approuver le code de droit international privé, signé le 20 février 1928 lors de la VIème Conférence internationale américaine de La Havane, sous réserve que face au droit chilien et concernant les conflits entre la loi chilienne et une loi étrangère, les dispositions de la législation actuelle et future du Chili prévalent sur le droit dudit code en cas de divergence entre les unes et les autres ». Elle est entrée dans l'ordonnancement juridique en tant que loi de la République le 10 avril 1934.

154 La position du Mexique face à cet instrument est particulière du fait que le code a été voté et signé mais jamais ratifié. Vid. une comparaison du système mexicain et du code Bustamante afin d'observer son éventuelle compatibilité avec un éventuel processus d'harmonisation du DIPr latino-américain réalisée par E. Helguera, “El DIPr mexicano y el Código Bustamante”, Comunicaciones mexicanas al VI Congreso Internacional de Derecho Comparado (Hamburgo, 1962), Mexico, UNAM, 1962, pp. 29-47.

155 J. Samtleben, Derecho Internacional Privado en América latina. Teoría y Práctica del Código Bustamante, vol. I, Parte General, Buenos Aires, Depalma, 1983, pp. 178-189.

156 T. de Maekelt, “El futuro del nuevo Derecho Internacional Privado venezolano en el próximo Siglo”, Revista Mexicana de DIPr, nº spécial, 2000, p. 65.

157 L'Espagne était sur le point d'intégrer l'un d'entre eux sous la Deuxième République. Vid. I. Beato Sala: “Sobre la accesion o adhesión de España al Código americano de DIPr, denominado 'Código Bustamante'“, Revista General de Legislación y Jurisprudencia, t. 167, 1935, pp. 603-616 ; F. de Castro, ¿Debe adherirse España al Código Bustamante?”, Revista de Derecho Privado, vol. XXII, 1935, pp. 1-6 ; id., “De nuevo sobre la pretendida adhesión de España al Código Bustamante”, Revista General de Legislación y Jurisprudencia, vol. XII, 1935, pp. 306-307 ; M. de Lasala Llanas, “Posibilidad de la accesión de España al Código americano de DIPr ('Código Bustamante')”, Revista General de Legislación y Jurisprudencia, vol. XXI, 1934, pp. 221-228 ; id., “¿Puede adherirse España al Código Bustamante?”, Revista General de Legislación y Jurisprudencia, vol. XXII, 1935, pp. 217-221. G. Parra Aranguren: “El Código Bustamante: su vigencia en América y su posible ratificación por España”, Libro homenaje al Doctor L. Loreto, Caracas, 1975, pp. 201-282 ; J. Quero Molares, “La adhesión de España al Código americano de DIPr”, Revista General de Legislación y Jurisprudencia, t. 165, 1934, pp. 695-721.)

158 M. Mateucci, “Les méthodes de l'unificaton du droit”, Annuaire de l'Unidroit, 1956-II, pp. 40 et seq. ; M. Ancel, “Utilité et méthodes du droit comparé. Éléments d'introduction générale à l'étude comparative des droits”, Rev. int. dr. comp., vol. 23, n°4, pp. 933-935.

159 Cf. A.M. Garro, “Armonización y unificación del Derecho internacional privado en América latina: esfuerzos, tendencias y realidades”, España y la codificación internacional del Derecho internacional privado, Madrid, Eurolex, 1993, pp. 347-350.

160 R. de Nova, “Current Developments of Private International Law”, Am. J. Int'l.L., vol. 13, 1964, pp. 542 et seq.

161 G.A.L. Droz, “La Conférence de La Haye de droit international privé et les méthodes d'unification du droit: Traités internationales ou lois modèles?”, Rev. int. dr. comp., 1961, pp. 507-521.

162 Ce qui découle typiquement de cette idée est la vieille affirmation de M. Mateucci, selon laquelle l'unification juridique est la fin de toute source internationale. Cf. “Introduction à l'étude systématique du droit uniforme”, Recueil des Cours, t. 91, 1957, pp. 388-389.

163 Vid. M.V. Cuartero Rubio, voz “Derecho uniforme”, Enciclopedia Jurídica Básica, vol. II, Madrid, Civitas, 1995, pp. 2380-2381.

164 J.C. Fernández Rozas, “Los procesos de unificación internacional del Derecho privado: técnicas jurídicas y valoración de resultados”, La unificación jurídica en Europa, Seminario organizado por el Consejo General del Notariado en la UIMP (J.M. García Collantes, ed.), Madrid, Civitas, 1999, pp. 17-44.

165 P. Chaveau, “Des conventions portant Loi Uniforme”, Journ. dr. int., t. 83, 1956, pp. 570-594.

166 P. Lalive, “Tendances et méthodes en droit international privé (Cours général)”, Recueil des Cours, t. 155, 1977-II, pp. 47-49.

167 C.M. Schmitthoff, “International Law and Private International Law”, Select Essays on International Trade Law, Dordrecht, 1988, pp. 533 et seq.

168 H.U. Jessurun d'Oliveira, “Codification et unification

”, loc. cit., pp. 117-130.

169 K.H. Nadelmann, “Conficts between Regional and International Work on Unification of Rules of Choice of Law”, Harvard Int'l L.J., vol. 15, 1974, 213-217.

170 H. Bauer, “Les traités et les règles de droit international privé matériel”, Rev. crit. dr. int. pr., 1966, p. 570.

171 Vid. J.C. Fernández Rozas, “La cooperación judicial en los Convenciones de La Haya de Derecho internacional privado”, REDI, vol. XLV, 1993, pp. 81-100 ; id., “La cooperación jurídica internacional, civil y mercantil, en el espacio hispano-luso-americano-filipino”, Anuario del Instituto Hispano-Luso-Americano, vol. 15, 2001, pp. 13-73.

172 J.D. González Campos, “Efforts concertés d'unification et coexistence des règles de droit international privé dans le système étatique”, E pluribus unum. Liber amicorum G.A. Droz, La Haya, Martinus Nijhoff Publishers, 1996, pp. 109-110.

173 Cf. J.C. Fernández Rozas, “Los procesos de unificación internacional del Derecho privado

”, loc. cit., pp. 43-44.

174 Vid., concernant le système australien, P. Brazil, “Reception of Uniform Law into National Law: an Exercice in Good Faith and Progressive Development of the Law”, Rev. dr. unif., vol. III, 1998, pp. 318-318.

175 Cf. B. Oppetit, “Le droit international privé, droit savant”, Recueil des Cours, t. 234, 1992-III, vol. 234, pp., p. 422.

176 Cela est notamment vrai lorsqu'il s'agit de déterminer le champ d'application des dispositions de la convention. B. Knapp, “Unification international des règles et désignation du droit applicable”, Internationalisation du droit. Mélanges el l'honneur de Yvon Loussouarn, Paris, Dalloz, 1994, pp. 219-232.

177 A.L. Diamond, “Conventions and their Revision”, Unification.Liber amicorum Juan Georges Sauveplanne, op. cit., 1984, pp. 45-60.

178 S. Bariatti, L'interpretazione delle Convenzioni internazionali di diritto uniforme, Padoue, Cedam, 1986, pp. 44 et seq.

179 S. Sánchez Lorenzo, “La aplicación de los Convenciones de La Haya de Derecho internacional privado a los conflictos de leyes internos”, REDI, vol. XLV, 1993, pp. 131 et seq.

180 F. Ferrari, “The Relationship between International Uniform Contract Law Conventions”, Rev. dr. unif., vol. V, 2000, pp. 69-84.

181 S. Álvarez González, “Cláusulas de compatibilidad en los Convenios de la Conferencia de La Haya”, REDI, vol. XLV, 1993, pp. 41 et seq.

182 Vid. F. Majoros, Les conventions internationales en matière de droit privé. Abrégé théorique et traité pratique, t. I, Paris, Pedone, 1976, pp. 282 et seq.

183 Dans la doctrine espagnole Vid. S. Álvarez González, “Cláusulas de compatibilidad...”, loc. cit., pp. 39-62.

184 Dans son art. 21 « Relations avec d'autres conventions », la Convention de Rome de 1980 sur la loi applicable aux obligations contractuelles dispose que « la présente convention ne porte pas atteinte à l'application des conventions internationales auxquelles un État contractant est ou sera partie. » Sur ce point, l'art. 15 de la Convention de La Haye sur la loi applicable à la responsabilité du fait des produits se positionne de la même manière.

185 E. Krings, “L'opportunité de jurisdictions supranationales pour l'interprétation des lois uniformes”, Rev. dr. unif., vol. III, 1998, pp. 525-534.

186 L. Marquis, “L'interprétation du droit commercial international uniforme: un modèle personnifié par Marc-Antoine”, Rev. int. dr. comp., vol. 54, 2002, pp. 97-125.

187 F. Ferrari, “I rapporti tra le convenzioni di diritto materiale uniforme in materia contrattuale e la necessità di un'interpretazione interconvenzionale”, Riv. dir. int. pr. proc., 2000, pp. 669-688.

188 K.H. Nadelmann et W.L.M. Reese, “The American Proposal at the Hague Conference on Private International Law to Use the Method of Uniform Laws”, Am. J. Comp. L., 1958, pp. 239-247 ; K. Nadelmann, “Méthodes d'unification du droit international privé. La législation uniforme et les conventions internationales”, Rev. crit. dr. int. pr., 1958, pp. 37-51 ; A. Marín López, “La Conferencia de La Haya de Derecho internacional privado y el método de las leyes modelo”, RDEA, nº 24, 1969, pp. 33-48.

189 P. Malaurie, “Loi uniforme et conflits de lois”, Travaux Com. fr. dr. int. pr. (1964-1966), Paris, pp. 83-109.

190 H. Batiffol, “Las tendances doctrinales actuelles en droit international privé”, Recueil des Cours, t. 72 (1948-1), pp. 7-8 et 34-35.

191 J.C. Fernández Rozas, “Sobre el contenido del Derecho internacional privado”, REDI, vol. XXXVIII, 1986, pp. 69-108.

192 D'un point de vue normativiste qui prévalait dans la doctrine jusqu'à récemment, les questions d'ordre typiquement commercial suscitant des problèmes de « conflits de lois » relevaient du droit des affaires internationales. Cette conception, très répandue au début du XXème siècle, venait de la distinction faite entre les « actes civils » et les « actes de commerce » présents dans les codes de commerce. Suite à la résolution d'éventuels « conflits de qualifications », les « problèmes conflictuels » étaient compris dans les actes de commerce à l'intérieur du « droit des affaires internationales ». Cette position stricte faisait alors allusion à l'ensemble de règles ayant pour objet certains actes juridiques ou certaines personnes et constituant une exception aux règles de droit international civil. Il est cependant important de prendre en compte que le fil directeur de ce système juridique, selon cette conception, reposait sur deux éléments commun : la matière régie (acte de commerce) et la règlementation (règle de renvoi ou de conflit).

193 L. Herrera Mendoza, “La escuela estatutaria en Venezuela y su evolución hacia la territorialidad”, Estudios sobre Derecho Internacional Privado y Temas Conexos, Caracas, El Cojo, 1960, p. 124.

194 F. Rigaux, “La méthode du conflit de lois dans les codifications et projets de codification de la dernière décennie”, Rev. crit. dr. int. pr., 1985, pp. 1 et seq. ; P.M. Patocchi, Règles de rattachement localisatrices et règles de rattachement à caractère substantiel (De quelques aspects récents de la diversification de la méthode conflictuelle en Europe), Ginebra, Georg, 1985 ; E. Vassilakakis, Orientations méthodologiques dans les codifications récentes du droit international privé en Europe, Paris, LGDJ, 1987.

195 F.K. von Savigny, System des heutigen römischen Rechts, t. VIII, Berlín, Veit und Comp., 1849.

196 J.-L. Elhoueiss, “L'élément d'extranéité préalable en droit international privé”, Journ. dr. int., 2003, pp. 39 et seq.

197 Bien que les États de la Caraïbes ne l'aient pas signé, il convient de rappeler que la Convention interaméricaine sur le domicile des personnes physiques en droit international privé définit le domicile général et le domicile spécial d'une personne physique moyennant des solutions cumulatives. Celles-ci facilitent le choix du lien de rattachement de cette personne physique, malgré la diversité des législations internes existant en la matière. Au titre de la convention, le domicile général sera déterminé en fonction des facteurs suivants : 1) le lieu de résidence habituelle ou le siège principal des affaires ; 2) à défaut, le lieu de résidence simple sera considéré comme domicile ; 3) à défaut, en absence de résidence simple, le lieu où se trouve cette personne. Concernant le domicile spécial, la Convention établit que : 1) le domicile des personnes incapables est celui de leur représentant légal ; 2) le domicile des conjoints est celui dans lequel ils vivent ensemble ; 3) le domicile des fonctionnaires diplomatiques est le dernier qu'ils aient occupé dans le territoire de l'État accréditant ; 4) le domicile des personnes physiques résidant temporairement à l'étranger dans le cadre de leur travail ou détachées par leur gouvernement est celui de l'État ayant procédé au détachement ; 5) lorsqu'une personne a un domicile dans deux États parties, son lieu de résidence simple est considéré comme son domicile et si elle possède une résidence simple dans les deux, le lieu où trouve cette personne sera préféré.

198 E. Vitta, “Il principio di nationalità nel diritto internazionale privato italiano”, Riv. dir. int. pr. proc., 1981, pp. 345-363.

199 R.D. Kollewijn, “Degenerazione del principio di nazionalità nel diritto internazionale privato moderno”, Dir. int., vol. XIII, 1959, pp. 508-525 ; Ph. Francescakis, “Les avatars du concept de domicile dans le droit international privé actuel”, Travaux Com. fr. dr. int. pr. (1982-1984), pp. 291 et seq.

200 R. van Rooij, “The Concept of Domicile (“woonplaats”) in Netherlands Private International Law”, Netherlands Int'l L. Rev., vol.22, 1975, pp. 165-182.

201 M. Verwilghen, “La place de la nationalité dans le Code de droit international belge”, loc. cit., pp. 1687-1701.

202 J.V. Long, “Domicil v. Nationality”, RabelsZ, 1953, pp. 247-262 ; L.I. De Winter, “Nationality or Domicile? The Present State of Affairs”, Recueil des Cours, t. 128, 1969-III, pp. 347-504 ; Y. Loussouarn, “La dualité des principes de nationalité et domicile en droit international privé”, Annuaire IDI, vol. 62-II, 1987, pp. 127-178.

203 T. B. de Maekelt, Ley venezolana de derecho internacional privado: tres años de su vigencia, Discurso y trabajo de incorporación a la Academia de Ciencias Politicas y Sociales de la Doctora Tatiana B. de Maekelt, discurso de contestación de la Académica Doctora Hildegard Rondón de Sansó, acto celebrado el 18 de junio de 2002, Caracas, Venezuela, p. 55.

204 Vid. infra, le commentaire de l'art. 5.

205 A. Sánchez de Bustamante y Sirvén, “La nationalité et le domicile. Étude de droit international privé”, Rev. crit. dr. int. pr., 1927, pp. 375 et seq.

206 P. Rogerson, “Habitual Residence: The New Domicile?”, Int' Comp.L.Q., vol. 49, nº 1, 2000, pp. 86-107.

207 Y. Lequette, “Le droit international privé et les droits fondamentaux”, Libertés et droits fondamentaux (R. Cabrillac, M.A. Frison-Roche et T. Revet, dirs.), 10ème éd., Paris, Dalloz, 2004, pp. 97 et seq.

208 S. Sánchez Lorenzo, “Posmodernismo y Derecho internacional privado”, REDI, 1994, pp. 557-585 ; id., “Postmodernismo e integración en el Derecho internacional privado de fin de siglo”, Cursos de Derecho Internacional y Relaciones Internacionales de Vitoria-Gasteiz (1996), Madrid, Tecnos, 1997, pp. 149-173.

209 J.-Y. Carlier, Autonomie de la volonté et statut personnel, Bruxelles, Bruylant, 1992 ; S. Álvarez González, “Breves notas sobre la autonomía de la voluntad en Derecho internacional privado”, Soberanía del Estado y Derecho Internacional. Homenaje al Profesor Carrillo Salcedo, vol. I, Séville, 2005, pp. 137 et seq.

210 A.E. von Overbeck, “L'irrésistible extension de l'autonomie en droit international privé”, Nouveaux itinéraires en droit. Hommage à François Rigaux, Bruxelles, 1993, pp. 619 et seq.

211 P. Gannagé, “La pénétration de l'autonomie de la volonté dans le droit international privé de la famille”, Rev. crit. dr. int. pr., 1992, pp. 425-454 ; J. Basedow et B. Diehl-leistner, “Das Staatangehörigkeitsprinzip im Einwanderungsland”, Nation und Staat im Internationalen Privatrecht (E. Jayme y H.-P. Mansel, eds.), C.F. Müller, 1990, pp. 13-43 ; C. Kohler, “L'autonomie de la volonté en droit international privé: un principe universel. Entre libéralisme et étatisme”, Recueil des Cours, t. 359, 2013, pp. 285-478.

212 Le Venezuela en Amérique Latine et l'Italie en Europe ont opté pour cette solution. Le projet dominicain penche également en faveur d'une telle séparation. Au Panama, une loi d'arbitrage et un code de DIPr introduisant une réglementation détaillée de l'arbitrage commercial international sont entrés en vigueur respectivement en 2013 et en 2014, ce qui générera sans doute des problèmes de coordination législative. Vid. J.C. Araúz, “La porfiada reforma del arbitraje en Panamá”, Arbitraje. Revista de Arbitraje Comercial y de Inversiones, vol. VII, nº 1, 2014, pp. 127-143.

213 T. B. de Maekelt, Ley venezolana de derecho internacional privado: tres años de su vigencia, op. cit., p. 48.

214 Le champ d'application de cette convention établit explicitement la primauté du droit international sur les règles de droit international privé provenant de source interne. Elle se base sur le principe d'application d'office du droit étranger, à l'exception des cas où la loi d'un État partie possède des institutions ou procédures essentielles à sa bonne application et qui ne sont pas prévus par la législation d'un autre État partie. Cette convention reconnait également que l'interprétation devra se faire dans le respect de l'ordre juridique dont fait partie la loi applicable et non pas des règles d'interprétation propres au juge saisi de l'affaire. Une autre exception du champ d'application est la règle qui établit qu'en cas de fraude à la loi, les États parties ont le droit de refuser d'appliquer le droit d'un autre État partie. La convention dispose que les recours juridictionnels seront déterminés conformément à la loi du for (lex fori) et établit une reconnaissance réciproque aux situations juridiques. En dernier lieu, la convention requiert la recherche de la solution la plus juste dans le cas où une même relation juridique est soumise à la réglementation de différentes lois.

215 K. Siehr, “General Problemes of Private International Law in Modern Codification: De lege lata and de lege ferenda”, Yearb. Priv. Int'l L., vol. 7, 2005, pp. 17-61.

Téléchargements

Avant-projet de loi modèle OHADAC relative au droit international privé.pdf